Le Destin n’a pas permis la tromperie

Ah, écoute bien cette histoire, mon ami. Le destin, tu sais, cest une drôle de chose. Parfois, il te plonge dans des abîmes où tu suffoques, et dautres fois, il toffre des joies si grandes que tu en perds le souffle.

Élodie, jeune et encore naïve, navait pas beaucoup dexpérience de la vie, mais son destin était déjà tracé. Ce jour-là, glacé, elle se tenait devant la tombe de sa grand-mère, presque entièrement recouverte de terre froide. Son cœur était vide, ne laissant place quà une douleur sourde après la perte de la seule personne qui comptait pour elle. Depuis ses dix ans, Élodie avait été élevée par sa grand-mère, Marguerite, ses parents ayant tragiquement disparu.

La neige tombait doucement, mais elle ne la voyait même pas. Les quelques connaissances présentes commençaient à quitter le cimetière. Seuls quelques proches restaient quand son cousin, Théo, sapprocha delle. Ils ne se parlaient jamais, et Théo nétait jamais venu rendre visite à Marguerite, car sa mère, la fille aînée de la famille, était brouillée avec elle.

Théo se pencha et murmura dun ton sec :
« Tu ne vivras plus dans la maison de grand-mère. Dégage aujourdhui même. Je suis son petit-fils autant que toi. Et je te conseille de ne pas me contredire »

Il navait même pas demandé son avis à Élodie. Il avait décidé, point final. Elle navait pas la force de se battre. Ces derniers mois, Marguerite avait été alitée, et Élodie sétait occupée delle jusquau bout. Discuter avec Théo ? Inutile. Il la jetterait dehors de toute façon. Et puis, la perte de sa grand-mère occupait déjà toute sa pensée.

La veillée funèbre eut lieu dans un petit restaurant. Théo ne vint même pas. Peu de monde était présent. Quand Élodie rentra chez elle, des valises lattendaient devant la porte. Théo lui lança :
« Vérifie tes affaires, je nai pas tout pris. Maintenant, casse-toi. »

Élodie sortit, deux valises à la main, sans savoir où aller. Mais alors, leur voisine, Agnès, entrouvrit sa porte et lappela :
« Élodie, viens chez moi. »
Une fois à lintérieur, Élodie laissa tomber ses sacs près de la porte et seffondra sur une chaise en sanglotant. La douleur, la colère, tout sortit dun coup. Agnès lui apporta un verre deau.
« Reste ici le temps de voir. Repose-toi, la nuit porte conseil. »

Deux jours plus tard, Élodie retourna travailler à lhôpital comme infirmière. Elle était douce et attentionnée, ses yeux rayonnants habituellement de joie, mais aujourdhui, ils étaient voilés de tristesse. Tout le personnel, même les patients, savait quelle venait de perdre sa grand-mère. On laimait bien dans ce service.

« Élodie, dès que je vous vois, mes douleurs senvolent », plaisantait un patient âgé, Monsieur Lefèvre. « Vous avez une main magique. Ah, si javais encore vingt ans »

Elle souriait à ces mots, aimant son métier et les gens. Linfirmière en chef, Geneviève, lui proposa de loger dans sa maison de campagne. Un peu loin, mais accessible en bus.
« On ny va quen été, dici là, tu auras trouvé une solution. Tu peux chauffer, cest habitable en hiver. »

Élodie allait accepter quand un jeune médecin, Julien, sapprocha. Beau gosse, trentenaire, il venait darriver dans lhôpital. Confiant, il lui fit une proposition inattendue :
« Élodie, jai entendu parler de ta situation. Moi aussi, jai été élevé par ma grand-mère. Dès que je tai vue, tes yeux mont frappé comme une lumière dans cet hôpital. » Elle rougit. « Et puis tu me plais. Je te propose de vivre chez moi. »

Élodie, perturbée, balbutia :
« Mais et le Dr Lambert ? Tout le monde dit que vous sortez ensemble Vous nêtes pas libre et vous me proposez ça ? »

Julien éclata de rire.
« Ces rumeurs ménervent. Non, Élodie, avec Camille, on est juste amis. Arrête de me vouvoyer, je ne suis pas un vieux ! »

Camille Lambert, anesthésiste, était une femme brillante et séduisante. Tout le monde parlait de leur prétendue relation. Élodie lappréciait, mais quelque chose dans son regard la mettait mal à laise.

Elle narrivait pas à croire que Julien, si beau, sintéressait à elle.
« Je ne peux pas accepter comme ça Quen dirait-on ? Vivre sous le même toit quun homme seul »

« Je comprends. Mais rassure-toi, jai un grand appartement, tu auras ta chambre. Je te promets de ne pas te harceler. Je veux que tu voies que mes sentiments sont sincères. Et puis, je ne vis pas seul. Ma grand-mère, Colette, habite avec moi. Une femme adorable. Elle me répète sans cesse de lui ramener une petite amie. »

Élodie finit par céder, à une condition :
« Disons plutôt que tu mengages pour moccuper delle. »

Julien sourit.
« Élodie, tu es un ange. Daccord, si tu veux. »

Elle était soulagée. Enfin un toit décent, et Julien, si charmant, près delle. Sil disait vrai, alors elle était née sous une bonne étoile.

Elle emménagea chez lui. Les collègues crurent quil lavait embauchée comme aide à domicile. Colette se révéla aussi douce que prévu. Apprenant son histoire, elle en eut les larmes aux yeux.
« Ma chérie, je suis si heureuse que Julien tait trouvée. La vie finira par sarranger. Je suis contente quil se décide enfin Il était temps quil sattache. »

Les semaines passèrent. Élodie sattachait à Colette. Julien, elle le croisait peu, leurs horaires ne coïncidaient pas. Mais il lui souriait, lembrassait sur la joue, répétant combien il était heureux quelle soit là. Un jour, Colette lui demanda, curieuse :
« Ma chérie, excuse une vieille femme indiscrète Pourquoi dors-tu dans une autre chambre ? Les jeunes daujourdhui sinstallent ensemble tout de suite. Julien ma dit que tu étais sa fiancée. »

Élodie rougit.
« Il me plaît mais je ne veux pas me précipiter. »

Elle était heureuse. Après le travail, Colette laccueillait comme une petite-fille. Elles bavardaient comme autrefois avec Marguerite.
« Je suis si fière que Julien tait choisie, toi. Douce, attentionnée exactement ce quil lui faut. »

Un soir, Julien linvita à se promener.
« Écoute Mémé est très malade. Un cancer. Elle doit prendre des médicaments, mais elle ne le sait pas. Je ne veux pas linquiéter. Mais parfois, elle oublie Peux-tu ten occuper ? Sinon je ne veux pas imaginer. »

Élodie accepta, troublée. Il lembrassa soudain, passionnément, mais elle se dégagea, gênée.

Plus tard, chez elle, elle réfléchit. Pourquoi Colette navait jamais mentionné sa maladie ? Pourtant, elle semblait en pleine forme

Le lendemain, Julien était là. Après le dîner, chacun regagna sa chambre. Élodie, intriguée, voulut en savoir

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