Regarder dans le Vide

**Regardant dans le vide**

Thomas et Élodie se marièrent à dix-neuf ans. Ils ne pouvaient vivre lun sans lautre, cétait une passion folle. Leurs parents, craignant les débordements, sempressèrent de légitimer cette union.

La noce fut somptueuse, inoubliable, avec tous les attributs dune vraie fête française : la poupée sur le capot de la voiture, des fleurs à profusion, un feu dartifice, une salle de banquet, et les cris de « À la santé des mariés ! » Les parents dÉlodie ne contribuèrent pas financièrement, leurs maigres revenus suffisant à peine à nourrir leur penchant pour la bouteille. Cest la mère de Thomas, Marie-Claire, qui prit tout en charge.

Marie-Claire avait tenté de dissuader son fils de fréquenter une fille issue dune famille aussi peu recommandable. « Les fruits ne tombent jamais loin de larbre, mon garçon, lui avait-elle dit. Lamour ne fait pas toujours des miracles. » Mais Thomas, sûr de lui, affirmait que leur amour pur surpasseraient tous les défauts.

Les jeunes mariés, éblouis, croyaient tenir le bonheur entre leurs mains. Marie-Claire et son mari leur offrirent un appartement à Lyon. « Soyez heureux, mes enfants ! »

Les premières années furent douces. Élodie donna naissance à deux filles, Amélie et Justine. Thomas en était fou, fier de sa petite famille.

Pourtant, cinq ans plus tard, Élodie commença à disparaître sans explication, revenant parfois avec une haleine chargée de vin. Quand Thomas la confronta, elle finit par avouer, brutale : « Je ne tai jamais aimé. Cétait une passion de jeunesse. » Elle annonça son départ pour un autre homme, marié et père de trois filles.

Thomas, abasourdi, sombra dans le désespoir. Élodie senfuit avec son amant dans un village perdu de Provence, abandonnant ses enfants. Marie-Claire, femme énergique et débrouillarde, les recueillit sans hésiter.

Thomas, désemparé, se laissa entraîner dans une secte religieuse. On le maria de force à une veuve, Claudine, mère de deux garçons. Submergé par les exigences de sa nouvelle épouse, il neut plus le temps de soccuper de ses filles. « Elles ont une mère, que celle-ci sen occupe ! » répétait Claudine.

Sept ans plus tard, Élodie réapparut, la mine fatiguée, tenant une fillette de quatre ans, Mathilde. « La vie ta malmenée, on dirait », lança Marie-Claire, sarcastique. Élodie avoua avoir fui un mari violent et alcoolique. « Pouvons-nous rester ici ? »

Malgré ses reproches, Marie-Claire les accueillit. Mais un mois plus tard, Élodie disparut à nouveau, retournant vers son bourreau. Mathilde resta avec ses grands-parents.

Les années passèrent. Marie-Claire et son mari séteignirent lun après lautre. Amélie se maria, sans enfant. Justine vieillit seule. Mathilde, à dix-sept ans, eut un bébé dont on ignorait le père et partit rejoindre sa mère au village.

Élodie, vieillie et méprisée, vivait désormais seule, son compagnon ayant été repris par ses filles. Les villageois la méprisaient, la traitant divrogne sans vergogne.

Thomas, enfin libéré de la secte, errait dans lappartement familial, survivant à peine, entouré de trois chats pour tromper sa solitude.

Le bonheur était passé près deux, autrefois. Ils ne lavaient pas entendu frapper.

**Leçon : Lamour, sans sagesse, nest quun feu de paille.**

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