Micro, frisson, regard silencieux. Comme une prière. Je l’ai levé. Une boule sale et chaude de fourrure.

Petit, mouillé, il frémissait. Il me regardait, muet, comme sil implorait. Je lai soulevé. Une petite boule sale et chaude de fourrure. Il na rien opposé, il sest juste lové contre moi. Je rentrais du boulot, je passais devant la petite boutique du coin, et le voilà étendu comme sil mattendait. « Juste quelques jours », jai chuchoté à ma femme. « Maman va nous tuer. On le plantera dans le débarras, il y fera chaud. »

Ma bellemaman, froide comme le givre du matin. Tout était programmé: dîner à dixhuit heures, ménage à dixneuf heures. Les émotions, cétait interdit. Elle vivait avec nous et javais presque cinquante ans. Deuxième mariage, sans illusion, mais avec lespoir dun peu de calme et de proximité. Capucine, douce, lumineuse. Sa mère, Madame Marchand, était un vrai mur.

Jai bricolé un petit nid pour le toutou: une petite couverture, une bouteille deau tiède, un bol. Il mangeait de ma main, cherchait le contact, une voix, de la chaleur. Avec Capucine, je le regardais en cachette, on riait comme des gamins. Cétait beau.

Et puis la bellemaman a ouvert la porte.
« Cest quoi ce zoo! »
Elle sest figée.
« Ici, cest pas un refuge. Expulsele! Pas de chiens! », atelle dit sans même me regarder.

Jai sorti le chien. Jai pensé quon parlerait, quon sarrangerait. Mais quand je suis revenu, il avait disparu.
« Où il est? »
« Je lai mis à la benne. Doù tu las sorti? »

Sans un mot, je suis monté dans ma voiture et je lai cherché pendant des heures. Je lai retrouvé sous une caisse près du marché. Il tremblait, ma reconnu, a sauté, et sest retrouvé dans mes bras. Au lieu de le ramener à la maison, on est allé à la villa. Cette nuit-là on a passé le temps ensemble: moi sur le lit pliant, lui à mes pieds, le museau sur ma chaussure. Il dormait comme sil craignait de se réveiller.

Depuis, chaque weekend on plante des arbres, on lui construit une petite cabane. Il grandit, il me regarde dans les yeux, il attend.

Après ça, Madame Lefèvre est tombée malade. Les médecins ont prescrit de lair, du calme. On la emmenée à la villa. Le chien est sorti doucement, sest approché, sest couché aux pieds delle.
« Cest qui? »
« Vous vous souvenez du chien? Cest lui. »
« Il se souvient encore de moi? » atelle demandé. Elle la caressé maladroitement, mais il na pas bougé. Depuis, ils sont toujours côte à côte: elle dans le fauteuil, lui à ses pieds, il écoute, elle parle.

Aujourdhui, quand je viens, ils sont tous les deux sur la véranda. Il pose sa tête sur les genoux delle, elle le caresse et sourit. Alors jai compris. Madame Lefèvre navait pas peur du chien, elle craignait de laisser entrer chez elle quelque chose qui pourrait faire fondre la glace de son cœur.

Et le chien est resté.
Dis, tu penses quon peut pardonner à quelquun qui na jamais donné de chance, mais qui finit par avoir besoin de nous?

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Micro, frisson, regard silencieux. Comme une prière. Je l’ai levé. Une boule sale et chaude de fourrure.
Encore toi avec tes histoires ? Ici, c’est moi le maître de maison – c’est moi qui décide qui s’installe, et qui part. Fais attention, tu pourrais bien être celui qui déménage… — Toi ? — ricana Ivan. — Tu te rappelles qui est le vrai propriétaire, ici ? *** Un matin parisien plein de tensions dans leur appartement, comme toujours : le soleil brille sans éclairer vraiment la chambre d’Ivan, rendu irritable par une nuit blanche. Son père, Michel, alias Misha, tonitrue déjà dans le couloir, exigeant de l’argent sous prétexte d’impressionner Ludivine lors d’un dîner au restaurant. Mais Ivan n’est plus prêt à financer les caprices paternels, et rappelle calmement à son père que l’appartement appartient à lui, grâce à sa grand-mère Anne, qui n’a jamais eu confiance dans les dépenses inconsidérées de son fils. Michel fait mine de s’offusquer, mais doit se rendre à l’évidence : Ivan est le vrai maître des lieux. Le soir, Ivan rentre du travail et découvre l’appartement envahi par la joyeuse bande de son père et Ludivine, mais il décide enfin d’affirmer ses droits et demande à tout le monde de partir. Les tensions montent : Michel ne supporte pas que son fils ose le mettre à la porte, devant ses amis. Le lendemain, après une nuit agitée, Ivan tente de faire un geste vers la réconciliation en donnant à son père de l’argent pour son rendez-vous, mais le doute et la lassitude persistent. Lorsque Michel annonce que Ludivine va s’installer à la maison, la situation explose : Ivan s’y oppose fermement, rappelant une nouvelle fois qui est le vrai propriétaire. Michel menace alors de mettre son fils à la porte. Quelques jours plus tard, Ivan retrouve ses affaires éparpillées sur le trottoir sous les fenêtres de l’immeuble. Michel a changé les serrures. Grâce à l’aide de sa voisine Catherine, Ivan trouve refuge chez elle, puis fait changer les serrures à son tour, entassant les affaires de son père et Ludivine dans des sacs sur le palier. Quand Michel revient réclamer ses droits, Ivan lui claque la porte au nez : «Ici, désormais, c’est vraiment chez moi.» Fatigué mais soulagé, Ivan partage un moment de simplicité et de réconfort autour d’un gâteau aux gaufrettes avec Catherine, heureux d’avoir enfin retrouvé la paix dans SON appartement parisien.