La Faiseuse de Destins – Entre, ma chérie. Oui, je vais tout te dire, tout te révéler. Donne-moi ta main. Mamie Maroussia ne ment jamais, elle dit la vérité. Comment t’appelles-tu ? Tatiana ? Tania, alors ? Très bien ! Quelle petite main, presque enfantine. Toute douce… Et ces lignes, on dirait un livre. Si tu veux demander quelque chose, n’hésite pas, parle. Sinon Mamie Maroussia va lire ta paume, et tu n’entendras pas ce qu’il faut. Tout te dire ? D’accord ! Ton amour sera pur, lumineux. Tu te marieras. Ton mari sera un homme bien, sérieux. Il te traitera avec bonté. Tu vois ? Cette ligne-là, c’est l’amour… Vous aurez un fils, merveilleux. Il finira brillamment l’école, puis l’université. Oui, tout est écrit sur ta paume. Ensuite, il travaillera au ministère ou à l’étranger. Il gagnera beaucoup d’argent. Il vous aidera, toi et ton mari. Tu auras aussi une fille, adorable. Sa vie sera facile. Elle aura une famille. Elle te donnera des petits-enfants. Avec les enfants, tout ira bien… Le travail… Ma petite, je vois une évolution pour toi. Tu dis qu’il n’y a pas de place pour avancer ? Il y en a toujours. Tu dis ça maintenant, mais tu te souviendras de Mamie Maroussia, tu iras à l’église et tu allumeras une bougie pour ma santé… Tu auras beaucoup d’argent. Regarde, tu vois ? Tu ne comprends pas ? Il n’y a rien à comprendre… Ta santé – tu sais, ce n’est pas la meilleure. Mais qui va bien aujourd’hui ? Tu verras un médecin, il te dira mieux que moi comment te soigner. C’est un spécialiste, oui. Tu le rencontreras bientôt… Non, pas à cause d’une maladie, juste dans une bonne compagnie. Il te dira. Tu vivras longtemps, plus que moi. Et Mamie Maroussia est déjà âgée. Combien ? Presque quatre-vingts… Oui, on ne dirait pas. J’ai connu la guerre, la faim. Mais ce n’est pas de moi qu’il s’agit ! Regarde, ce sont tes intérêts. Tu vas bientôt découvrir quelque chose de nouveau, peut-être en science, ou ailleurs. Cela t’apportera gloire et chance. Les gens viendront te demander de l’aide. Tout est là, sur ta paume. Toute douce… Non, Tania, je ne peux pas dire grand-chose sur tes parents. Seulement… Ta mère t’écrira, elle te demandera pardon. Respecte-la, elle est âgée. Elle ne voulait pas t’abandonner, c’est le destin. Et ton père… Je ne le vois plus. Mais ta grand-mère est encore vivante ? Je te le dis, elle est vivante ! Qu’elle ait la santé ! Elle dansera à ton mariage ! Elle ne marche plus ? Comment ça ? Je la vois danser ! Peut-être que le médecin pourra l’aider ? Celui que tu vas rencontrer ! Tu as appris tout ce que tu voulais ? Bon, Tania. Je ne vais pas te raccompagner, j’ai mal aux jambes… Où mettre le petit cadeau ? Sur la table, sous la nappe. Merci, ma fille, va, tout ira bien pour toi ! Raconte à tes amies ce que Mamie Maroussia t’a dit, à ta grand-mère aussi. Peut-être que d’autres viendront me voir… *** – Qu’est-ce que tu regardes, sale tête moustachue ? Tu fais les gros yeux… Tu n’aimes pas que je dise la vérité ? Mais la petite viande et la crème, tu aimes ? Tu fais la fine bouche devant le « Whiskas », il te faut du poisson cher, tu ne veux pas de merlan ! Et d’où Mamie Maroussia aurait-elle autant d’argent ? Voilà ! Tout le monde veut payer pour du beau, pas pour la vérité ! Qu’aurais-je dû lui dire ? Que son fiancé est un porc comme on n’en a jamais vu ? Qu’ils se feront attaquer par des voyous dans une ruelle et que le fiancé s’enfuira ? Lui, ça ne lui fera rien ! Qu’un mois plus tard, il se fiancera avec sa copine parce que son père est un homme d’affaires ? Que Tania tombera enceinte après cette agression, et que la grand-mère de la petite mourra un mois plus tard ? C’est ça que j’aurais dû dire ? Que le fils que Tania aura deviendra comme son père, traînera dans les rues, deviendra toxicomane à quatorze ans, battra sa mère, lui fera du mal ? Qu’elle finira en psychiatrie, perdra son travail. Qu’ils vivront dans la misère jusqu’à ce qu’elle devienne femme de ménage. Qu’à quarante-cinq ans, on lui trouvera un cancer ? C’est ça que je devrais dire ? Et qu’elle ne survivra pas à l’opération ? C’est ça que je devrais lui raconter ? Et après ça, elle me donnerait un cadeau ? Et puis, moi, je pense, moustachu, – son vrai destin, seuls toi et moi le connaissons. Celui que j’ai inventé, maintenant je le sais, Tania aussi, ses amies, sa grand-mère. Ne plisse pas les yeux, je sais qu’elle racontera tout, il faut juste qu’elle rentre chez elle ! Tu vois combien ! Plus que nous deux ? Plus ! Tania m’a crue ? Elle m’a crue ! Alors, tout peut encore changer… *** Tania repartait de chez Mamie Maroussia, le sourire aux lèvres. Elle se sentait bien, légère. Même si son destin raconté ressemblait à un conte de fées, mais… Mais peut-être que ce sera ainsi ? On lui avait vanté cette voyante… Dans une ruelle sombre et déserte, la jeune fille entendit des pas et des rires derrière elle. Tania se mit à courir. Mais ils se rapprochaient… Et ils l’auraient rattrapée si, au tournant, elle n’était pas tombée sur un jeune homme avec un énorme chien. Le chien aboya, le maître sortit un gaz : – Reculez, sales types ! Sinon… Tania reprit son souffle, et son gentil protecteur sourit : – Je suis Vitali. Venez, Jack et moi allons vous raccompagner chez vous ? Et tout s’est arrangé. *** – Entre, ma belle ! Comment t’appelles-tu ? Olga ? Tania t’a conseillé de venir ? Je me souviens d’elle… Comment va-t-elle ? Elle s’est mariée ? Tant mieux ! Allez, donne ta main… Elle est douce, toute lisse…

Entre, ma chère. Oui, installe-toi, je vais tout te dire, tout te révéler. Donne-moi ta main, approche. Mamie Geneviève ne ment jamais, elle ne dit que la vérité. Comment tappelles-tu ? Camille ? Ah, Camille, quel joli prénom, bien français ! Ta paume est si petite, presque enfantine, toute douce Et ces lignes, on dirait un roman. Si tu veux demander quelque chose, nhésite pas, parle. Sinon, Mamie Geneviève va lire ta main et tu risques dentendre ce qui ne te concerne pas.

Tout te dire ? Daccord, écoute bien. Ton amour sera pur, lumineux. Tu te marieras. Ton époux sera un homme bien, sérieux, il te traitera avec bonté. Regarde, cette ligne ici, cest lamour Vous aurez un fils, exceptionnel. Il finira le lycée avec brio, puis luniversité. Cest écrit sur ta main. Ensuite, il travaillera au ministère ou partira à létranger. Il gagnera beaucoup deuros, il vous aidera, toi et ton mari.

Tu auras aussi une fille, adorable. Sa vie sera douce, elle fondera une famille, te donnera des petits-enfants. Tes enfants seront heureux, oui

Côté travail Je vois une belle évolution pour toi. Tu dis quil ny a pas de perspectives ? Il y en a toujours. Tu dis ça maintenant, mais tu te souviendras de Mamie Geneviève, tu iras à léglise allumer une bougie pour ma santé Tu auras beaucoup dargent, regarde, cest là. Tu ne comprends pas ? Il ny a rien à comprendre

Ta santé, tu sais bien, nest pas parfaite. Mais qui va bien aujourdhui ? Tu verras un médecin, il saura mieux que moi comment te soigner. Cest un vrai spécialiste. Tu le rencontreras bientôt Pas à cause dune maladie, juste dans une bonne compagnie. Il te dira tout. Tu vivras longtemps, plus que moi. Mamie Geneviève a déjà bien vécu, presque quatre-vingts ans On ne dirait pas, hein ? Jai connu la guerre, la faim Mais ce nest pas de moi quil sagit !

Regarde, ce sont tes passions. Tu vas bientôt découvrir quelque chose de nouveau, peut-être en sciences, ou ailleurs. Cela tapportera la renommée, la chance. Les gens viendront te demander conseil. Tout est là, sur ta paume, toute douce

Non, Camille, sur tes parents, je ne vois pas grand-chose. Seulement Ta mère técrira, elle te demandera pardon. Respecte-la, elle est âgée. Elle ne voulait pas tabandonner, cest le destin. Ton père Je ne le vois plus. Mais ta grand-mère est encore vivante, non ? Oui, elle est là ! Quelle ait la santé ! Elle dansera à ton mariage ! Elle ne marche plus ? Comment ça ? Je la vois danser ! Peut-être que le médecin pourra laider ?

Celui que tu vas rencontrer !

Tu as tout appris ? Bon, Camille. Je ne vais pas te raccompagner, mes jambes me font mal Où poser le petit cadeau ? Sur la table, sous la nappe. Merci, ma fille, va, tout ira bien pour toi ! Raconte à tes amies ce que Mamie Geneviève ta dit, à ta grand-mère aussi. Peut-être que dautres viendront me voir

***
Quest-ce que tu regardes, toi, avec ta tête moustachue ? Tu ouvres grand les yeux Tu naimes pas quand je mens ? Mais la terrine et la crème, ça te plaît, hein ? Tu fais la fine bouche devant les croquettes, tu veux du poisson cher, tu refuses le maquereau ! Et doù Mamie Geneviève aurait-elle autant dargent ? Voilà ! Tout le monde veut payer pour du rêve, pas pour la vérité !

Quaurais-je dû lui dire ? Que son fiancé est un porc comme on nen a jamais vu ? Quils se feront attaquer dans une ruelle et que le fiancé senfuira ? Que dans un mois il sera déjà avec sa copine, parce que son père est un homme daffaires ? Que Camille tombera enceinte après cette agression, et que sa grand-mère mourra de chagrin dans le mois ? Cest ça que je devrais dire ?

Que le fils quelle aura deviendra un voyou, se droguera à quatorze ans, battra sa mère, la fera souffrir ? Quelle finira à lhôpital psychiatrique, perdra son travail, vivra dans la misère avant de devenir femme de ménage ? Quà quarante-cinq ans on lui découvrira un cancer ? Cest ça que je devrais annoncer ?

Et quelle ne survivra pas à lopération ? Je devrais lui raconter tout ça ? Et après, elle me remercierait avec un cadeau ?

De toute façon, moi je pense, mon vieux moustachu, que sa vraie destinée, seuls toi et moi la connaissons. Celle que jai inventée, maintenant Camille, ses amies et sa grand-mère la connaissent aussi. Ne plisse pas les yeux, je sais quelle racontera tout, il suffit quelle rentre chez elle ! Tu vois ? Plus de monde que nous deux ? Oui ! Camille ma crue ? Elle ma crue ! Alors, tout peut encore changer

***
Camille marchait en souriant, quittant la maison de Mamie Geneviève. Elle se sentait bien, légère. Même si sa destinée ressemblait à un conte de fées, qui sait Peut-être que ce sera vrai ? On lui avait vanté cette voyante

Dans une ruelle sombre, la jeune fille entendit des pas et des rires derrière elle. Camille se mit à courir. Mais ils se rapprochaient Ils lauraient rattrapée si, au détour, elle nétait pas tombée sur un jeune homme accompagné dun énorme chien. Le chien aboya, le maître sortit un gaz lacrymogène :
Reculez, sales types ! Sinon
Camille, haletante, reprit son souffle, et son sauveur lui sourit :
Je mappelle Mathieu. On vous raccompagne, Jack et moi ?
Et tout changea.

***
Entre, ma belle ! Comment tappelles-tu ? Élodie ? Tu dis que Camille ta recommandée ? Je me souviens bien delle Comment va-t-elle ? Elle sest mariée ? Tant mieux ! Donne-moi ta main, approche. Ta paume est douce, délicate Les lignes sont claires, comme une carte. Tu veux savoir ce que lavenir te réserve ? Ne sois pas timide, pose tes questions. Sinon, je lirai ce que je vois, et tu risques dentendre des choses inattendues.

Tu veux tout savoir ? Très bien, écoute-moi bien. Lamour tattend, sincère et profond. Tu rencontreras un homme loyal, il te respectera, vous serez heureux ensemble. Regardez cette ligne, cest la promesse dun bonheur partagé Vous aurez un fils, brillant, il réussira ses études, peut-être à la Sorbonne, qui sait ? Il fera carrière, peut-être dans la diplomatie, ou il partira travailler à Bruxelles. Il gagnera bien sa vie, en euros, et il vous soutiendra, toi et ton époux.

Une fille viendra aussi, douce comme le printemps. Sa vie sera paisible, elle fondera une famille, toffrira des petits-enfants. Tes enfants seront épanouis, tu verras

Pour le travail, je vois une progression. Tu crois que tout est figé ? Détrompe-toi, la vie réserve toujours des surprises. Un jour, tu repenseras à Mamie Geneviève, tu iras à Notre-Dame allumer une bougie pour moi Largent ne te manquera pas, regarde, cest écrit là. Tu ne comprends pas ? Ce nest pas grave, parfois il faut juste croire.

Ta santé Elle nest pas parfaite, mais qui peut sen vanter aujourdhui ? Tu verras un médecin, un vrai expert, il saura taider. Tu le rencontreras bientôt, pas à cause dune maladie, mais lors dune soirée agréable. Il te donnera des conseils précieux. Tu vivras longtemps, plus que moi. Moi, jai traversé bien des épreuves, la guerre, la privation Mais ce nest pas mon histoire qui compte.

Tes passions, elles sont là, prêtes à éclore. Tu feras une découverte, peut-être en littérature, peut-être ailleurs. Cela tapportera la reconnaissance, la chance. Les gens viendront te demander conseil. Tout est inscrit sur ta main, toute douce

Pour tes parents, je ne vois pas grand-chose. Ta mère técrira, elle te demandera pardon. Respecte-la, elle a souffert. Elle ne voulait pas tabandonner, cest le destin. Ton père Je ne le vois plus. Mais ta grand-mère est encore là, nest-ce pas ? Oui, elle est vivante ! Quelle garde la santé ! Elle dansera à ton mariage, jen suis sûre ! Elle ne marche plus ? Je la vois danser, crois-moi ! Peut-être que le médecin pourra laider

Celui que tu vas bientôt rencontrer !

Tu as tout entendu ? Bien, Élodie. Je ne te raccompagne pas, mes jambes sont fatiguées Pose ton cadeau sur la table, sous la nappe. Merci, ma fille, va, tout ira bien pour toi ! Parle à tes amies de ce que Mamie Geneviève ta dit, à ta grand-mère aussi. Peut-être que dautres viendront me voir

***
Dans la cuisine, le vieux chat gris sétira, ses moustaches frémissant. Il fixa Mamie Geneviève dun air malicieux, comme sil comprenait tout. Elle lui lança un regard complice :
Tu sais, mon vieux, les gens préfèrent les belles histoires. La vérité, elle fait peur. Mais toi, tu veux toujours ta part de crème, et le saumon, jamais le thon ! Doù veux-tu que jaie autant deuros ? Les rêves, ça se paie cher, la vérité, personne nen veut.

Quaurais-je dû dire à Élodie ? Que son fiancé la trahirait ? Quelle connaîtrait la douleur, la solitude ? Que son fils se perdrait, que sa fille pleurerait ? Que la maladie frapperait, que la misère sinstallerait ? Non, personne ne veut entendre ça. On vient chercher lespoir, pas la détresse.

Et puis, la vraie destinée, cest toi et moi qui la connaissons, mon vieux. Celle que jai inventée, maintenant Élodie, ses amies et sa grand-mère la connaissent aussi. Elle racontera tout, cest certain, il suffit quelle rentre chez elle. Tu vois, le cercle sagrandit. Elle ma crue ? Oui, elle ma crue. Alors, tout peut encore changer

***
Élodie quitta la maison de Mamie Geneviève, le cœur léger. La nuit tombait sur Paris, les lampadaires jetaient des ombres dans les ruelles. Elle pensait à tout ce quon lui avait dit, à la promesse dun avenir radieux. Peut-être que la vie lui offrirait ce bonheur

Soudain, dans une impasse, elle entendit des voix, des rires rauques. Élodie accéléra le pas, la peur au ventre. Les pas se rapprochaient, elle allait être rattrapée Mais au coin de la rue, elle croisa un jeune homme accompagné dun immense berger allemand. Le chien grogna, le maître brandit un spray :
Reculez, bande de voyous ! Sinon
Élodie, tremblante, reprit son souffle. Le jeune homme lui adressa un sourire rassurant :
Je mappelle Luc. On vous raccompagne, César et moi ?
Et tout bascula.

***
Entre, ma jolie ! Quel est ton prénom ? Amélie ? Tu dis que cest Élodie qui ta envoyée ? Je me souviens bien delle Comment va-t-elle ? Elle a trouvé le bonheur ? Tant mieux ! Donne-moi ta main, approche. Ta paume est fine, presque translucide Les lignes sentrelacent comme des chemins secrets. Tu veux connaître ton avenir ? Ne sois pas timide, pose tes questions, sinon je lirai ce que je vois, et parfois, le destin surprend.

Tu veux tout savoir ? Écoute bien. Lamour tattend, sincère et profond. Un homme intègre croisera ta route, il taimera sans détour, vous serez heureux ensemble. Regarde cette ligne, elle promet des jours lumineux Un fils naîtra, curieux et brillant, il réussira ses études, peut-être à Polytechnique, qui sait ? Il fera carrière, peut-être dans la finance, ou partira travailler à Genève. Il gagnera bien sa vie, en euros, et il vous soutiendra, toi et ton époux.

Une fille viendra aussi, douce comme une brise dété. Sa vie sera paisible, elle fondera une famille, toffrira des petits-enfants. Tes enfants seront épanouis, tu verras

Pour le travail, je vois une progression. Tu crois que tout est figé ? Détrompe-toi, la vie réserve toujours des surprises. Un jour, tu repenseras à Mamie Geneviève, tu iras à la basilique allumer une bougie pour moi Largent ne te manquera pas, regarde, cest écrit là. Tu ne comprends pas ? Ce nest pas grave, parfois il faut juste croire.

Ta santé Elle nest pas parfaite, mais qui peut sen vanter aujourdhui ? Tu verras un médecin, un vrai expert, il saura taider. Tu le rencontreras bientôt, pas à cause dune maladie, mais lors dune soirée agréable. Il te donnera des conseils précieux. Tu vivras longtemps, plus que moi. Moi, jai traversé bien des épreuves, la guerre, la privation Mais ce nest pas mon histoire qui compte.

Tes passions, elles sont là, prêtes à éclore. Tu feras une découverte, peut-être en art, peut-être ailleurs. Cela tapportera la reconnaissance, la chance. Les gens viendront te demander conseil. Tout est inscrit sur ta main, toute douce

Pour tes parents, je ne vois pas grand-chose. Ta mère técrira, elle te demandera pardon. Respecte-la, elle a souffert. Elle ne voulait pas tabandonner, cest le destin. Ton père Je ne le vois plus. Mais ta grand-mère est encore là, nest-ce pas ? Oui, elle est vivante ! Quelle garde la santé ! Elle dansera à ton mariage, jen suis sûre ! Elle ne marche plus ? Je la vois danser, crois-moi ! Peut-être que le médecin pourra laider

Celui que tu vas bientôt rencontrer !

Tu as tout entendu ? Bien, Amélie. Je ne te raccompagne pas, mes jambes sont fatiguées Pose ton cadeau sur la table, sous la nappe. Merci, ma fille, va, tout ira bien pour toi ! Parle à tes amies de ce que Mamie Geneviève ta dit, à ta grand-mère aussi. Peut-être que dautres viendront me voir

***
Dans le salon, César, le vieux berger allemand, posa sa tête sur les genoux de Mamie Geneviève. Elle caressa doucement ses oreilles, le regard perdu dans ses pensées. Les gens veulent des contes, pas des vérités tranchantes. Mais César, lui, ne demande que de la tendresse et un morceau de fromage. Les rêves coûtent cher, la réalité, personne nen veut.

Quaurais-je dû dire à Amélie ? Que son fiancé la laisserait tomber ? Que la tristesse sinviterait dans sa vie ? Que son fils se perdrait, que sa fille pleurerait ? Que la maladie frapperait, que la misère sinstallerait ? Non, personne ne veut entendre ça. On vient chercher lespoir, pas la détresse.

Et puis, la vraie destinée, cest toi et moi qui la connaissons, César. Celle que jai inventée, maintenant Amélie, ses amies et sa grand-mère la connaissent aussi. Elle racontera tout, cest certain, il suffit quelle rentre chez elle. Tu vois, le cercle sagrandit. Elle ma crue ? Oui, elle ma crue. Alors, tout peut encore changer

***
Amélie quitta la maison de Mamie Geneviève, le cœur léger. La nuit enveloppait les rues de Lyon, les réverbères dessinaient des ombres mouvantes sur les pavés. Elle pensait à tout ce quon lui avait dit, à la promesse dun avenir radieux. Peut-être que la vie lui offrirait ce bonheur

Soudain, dans une impasse, elle entendit des voix, des rires rauques. Amélie accéléra le pas, la peur au ventre. Les pas se rapprochaient, elle allait être rattrapée Mais au coin de la rue, elle croisa un jeune homme accompagné dun immense chien noir. Le chien grogna, le maître brandit un spray :
Reculez, bande de voyous ! Sinon
Amélie, tremblante, reprit son souffle. Le jeune homme lui adressa un sourire rassurant :
Je mappelle Pierre. On vous raccompagne, Hugo et moi ?
Et tout bascula.

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La Faiseuse de Destins – Entre, ma chérie. Oui, je vais tout te dire, tout te révéler. Donne-moi ta main. Mamie Maroussia ne ment jamais, elle dit la vérité. Comment t’appelles-tu ? Tatiana ? Tania, alors ? Très bien ! Quelle petite main, presque enfantine. Toute douce… Et ces lignes, on dirait un livre. Si tu veux demander quelque chose, n’hésite pas, parle. Sinon Mamie Maroussia va lire ta paume, et tu n’entendras pas ce qu’il faut. Tout te dire ? D’accord ! Ton amour sera pur, lumineux. Tu te marieras. Ton mari sera un homme bien, sérieux. Il te traitera avec bonté. Tu vois ? Cette ligne-là, c’est l’amour… Vous aurez un fils, merveilleux. Il finira brillamment l’école, puis l’université. Oui, tout est écrit sur ta paume. Ensuite, il travaillera au ministère ou à l’étranger. Il gagnera beaucoup d’argent. Il vous aidera, toi et ton mari. Tu auras aussi une fille, adorable. Sa vie sera facile. Elle aura une famille. Elle te donnera des petits-enfants. Avec les enfants, tout ira bien… Le travail… Ma petite, je vois une évolution pour toi. Tu dis qu’il n’y a pas de place pour avancer ? Il y en a toujours. Tu dis ça maintenant, mais tu te souviendras de Mamie Maroussia, tu iras à l’église et tu allumeras une bougie pour ma santé… Tu auras beaucoup d’argent. Regarde, tu vois ? Tu ne comprends pas ? Il n’y a rien à comprendre… Ta santé – tu sais, ce n’est pas la meilleure. Mais qui va bien aujourd’hui ? Tu verras un médecin, il te dira mieux que moi comment te soigner. C’est un spécialiste, oui. Tu le rencontreras bientôt… Non, pas à cause d’une maladie, juste dans une bonne compagnie. Il te dira. Tu vivras longtemps, plus que moi. Et Mamie Maroussia est déjà âgée. Combien ? Presque quatre-vingts… Oui, on ne dirait pas. J’ai connu la guerre, la faim. Mais ce n’est pas de moi qu’il s’agit ! Regarde, ce sont tes intérêts. Tu vas bientôt découvrir quelque chose de nouveau, peut-être en science, ou ailleurs. Cela t’apportera gloire et chance. Les gens viendront te demander de l’aide. Tout est là, sur ta paume. Toute douce… Non, Tania, je ne peux pas dire grand-chose sur tes parents. Seulement… Ta mère t’écrira, elle te demandera pardon. Respecte-la, elle est âgée. Elle ne voulait pas t’abandonner, c’est le destin. Et ton père… Je ne le vois plus. Mais ta grand-mère est encore vivante ? Je te le dis, elle est vivante ! Qu’elle ait la santé ! Elle dansera à ton mariage ! Elle ne marche plus ? Comment ça ? Je la vois danser ! Peut-être que le médecin pourra l’aider ? Celui que tu vas rencontrer ! Tu as appris tout ce que tu voulais ? Bon, Tania. Je ne vais pas te raccompagner, j’ai mal aux jambes… Où mettre le petit cadeau ? Sur la table, sous la nappe. Merci, ma fille, va, tout ira bien pour toi ! Raconte à tes amies ce que Mamie Maroussia t’a dit, à ta grand-mère aussi. Peut-être que d’autres viendront me voir… *** – Qu’est-ce que tu regardes, sale tête moustachue ? Tu fais les gros yeux… Tu n’aimes pas que je dise la vérité ? Mais la petite viande et la crème, tu aimes ? Tu fais la fine bouche devant le « Whiskas », il te faut du poisson cher, tu ne veux pas de merlan ! Et d’où Mamie Maroussia aurait-elle autant d’argent ? Voilà ! Tout le monde veut payer pour du beau, pas pour la vérité ! Qu’aurais-je dû lui dire ? Que son fiancé est un porc comme on n’en a jamais vu ? Qu’ils se feront attaquer par des voyous dans une ruelle et que le fiancé s’enfuira ? Lui, ça ne lui fera rien ! Qu’un mois plus tard, il se fiancera avec sa copine parce que son père est un homme d’affaires ? Que Tania tombera enceinte après cette agression, et que la grand-mère de la petite mourra un mois plus tard ? C’est ça que j’aurais dû dire ? Que le fils que Tania aura deviendra comme son père, traînera dans les rues, deviendra toxicomane à quatorze ans, battra sa mère, lui fera du mal ? Qu’elle finira en psychiatrie, perdra son travail. Qu’ils vivront dans la misère jusqu’à ce qu’elle devienne femme de ménage. Qu’à quarante-cinq ans, on lui trouvera un cancer ? C’est ça que je devrais dire ? Et qu’elle ne survivra pas à l’opération ? C’est ça que je devrais lui raconter ? Et après ça, elle me donnerait un cadeau ? Et puis, moi, je pense, moustachu, – son vrai destin, seuls toi et moi le connaissons. Celui que j’ai inventé, maintenant je le sais, Tania aussi, ses amies, sa grand-mère. Ne plisse pas les yeux, je sais qu’elle racontera tout, il faut juste qu’elle rentre chez elle ! Tu vois combien ! Plus que nous deux ? Plus ! Tania m’a crue ? Elle m’a crue ! Alors, tout peut encore changer… *** Tania repartait de chez Mamie Maroussia, le sourire aux lèvres. Elle se sentait bien, légère. Même si son destin raconté ressemblait à un conte de fées, mais… Mais peut-être que ce sera ainsi ? On lui avait vanté cette voyante… Dans une ruelle sombre et déserte, la jeune fille entendit des pas et des rires derrière elle. Tania se mit à courir. Mais ils se rapprochaient… Et ils l’auraient rattrapée si, au tournant, elle n’était pas tombée sur un jeune homme avec un énorme chien. Le chien aboya, le maître sortit un gaz : – Reculez, sales types ! Sinon… Tania reprit son souffle, et son gentil protecteur sourit : – Je suis Vitali. Venez, Jack et moi allons vous raccompagner chez vous ? Et tout s’est arrangé. *** – Entre, ma belle ! Comment t’appelles-tu ? Olga ? Tania t’a conseillé de venir ? Je me souviens d’elle… Comment va-t-elle ? Elle s’est mariée ? Tant mieux ! Allez, donne ta main… Elle est douce, toute lisse…
J’ai découvert dans le tiroir du bureau une note : «Il sait. Fuis!»