Il y a longtemps, je me remémore ce soir dautomne où, à mon grand étonnement, les robes de femmes jonchaient le parquet.
Claudette Moreau et moi, Henri Dubois, partagions depuis plus de trois ans une union douce et pleine de confiance. Nos parents sétaient déjà présentés lun à lautre, et nous rêvions dun mariage prochain, peutêtre sous les cloches de NotreDame. Tout allait pour le mieux, et je pensais sincèrement fonder une famille avec lui, vieillir côte à côte.
Le jour où il revint dun voyage daffaires à Lyon, nous navions aucun rendezvous prévu. Jai décidé de le surprendre : je pris un jour de congé, préparai un gâteau aux pommes, et me rendis à son appartement du Marais. Heureusement, javais gardé ma copie de la clé que je lui avais donnée. Ainsi, pendant quil dormait, je pus même préparer un café pour accompagner la pâtisserie.
Je poussai doucement la porte de la chambre, mais je faillis trébucher sur plusieurs objets étalés au sol. La pièce était sombre, alors jallumai la lampe de mon téléphone pour éclairer le désordre. Sur le parquet reposait une pile de vêtements féminins. En mavançant davantage, je découvris Henri enlacé à une autre femme, Sophie Laurent, endormie contre lui.
Ils étaient lovés lun contre lautre, alors je ne fis aucun vacarme, refermai la porte avec discrétion, laissai le gâteau et mes clés, et sortis. Le vent était frais dehors; ne voulant pas retourner chez mes parents, je massis sur un banc du parc des ButtesChaumont et pleurais. Au bout dun moment, un homme sassit à côté de moi et me demanda ce qui nallait pas. Je ne lui racontai pas la trahison, mais la conversation glissa naturellement vers un thé chez lui, où, autour dune tasse dinfusion à la menthe, nous partagions nos souvenirs.
Aujourdhui, nous vivons sous le même toit et envisageons à nouveau le mariage. Je crois que le destin, tel un vieux poète, voulait que nos chemins se croisent ainsi, car rien narrive réellement sans raison.
