Élodie se retrouva seule avec sa petite fille après que Théo lait quittée. Pire encore, sa belle-mère, Colette, débarqua pour en rajouter. Élodie ne tenait plus en place. Dans ses bras, la petite Lili sétait endormie, mais elle restait plantée devant la fenêtre, incapable de bouger. Une heure quelle fixait la cour dimmeuble.
Quelques heures plus tôt, Théo était rentré du travail. Élodie cuisinait, mais il ne vint pas la voir. Quand elle entra dans le salon, il faisait ses valises.
« Tu pars où ? » demanda-t-elle, abasourdie.
« Je te quitte. Je pars avec une autre. »
« Théo, cest une blague ? Un problème au boulot ? Tu dois voyager ? »
« Mais tu comprends rien ! Tes obsédée par moi. Tas que Lili dans la tête, tu me négliges, tu te laisses aller. »
« Chut, tu vas réveiller Lili. »
« Voilà ! Encore elle ! Ton mec te quitte, et tu »
« Un vrai mec ne laisserait pas sa femme et son gosse. » murmura Élodie avant de retourner vers sa fille.
Elle connaissait son caractère. Une dispute éclaterait si elle insistait. Les larmes lui montaient aux yeux, mais elle refusait de pleurer devant lui. Elle prit Lili dans ses bras et se réfugia dans la cuisine. Il ny viendrait pas, rien ne lintéressait là-bas.
Par la fenêtre, elle le vit monter dans sa voiture et partir. Sans un regard en arrière. Elle, pourtant, ne pouvait sen détacher. Peut-être espérait-elle le voir revenir, rire et dire que tout ça nétait quune mauvaise plaisanterie. Mais rien.
La nuit fut longue. À qui parler ? Sa mère lavait oubliée quand elle sétait mariée. Pour elle, seul comptait son frère cadet. Ses copines ? Trop occupées avec leurs propres gosses. Et puis, que pourraient-elles faire ?
Elle sendormit à laube. Elle essaya dappeler Théo, mais il raccrocha et envoya un SMS : « Laisse-moi tranquille. »
Quand Lili se réveilla en pleurant, elle se ressaisit. Pas le temps de sapitoyer. Elle avait sa fille, cétait tout ce qui comptait.
En vérifiant son portefeuille et son compte, la panique la saisit. Même en demandant un délai à la propriétaire pour le loyer, ça ne suffirait pas. Et il fallait bien manger. Travailler en freelance ? Théo avait pris son ordi.
Elle avait deux semaines pour trouver une solution. Mais après des appels désespérés, elle comprit : personne ne lembaucherait avec un bébé. Même pour un petit boulot, il fallait une nounou. Et où aller ? Chez sa mère ? Impossible : son frère, sa femme et leurs jumeaux occupaient déjà lappartement.
Elle annonça son départ à la propriétaire. Une chambre en foyer ? Lidée la terrifiait. Elle envoya des messages à Théo pour demander de laide en vain.
Cinq jours avant de devoir partir, on sonna à sa porte. Colette, sa belle-mère, était là.
« Allez, dépêche-toi de faire tes valises. » dit-elle en entrant.
« Colette je ne comprends pas. »
« Quest-ce quil y a à comprendre ? Tu viens chez moi. »
« Chez vous ? »
« Tavais prévu daller où ? Chez ta mère, où ils sentassent déjà comme des sardines ? »
« Vous savez tout ? »
« Bien sûr. Ce pauvre type me la dit aujourdhui. Jai un trois-pièces. Vous aurez votre place. »
Élodie navait pas le choix.
Arrivée chez Colette, elle était terrifiée. Mais celle-ci leur montra une chambre. Une fois Lili couchée, Élodie la rejoignit dans la cuisine.
« Élodie, je sais quon ne sest jamais entendues. Mais jespère que tu pourras me pardonner. »
« Colette, vous vouliez juste le meilleur pour votre fils. »
« Le meilleur ? » linterrompit-elle. « Jétais égoïste. Aujourdhui, il ma tout raconté. Tu me pardonneras aussi davoir élevé un fils pareil. Son père nous a quittés quand il avait trois mois. Il sait pourtant ce que cest et il a fait pire. Reste ici aussi longtemps quil le faudra. »
Élodie en fut sans voix. Des larmes coulèrent.
« Arrête de pleurer. » grogna Colette.
« Cest de la gratitude. »
« Pas besoin. Je répare mes erreurs. On sen sortira. Quand tu travailleras, je garderai Lili. »
À partir de ce jour, elles devinrent inséparables. Colette domptait son caractère, conseillait sans imposer.
Le jour des un an de Lili, elles décorèrent lappartement de ballons. Un gâteau aux pommes parfumait la pièce. Lili, fascinée, fit ses premiers pas vers les décorations.
« Élodie, regarde ! Nos premiers pas ! » sexclama Colette, radieuse.
Elles rattrapèrent la petite quand elle tomba sur les fesses.
Alors quelles sinstallaient à table, la sonnette retentit. Colette ouvrit et découvrit Théo, accompagné dune inconnue.
« Salut, mman. » dit-il en entrant.
« Bonjour, mon fils. Quest-ce qui tamène ? »
« Je peux pas rendre visite à ma mère ? »
« Cinq mois sans donner signe de vie Tu veux quelque chose. »
« On peut pas rester chez toi, Angélique et moi ? Les loyers sont chers. »
« Angélique ? Cest qui ? »
« Mman, voyons »
« Désolée, pas de place. On est déjà plusieurs ici. »
« Tas un amant, cest ça ? »
« Et si cétait le cas, ça te regarde ? Fais attention à tes mots. »
Théo entra et vit Élodie et Lili autour de la table festive.
« Fils, tu nes pas le bienvenu. On fête quelque chose. »
« Elle fait quoi ici ? »
« Elle, comme tu dis, est encore ta femme. Le divorce sera finalisé demain sans toi. Aujourdhui, cest lanniversaire de ta fille. Mais tu as oublié, hein ? »
« Je croyais quon était déjà divorcés. Et puis, cest peut-être pas ma fille. »
« Si tu étais venu aux audiences, ça serait fait. Mais ici, cest chez Élodie et Lili. Les lâches nont pas leur place. Si tu doutes, fais un test de paternité. Tu perdras juste ton argent. Maintenant, sors. »
« Mman, si je pars, cest pour de bon. »
Colette ne répondit pas. Elle lui montra juste la porte.
Plus tard, Élodie la rejoignit.
« Colette ça va ? Je peux partir, si vous voulez. Cest votre fils. »
« Élodie, oui, cest mon fils. Mais on ne traite pas sa propre fille comme ça. Des femmes, il en trouvera dautres. Mais un enfant Même séparés, on aide. Il savait ce quon a vécu. Non, je ne lui pardonnerai pas. »
Quatre ans passèrent.
« Élodie, combien de temps tu vas me cacher ton homme ? »
Élodie rougit. Elle ne savait pas que Colette avait tout deviné.
« Allez, présente-le-moi. »
« Vous nêtes pas contre ? »
« Tant quil est bon avec toi et Lili, ça me va. »
Colette assista au mariage dÉlodie et Mathis. Elle lappréciait. Un homme responsable, qui aimait Élodie et adorait Lili.
« Ne crois pas que je vais arrêter de moccuper de Lili. » dit-elle le jour du mariage.
« Colette Vous savez à quel point elle vous aime. »
Quand Élodie et Mathis eurent un petit garçon, Colette déclara quil était aussi son petit-fils. Personne nobjecta. Pour Élodie, elle était devenue sa vraie mère.
Théo épousa Angélique. Ils partirent loin. Colette eut de leurs nouvelles par des cousins. Il allait bien. Elle gardait un œil sur lui, malgré tout.
Mais aujourdhui, elle était heureuse. Elle avait une fille, Élodie, et deux petits-enfants. Pour linstant. Elle espérait en avoir plus. Elle avait encore tant damour à donner.
Voilà, cest toute lhistoire. Quen pensez-vous ?







