Il y a bien des années, mon fils et sa femme se sont installés chez moi, et bien vite, ils ont commencé à trouver à redire à mes habitudes.
Ma maison mes lois !
Javais accepté dhéberger mon fils et ma belle-fille, mais leur patience sest vite émoussée, maccusant de leur imposer des consignes. Navrée, mais sous mon toit, on respecte mes règles. Si cela ne leur convenait pas, rien ne les obligeait à rester.
Mon fils sétait marié il y avait deux ans. Je trouvais cela bien précipité de passer devant Monsieur le Maire à vingt ans, mais, comme souvent, on nécoute pas les conseils des aînés. Mon fils voulant fonder un foyer, il la fait à sa manière. Avant même leur mariage, je lui avais cédé lappartement de ma propre mère. Certes, ce nétait pas un grand standing, mais il avait au moins un début.
Pendant une année, les jeunes mariés vécurent dans ce logement, puis, désireux de mieux, ils décidèrent dacquérir un appartement neuf auprès dun promoteur. Mon fils vendit la première petite habitation, et les parents de ma belle-fille apportèrent aussi leur aide financière. Ma belle-mère tenta de me faire pression, avançant quil fallait soutenir les enfants, mais javais déjà donné : lappartement. Jaurais tout aussi bien pu le garder pour moi et le louer.
Je nai jamais cru en la copropriété, cela me donne toujours limpression darnaque. Je ne comprends pas comment on peut mettre tant dargent dans un logement encore sur plan. Mais chacun fait comme il veut ils ont payé, ils ont emménagé. Aucun souci jusque-là.
Puis, soudain, ma belle-fille perdit son emploi et leurs finances en prirent un coup. Ils me demandèrent alors sils pouvaient venir sinstaller dans mon appartement à Lyon. Je pressentais déjà que la cohabitation napporterait rien de bon. Je ne suis pas facile à vivre, je le reconnais ; mon fils le sait mieux que quiconque. Mais cest lui qui, au final, ma sollicitée. Je ne compris pas pourquoi ma belle-fille refusait daller chez sa propre mère, qui vit du côté de Bordeaux, mais ce nétait pas mon affaire.
Dès leur arrivée, jai posé les choses clairement : dans ma maison, lon se conforme à certaines habitudes. Ainsi, jéteins tout à vingt-deux heures, car jai le sommeil léger et une fois réveillée, je ne me rendors plus. La journée, la radio doit rester allumée, de France Inter à Radio Classique en fond, cela mapaise. Les jeunes ont acquiescé et la cohabitation a débuté.
Le premier mois sest plutôt bien passé. Lorsque quelque chose ne me plaisait pas, je le disais tranquillement et ils sadaptaient, tout restait paisible. Mais dès le second mois, ils commencèrent à rentrer la griffe. Ma belle-fille se mit à ronchonner, mon fils à me répondre sèchement.
Maman, ne ténerve pas Ce serait si grave de couper la radio une journée ? Tu ne lécoutes même pas vraiment, elle est juste là. Moi, après le boulot, jai déjà mal à la tête.
Pourquoi essuyer la vaisselle ? Elle finit bien par sécher toute seule. Cest une perte de temps, à mon avis.
Maman, il faut vraiment commencer à astiquer dès le samedi matin ? On dort encore, voyons ! Il nest que dix heures, mais tu trottes déjà partout, chiffon à la main !
Et ces discussions devenaient de plus en plus fréquentes. La moutarde me monta rapidement au nez, je leur dis de préparer leurs valises.
Tu songes vraiment à nous mettre dehors pour avoir transgressé tes règles futiles ? lança mon fils, froid.
Ces règles nont rien de puéril, elles régissent ma maison, et comme hôtes, vous vous devez de les respecter. Pourquoi devrais-je me rendre la vie difficile chez moi ?
Tu pourrais faire un effort, tu sais. Si on est venus ici, ce nest pas de gaieté de cœur. On traverse une période compliquée.
Quand on est dans la difficulté, on se réjouit du soutien reçu, on ne réclame pas davantage de droits. Depuis le début je vous ai annoncé la couleur : chez moi, cest moi qui décide.
Tu nous as tout fait pour quon parte. Daccord, je comprends, merci, maman, tu as fait ce que tu pouvais. Ne tinquiète pas, je ne te demanderai plus rien, dit mon fils, vexé, tout en commençant à ranger ses affaires. Ma belle-fille limita.
Ils sont partis. Je nai aucun regret. Ils mavaient sollicitée, je nai rien exigé dextraordinaire, juste le respect de mon mode de vie. Peut-être sy sentaient-ils mal, mais jaurais été très malheureuse si javais dû plier mes habitudes pour eux. Chez moi, jai droit à la tranquillité, et quand ils auront leur propre appartement, ils y dicteront leurs propres règles.
