Photographie du Passé : Souvenirs Captivants d’une Époque Révolue

Cher journal,

Ce matin, en rangeant le grenier de la maison familiale de Paris, jai sorti un vieux coffret dalbums. Parmi les clichés jaunis, lun deux a retenu mon regard : une jeune femme en robe dété, les cheveux au vent, à côté dun homme grand au sourire bienveillant. Cétait ma mère, Anne Dupont, et le monsieur qui laccompagnait était Michel Lefèvre.

Quatre-vingtdix ans ? Peutêtre moins. Jai caressé le visage de Michel du bout des doigts, comme si je voulais effacer le temps, mais limage est restée figée, immobile, comme un souvenir qui refuse de seffacer.

« Grandpère, cest qui celuilà ? » a demandé ma petitefille, Clémence, dix ans, en se penchant curieuse. Ses doigts sapprêtaient déjà à toucher la photo.

« Cest un vieil ami, » aije répondu en éloignant doucement sa main. « Regarde plutôt ces autres images. »

Mais Clémence ne se découragea pas.

« Pourquoi il est avec toi sur la photo ? Vous étiez amis ? »

Ma mère soupira.

« Oui, nous étions très proches. Il y a longtemps. »

« Et maintenant, il où ? »

« Je ne sais pas, » at-elle répondu honnêtement.

En vérité, je nen savais rien non plus. La dernière fois quils sétaient vus, cétait dans le même parc où la photo avait été prise, le Jardin du Luxembourg. Michel avait annoncé un départ bref pour le travail, puis la vie les a séparés.

« Tu laimais bien ? » demanda Clémence, les genoux repliés sous elle.

« Oui, » admit Anne.

« Et il taimait ? »

Elle réfléchit un instant.

« Je le crois, mais »

« Mais quoi ? »

« Mais le destin parfois tourne de façon à ce que même lamour ne suffise pas. »

Clémence fronça les sourcils, ne comprenant pas vraiment, et ma mère ne chercha pas à détailler davantage. Comment expliquer à une enfant quil existe des lettres qui arrivent trop tard, des trains quon ne parvient jamais à attraper, même en courant à perdre haleine ?

« Tu aimerais le revoir ? » insista la petite.

Anne esquissa un sourire.

« Non, mon petit cœur. Certaines choses se laissent mieux dans le passé. »

Elle remit délicatement la photo dans la boîte, quand soudain Clémence surgit.

« Grandpère, cherchonsle ! »

« Quoi ? »

« On peut le trouver sur les réseaux ! Son nom, cest Michel, non ? »

« Clémence, arrête »

Mais il était trop tard. Elle parcourait déjà Instagram, cherchant des indices, et malgré ma réticence, je sentis au fond de moi une pointe denvie. Jai même donné son nom complet à ma fille.

Soudain, elle sexclama :

« Regarde, Grandpère ! »

Je fermai les yeux un instant, puis les rouvris. Sur lécran, un homme aux cheveux gris, quelques rides au coin des yeux, affichait le même sourire que sur la photo.

« Cest lui ? » demanda Clémence.

Je restai muet, le cœur battant comme sil avait vingtcinq ans de nouveau.

« Grandpère ? »

« Oui, » murmuraije. « Cest bien lui. »

Clémence, toute excitée, proposa décrire un message.

« Non, » secouaije la tête.

« Pourquoi ? Tu laimais pourtant ! »

« Cétait il y a longtemps. »

« Et sil te cherchait aussi ? »

Mon cœur se serra. Mais trop dannées avaient passé, trop de changements sétaient produits. Je nétais plus la jeune femme de la photo.

« Au moins, voyons son profil, » insista Clémence. Elle parcourut les publications, découvrit une photo de son chien, puis une image de famille.

« Voilà, il vient à Paris la semaine prochaine pour un concert, » annonçatelle. « Cest un violoncelliste, tu sais, tu aimes la musique. »

Je restai figé. Il était vraiment là, sur le point de jouer sous les dorures du Théâtre des ChampsÉlysées.

« On y va ! » sécria la petite.

« Non, » rétorquaije fermement. « Assez. »

Cette nuit, après que Clémence se soit endormie, jai rouvert son profil et lu son dernier post :

« Retour sur les scènes de mon enfance après tant dannées. Un sentiment étrange, comme si le temps sétait suspendu. »

Une photo du Jardin du Luxembourg accompagnait le texte. Le concert était prévu pour samedi.

Jai hésité trois fois avant de décider dy aller. Finalement, Clémence me supplia :

« On écoutera seulement la musique, même si tu ne veux pas le voir de près. »

La salle était presque pleine. Quand Michel monta, vêtu dun costume noir, la violoncelle entre les mains, mes doigts crispèrent jusquà blanchir les jointures.

Il commença à jouer. La mélodie qui séleva était celle quil avait composée pour Anne autrefois, un été lointain.

Clémence, les yeux grands ouverts, me demanda :

« Grandpère, tu pleures ? »

Les larmes coulaient le long de mes joues, la musique coulait comme le temps perdu que lon ne peut récupérer.

Après le concert, Clémence tenta de me pousser vers les coulisses.

« Non ! » protestaije, agrippant mon manteau. « Je ne suis pas celle dont il se souvient. »

Je sortis dans le froid parisien, inspirant lair glacial.

Une voix derrière moi séleva :

« Anne ? »

Je me retournai. Michel était à quelques pas, les yeux écarquillés comme sil venait dapercevoir un fantôme.

« Cest vraiment toi ? » balbutiaije.

Il savança, hésitant.

« Je tai vue dans la salle je pensais que cétait mon imagination. Mais alors »

Il se tut.

« Tu as pleuré, » repritil doucement. « Et je lai compris. »

Clémence se retira discrètement, nous laissant seuls.

« Tu jouais cette mélodie, » susurraije.

« Je la joue à chaque concert, » réponditil.

Nous nous regardâmes, deux vieillards aux yeux encore illuminés par les lueurs de leur jeunesse.

« Pardonnemoi de ne pas tavoir attendue, » murmuraije.

« Pardonnemoi de ne pas être revenu à temps, » répliquail.

Alors, je souris enfin.

« Allons, » disje. « Je te présenterai ma petitefille. »

Clémence, cachée dans lombre, éclata de joie.

Cette soirée ma rappelé que les regrets ne servent quà alourdir le cœur. Il vaut mieux accepter le passé, chérir les souvenirs et laisser le présent se dérouler sans se cramper à ce qui ne peut revenir.

Cest la leçon que je retiens aujourdhui.

Jean.

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