Trahison en famille Serge a tout donné à sa sœur. Littérairement – tout. Lorsque leurs parents sont décédés l’un après l’autre, il restait un grand appartement de trois pièces au cœur de Paris. Serge vivait alors depuis douze ans en Allemagne, avec un emploi, une épouse allemande, deux enfants et la nationalité. Venir souvent était impossible. Sa sœur Nathalie, son mari et leur fils s’entassaient dans un studio en banlieue. « Nath, vends l’appartement des parents, prends l’argent, vis bien. Moi, je suis installé ici, je n’ai besoin de rien », lui dit-il sur Skype. Elle pleurait au téléphone, le remerciait, promettait de prier pour lui chaque jour. L’appartement fut vendu pour 1,2 million d’euros. Une somme énorme à l’époque. Serge signa la renonciation chez le notaire à distance – sans questions, sans rien garder pour lui. Un an plus tard, Nathalie acheta un trois-pièces dans un immeuble neuf, un autre « pour le fils plus tard », une maison de campagne en Île-de-France et une Mercedes. Elle écrivit à Serge : « Merci, frérot ! Tu nous as sauvés. » Il était heureux pour eux. Vraiment heureux. Cinq ans passèrent. Serge eut des problèmes. Son entreprise supprima son service, sa femme demanda le divorce, emmena les enfants et la moitié des biens. Il se retrouva presque sans rien. Il dut rentrer en France – à 52 ans, sans diplôme local, il n’y avait plus de travail en Allemagne. Il écrivit à sa sœur : « Nath, j’arrive. Je peux rester chez toi quelques mois, le temps de me remettre ? Louer coûte cher, j’ai presque plus d’argent. » La réponse arriva trois jours plus tard : « Oh, Serge, désolée… On a commencé des travaux, il y a des ouvriers partout… Et le fils vit avec sa copine, il n’y a pas de place… Peut-être un hôtel pas cher ? Je peux t’aider un peu. » Il relut le message dix fois. Puis l’appela en vidéo. Elle répondit depuis la cuisine de son nouvel appartement – celui « pour le fils ». On voyait derrière elle des appareils haut de gamme, des travaux tout frais. « Nath, tu es sérieuse ? Je t’ai offert 1,2 million et tu veux juste m’aider pour un hôtel ? » Elle soupira, leva les yeux au ciel. « Serge, c’était il y a cinq ans ! On a déjà tout dépensé. Et puis – tu as renoncé, tu as signé. On ne te doit rien. À l’époque tu étais riche, en Europe. Maintenant tu reviens sans rien et tu réclames ? » Il coupa l’appel. Juste appuyé sur « terminer » et resta là, à fixer le mur. Un mois plus tard, il arriva. Loua une chambre en colocation pour 800 euros – ses derniers sous. Il travailla comme vigile dans un supermarché. La nuit, il faisait des petits boulots de manutention. Il ne parla plus à sa sœur. Ni pour les fêtes. Ni pour le Nouvel An. Ni quand elle devint grand-mère. Elle écrivit plusieurs fois : « Serge, tu fais l’enfant, tu boudes ? On est de la même famille… » Il ne répondit pas. Un jour, elle croisa par hasard une connaissance de Serge et demanda des nouvelles. « Ça va, – répondit-elle. – Il dit qu’il n’a plus qu’une famille : ses enfants en Allemagne. Ici, il n’a plus personne. Et il n’en aura plus. » Nathalie ressentit alors, pour la première fois, quelque chose comme de la honte. Mais elle se convainquit vite : « C’est sa faute. Il a renoncé. Il est parti. » Serge, parfois, s’asseyait le soir sur le banc devant son immeuble, regardait les étoiles et pensait : Le plus précieux qu’on puisse faire, c’est tout donner à sa famille. Le plus terrible, c’est de comprendre qu’après ça, pour eux, tu n’existes plus. Il ne demanda plus jamais d’aide. À personne. Surtout pas à sa « famille ».

La trahison familiale

Paul avait tout donné à sa sœur.
Absolument tout.

Lorsque leurs parents disparurent lun après lautre, il ne resta quun grand appartement de trois pièces au cœur de Paris. À cette époque, Paul vivait déjà depuis douze ans en Allemagne, avec un emploi stable, une épouse allemande, deux enfants et la nationalité. Il ne pouvait revenir souvent.

Sa sœur, Éloïse, vivait avec son mari et leur fils dans un petit studio en banlieue.

« Éloïse, vends lappartement de nos parents, garde largent, vis mieux. Moi, je suis installé ici, je nai besoin de rien », lui dit-il un soir sur Skype.

Elle pleura, le remercia, promit de prier pour lui chaque jour.

Lappartement fut vendu pour 350 000 euros. Une somme considérable à lépoque.
Paul signa la renonciation chez le notaire à distance sans discuter, sans rien garder.

Un an plus tard, Éloïse acheta un grand appartement dans un immeuble neuf, un autre « pour le futur de son fils », une maison de campagne près de Fontainebleau et une Peugeot.
Elle écrivit à Paul : « Merci, mon frère ! Tu nous as sauvés. »

Il était sincèrement heureux pour eux.

Cinq ans passèrent.

Paul connut des revers. Son entreprise supprima son service, sa femme demanda le divorce, emmena les enfants et la moitié des biens. Il se retrouva presque sans rien. Il dut rentrer en France à cinquante-deux ans, sans diplôme local, il ny avait plus de travail pour lui en Allemagne.

Il écrivit à sa sœur :
« Éloïse, jarrive. Je peux rester chez toi quelques mois, le temps de me remettre ? Louer coûte cher, je nai presque plus dargent. »

La réponse arriva trois jours plus tard :

« Oh, Paul, désolée On a commencé des travaux, il y a des ouvriers partout Et mon fils vit ici avec sa copine, il ny a pas de place Peut-être un hôtel pas cher ? Je peux taider un peu. »

Il relut le message une dizaine de fois. Puis il lappela en vidéo.

Elle répondit depuis la cuisine de son nouvel appartement celui « pour le fils ». On voyait derrière elle des appareils coûteux, des murs fraîchement repeints.

« Éloïse, tu es sérieuse ? Je tai offert 350 000 euros, et tu veux juste maider pour un hôtel ? »

Elle soupira, leva les yeux au ciel.

« Paul, cétait il y a cinq ans ! Largent est parti. Et puis, tu as signé, tu as choisi. On ne te doit rien. Tu étais riche, installé en Europe. Maintenant tu reviens sans rien et tu réclames ? »

Il coupa lappel. Juste un clic sur « terminer », puis il resta là, à fixer le mur.

Un mois plus tard, il arriva. Loua une chambre en colocation pour 800 euros ses derniers sous. Il trouva un poste de vigile dans un supermarché. La nuit, il faisait des petits boulots de manutention.

Il ne parla plus à sa sœur.
Ni pour les fêtes.
Ni pour le Nouvel An.
Ni quand elle devint grand-mère.

Elle lui écrivit plusieurs fois : « Paul, tu fais lenfant, tu boudes ? On est de la même famille »

Il ne répondit jamais.

Un jour, elle croisa par hasard une amie de Paul et demanda des nouvelles.

« Il va bien, répondit-elle. Il dit quil na plus quune famille : ses enfants en Allemagne. Ici, il na plus personne. Et il nen aura jamais. »

Ce fut la première fois quÉloïse ressentit une pointe de honte. Mais elle se rassura vite : « Il la voulu. Il a choisi. Il est parti. »

Et Paul, parfois, sasseyait le soir sur le banc devant son immeuble, regardait les étoiles et pensait :

Le plus grand don quon puisse faire à ses proches, cest tout leur offrir.
Le pire, cest de découvrir quaprès cela, on nexiste plus pour eux.

Jamais plus il ne demanda daide.
À personne.
Surtout pas à sa « famille ».

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Trahison en famille Serge a tout donné à sa sœur. Littérairement – tout. Lorsque leurs parents sont décédés l’un après l’autre, il restait un grand appartement de trois pièces au cœur de Paris. Serge vivait alors depuis douze ans en Allemagne, avec un emploi, une épouse allemande, deux enfants et la nationalité. Venir souvent était impossible. Sa sœur Nathalie, son mari et leur fils s’entassaient dans un studio en banlieue. « Nath, vends l’appartement des parents, prends l’argent, vis bien. Moi, je suis installé ici, je n’ai besoin de rien », lui dit-il sur Skype. Elle pleurait au téléphone, le remerciait, promettait de prier pour lui chaque jour. L’appartement fut vendu pour 1,2 million d’euros. Une somme énorme à l’époque. Serge signa la renonciation chez le notaire à distance – sans questions, sans rien garder pour lui. Un an plus tard, Nathalie acheta un trois-pièces dans un immeuble neuf, un autre « pour le fils plus tard », une maison de campagne en Île-de-France et une Mercedes. Elle écrivit à Serge : « Merci, frérot ! Tu nous as sauvés. » Il était heureux pour eux. Vraiment heureux. Cinq ans passèrent. Serge eut des problèmes. Son entreprise supprima son service, sa femme demanda le divorce, emmena les enfants et la moitié des biens. Il se retrouva presque sans rien. Il dut rentrer en France – à 52 ans, sans diplôme local, il n’y avait plus de travail en Allemagne. Il écrivit à sa sœur : « Nath, j’arrive. Je peux rester chez toi quelques mois, le temps de me remettre ? Louer coûte cher, j’ai presque plus d’argent. » La réponse arriva trois jours plus tard : « Oh, Serge, désolée… On a commencé des travaux, il y a des ouvriers partout… Et le fils vit avec sa copine, il n’y a pas de place… Peut-être un hôtel pas cher ? Je peux t’aider un peu. » Il relut le message dix fois. Puis l’appela en vidéo. Elle répondit depuis la cuisine de son nouvel appartement – celui « pour le fils ». On voyait derrière elle des appareils haut de gamme, des travaux tout frais. « Nath, tu es sérieuse ? Je t’ai offert 1,2 million et tu veux juste m’aider pour un hôtel ? » Elle soupira, leva les yeux au ciel. « Serge, c’était il y a cinq ans ! On a déjà tout dépensé. Et puis – tu as renoncé, tu as signé. On ne te doit rien. À l’époque tu étais riche, en Europe. Maintenant tu reviens sans rien et tu réclames ? » Il coupa l’appel. Juste appuyé sur « terminer » et resta là, à fixer le mur. Un mois plus tard, il arriva. Loua une chambre en colocation pour 800 euros – ses derniers sous. Il travailla comme vigile dans un supermarché. La nuit, il faisait des petits boulots de manutention. Il ne parla plus à sa sœur. Ni pour les fêtes. Ni pour le Nouvel An. Ni quand elle devint grand-mère. Elle écrivit plusieurs fois : « Serge, tu fais l’enfant, tu boudes ? On est de la même famille… » Il ne répondit pas. Un jour, elle croisa par hasard une connaissance de Serge et demanda des nouvelles. « Ça va, – répondit-elle. – Il dit qu’il n’a plus qu’une famille : ses enfants en Allemagne. Ici, il n’a plus personne. Et il n’en aura plus. » Nathalie ressentit alors, pour la première fois, quelque chose comme de la honte. Mais elle se convainquit vite : « C’est sa faute. Il a renoncé. Il est parti. » Serge, parfois, s’asseyait le soir sur le banc devant son immeuble, regardait les étoiles et pensait : Le plus précieux qu’on puisse faire, c’est tout donner à sa famille. Le plus terrible, c’est de comprendre qu’après ça, pour eux, tu n’existes plus. Il ne demanda plus jamais d’aide. À personne. Surtout pas à sa « famille ».
«Я позвоню», – пробормотал он, отступая к дверям.