« Je népouserais jamais un homme comme ça ! » déclara soudain une petite fille à la mariée devant le bar.
Sa voix claire et assurée, bien trop mature pour son âge, résonna dans le silence.
Élodie sursauta et se retourna brusquement. Devant elle se tenait une fillette denviron six ans, une longue tresse blonde, une veste usée et un regard étrangement lucide.
La mariée, dans sa robe immaculée bruissant à chaque pas, se figea à lentrée du restaurant. À lintérieur, les invités, la musique, le gâteau à trois étages et le futur époux, Théo, lattendaient. Mais les mots de lenfant résonnèrent comme un coup de tonnerre.
« Pardon quas-tu dit ? » demanda Élodie, tentant de sourire, bien quune alarme intérieure se déclenchât.
La petite haussa les épaules.
« Il est méchant. Je lai vu hier. Il a poussé ma maman. »
Le cœur dÉlodie semballa. Elle saccroupit pour être à sa hauteur.
« Comment sappelle-t-il ? »
« Théo. Il est venu chez nous hier. Il a crié. Maman a pleuré après. » La fillette essuya son nez avec sa manche. « Je croyais que cétait juste une connaissance puis jai vu quil était ton fiancé. »
Élodie entra dans le restaurant comme dans un brouillard épais. Les lustres, les sourires, les flashes des appareils photo lui semblaient lointains, irréels.
Théo sapprocha, un sourire éclatant aux lèvres.
« Tout va bien, mon amour ? »
« Dis-moi » Sa voix trembla. « Étais-tu avec une femme et un enfant hier ? »
Théo se figea. Une lueur fugace traversa son regardpeur, culpabilité ?avant quil ne fronce les sourcils.
« Quelle absurdité ! Bien sûr que non ! Est-ce une blague ? Tu perds la tête un jour pareil ? »
« La fillette avait une tresse. Elle a dit que tu avais poussé sa mère. Que tu étais passé hier. »
« Les enfants inventent nimporte quoi ! » gronda-t-il. « Tu nas pas cru cette gamine, si ? »
Élodie le regarda et vit, pour la première fois, non pas son fiancé, mais un inconnu. Fort, sûr de lui, en costume coûteux avec du froid dans les yeux.
« Je reviens », murmura-t-elle avant dôter son voile et de sortir.
La fillette lattendait au même endroit.
« Peux-tu me montrer où tu habites ? »
Elle hocha la tête en silence.
Ce nétait quà quelques pâtés de maisons. La petite courut devant ; Élodie suivit, relevant le bas de sa robe. Elles tournèrent dans une courvieille, avec un toboggan rouillé et des fenêtres cassées au troisième étage.
« Cest ici. Maman est là. »
Élodie gravit les escaliers grinçants derrière elle. La fillette ouvrit la porte avec une clé.
La pièce était froide. Une jeune femme était assise par terre près du radiateur, serrant un cahier contre elle. Elle leva les yeux.
« Je ne sais pas qui vous êtes », chuchota-t-elle.
« Je suis Élodie. Aujourdhui, jétais censée épouser Théo. »
La femme pâlit et attira sa fille contre elle.
« Il na pas dit quil se mariait. »
« Il ta poussée hier ? »
« Oui. Quand jai dit que je ne voulais plus. Nous étions ensemble depuis deux ans. Il promettait de divorcer et de refaire sa vie. Puis tout a changé. Il sest mis à crier, ma interdite de travailler. Hier, il est arrivé ivre. Il voulait emmener Amélie. Il a dit : «Tu nes rien. Mais elle est à moi. Je peux en faire ce que je veux.» »
Élodie sassit au bord du tapis. Sa gorge se serra. Elle aurait voulu pleurer, mais ne sentait en elle quun vide immense.
« Pourquoi nes-tu pas allée à la police ? »
« Qui maurait entendue ? Je nai ni travail, ni soutien. Lui est riche, influent. »
La fillette se blottit contre sa mère.
« Maman, elle est gentille »
Ce soir-là, Élodie ne rentra pas à lhôtel du mariage, mais chez elle. Le silence la







