Sashenka observait Lyudmila avec une envie profonde. Lyudmila s’apprêtait à quitter l’orphelinat. Ses nouveaux parents finalisaient les formalités et elle allait enfin avoir une famille.

Je me souviens, Sacha, alors quil nétait quun petit garçon de cinq ans, regardait Lydie avec une jalousie profonde. Lydie venait dêtre retirée de lorphelinat ; ses nouveaux parents, déjà en train de remplir les papiers, allaient bientôt laccueillir dans une vraie famille. Elle racontait, les yeux brillants, les journées passées avec ses parents adoptifs: le zoo de Paris, où Sacha nétait jamais allé, le théâtre de marionnettes où elle avait vu une sorcière à la ressemblance de la célèbre Bâbâ Yaga, et la confiture dabricots aux noyaux que sa mère préparait avec soin.

Sacha navait jamais connu autre chose que les murs de lorphelinat. Les enfants arrivaient, puis disparaissaient. Quand Aléxis, un autre petit, sen alla, Sacha demanda à Madame Marie, la directrice, :

«Madame? Où est allé Aléxis?»

«Il est parti vivre avec une famille,» répondit-elle.

«Questce quune famille?» insista Sacha.

«Cest un lieu où on tattend toujours, où lon taime vraiment,» expliqua Madame Marie.

«Et la mienne?» demanda-t-il, les yeux grands ouverts. Madame Marie soupira, le regard triste, et ne répondit pas. Depuis ce jour, Sacha ne posa plus la question, conscient que la famille était quelque chose dessentiel et de précieux.

Lorsque Lydie disparut de nouveau pendant deux jours, puis réapparut vêtue dune robe élégante, coiffée et avec une nouvelle poupée, Sacha éclata en sanglots. Personne ne lavait jamais pris en charge, pensaitil, et il se sentait abandonné.

Madame Marie entra alors, portant un pull et un pantalon, et dit :

«Sacha, habilletoi, des invités arrivent.»

«Des invités? Qui?» sétonna le garçon.

«Ils souhaitent te rencontrer.»

Il shabilla, sassit sur un banc et attendit. Madame Marie vint, le prit par la main et le conduisit dans la salle dattente. Là, un oncle grand, barbu et moustachu, et une tante petite, mince, dune beauté qui, à ses yeux, rappelait une rose parfumée, étaient assis. Ses yeux étaient grands, ses cils épais.

«Bonjour,» dit la tante en souriant, «Je mappelle Amélie. Et vous?»

«Sacha,» réponditil, «Qui êtesvous?»

«Nous voulons devenir vos amis, et nous avons besoin de votre aide,» déclara-t-elle.

«De quoi?» demandail, tournant son regard vers loncle.

Loncle, se baissant doucement, sassit à genoux et dit :

«Salut, je mappelle Damien. On ma dit que tu dessinais très bien et que tu pourrais faire un portrait dun robot. On a vraiment besoin dune image de robot, tu pourrais nous aider?»

«Oui,» répondit Sacha avec sérieux, «Quel type de robot?Je sais en dessiner plusieurs.»

Damien se leva, prit un sac, en sortit un cahier de dessin, des crayons et une boîte contenant un robot flamboyant, tout neuf, aux pièces luisantes qui scintillaient sous les rayons du soleil filtrant la fenêtre. Sacha en resta bouchebée ; il navait jamais vu un tel géant de métal.

«Cest lOptimus Prime,» sexclamail, «le chef des Transformers!»

«Il te plaît?» demanda Damien.

«Il me fascine,» répondit le garçon, les yeux pétillants.

«Prends le robot, les crayons, et faisnous un dessin?Puis, parlons un peu comme de vrais amis.»

Sacha passa une heure avec Damien et Amélie. Ils évoquèrent tout ce quil aimait, ce qui le déplaisait, ses jouets, son lit, ses bottes qui le gelaient dehors. Amélie tenait toujours sa main, Damien lui caressait la tête. Madame Marie entra alors.

«Il est temps,» annonçat-elle, «le dîner.»

Vincent, un garçon de la même section, sapprocha, serra la main de Sacha et dit :

«Nous reviendrons dans une semaine, tu pourras finir le robot?»

«Vous reviendrez?» demanda le petit.

«Bien sûr,» répondit Amélie, le serrant dans ses bras jusquà ce que les os de Sacha crissent, les larmes perlant dans ses yeux.

«Pourquoi pleurestu?» demandail.

«Ce nest rien, mon petit, juste une poussière dans lœil,» murmuraelle.

Madame Marie laccompagna à la salle à manger. Sacha mangea rapidement, puis courut dans la chambre où lon avait déposé la boîte du robot. Il louvrit, admirant les membres qui bougeaient, la tête qui pivôtait.

Il commença à dessiner quand soudain, les grands de la classe supérieure firent irruption.

«Hé, Dam!», sécria lun deux, «Donnemoi ça.»

Il attrapa le robot et le lança en lair.

«Rendsle!», cria Sacha, «Ce nest pas à moi.»

«Ce nest à personne,» ricana Dam, «cest commun.»

Sacha sélança, tenta de récupérer le robot. Une lutte sensuivit ; le robot se brisa, ne laissant quune jambe. Sacha, les larmes aux yeux, se jeta sur Dam, qui, en se retournant, jeta les restes du robot contre le visage du petit. Le sang coula du nez de Sacha. Madame Marie le conduisit aux toilettes, le nettoya, lui boucher le nez dun coton.

«Ce nest pas ma faute,» sanglota Sacha, «on ne ma pas donné le robot, on men a seulement prêté pour le dessiner.»

Madame Marie, souriante, lui dit :

«Allez, dessine.»

Il se demanda comment faire avec un robot cassé. Il fixa la jambe à un mur, la mit en place, et commença à recopier.

Quand lheure du coucher arriva, Sacha avait déjà fini un dessin. Le lendemain, il en réalisa deux de plus, puis encore dautres ; tout le cahier fut rempli de robots.

Il demanda à Madame Marie :

«La semaine seratelle bientôt passée?Quand viendront Amélie et Damien?»

Madame Marie, le regard triste, répondit :

«La semaine est déjà écoulée, et il est probable quAmélie et Damien ne reviennent pas.»

Sacha éclata en sanglots, pensant que cétait à cause du robot brisé. Il passa la nuit blanche, ne dormant quà laube, songeant sans cesse au robot, à Damien, à Amélie.

Le jour suivant, Madame Marie entra, souriante :

«Habilletoi, Sacha, on est venus te voir.»

«Qui?» demandail.

«Tu verras.»

Il ouvrit la porte et découvrit Damien et Amélie.

«Bonjour,» dit Amélie, «nous sommes venus pour toi.»

«Où?Questce qui se passe?» était perdu Sacha.

«Tu avais parlé du zoo, tu veux y aller?»

«Oui,» balbutia Sacha, les larmes coulant.

Damien et Amélie savancèrent :

«Questce qui ne va pas?» demanda Damien, inquiet.

«Je reviens tout de suite,» répondit Sacha, courant vers la porte, le cahier et la jambe du robot en main.

«Voici,» ditil, «désolé, voici votre robot.»

«Cest ton robot,» ricana Damien, «on te le donne.»

Sacha tendit le cahier à Damien :

«Regarde, jai dessiné.»

«Parfait,» dit Damien après avoir examiné les dessins, «cest exactement ce quil nous faut, tu dessines vraiment bien. Merci. Et ne tinquiète pas pour le robot, je le réparerai.»

«Allons au zoo,» ajouta Amélie, laidant à shabiller.

Au zoo, Sacha fut émerveillé par la multitude danimaux, doiseaux, au point de ne plus savoir où poser le regard. Les singes espiègles qui bondissaient de branche en branche et mangeaient des bananes le firent éclater de rire.

«Sacha, nous aimerions tinviter chez nous,» proposa Amélie.

«Oui,» réponditil.

Ils arrivèrent chez eux. Sacha entra prudemment dans lappartement.

«Nhésite pas, entre,» dit Damien.

Amélie le prit par la main et le conduisit dans une chambre décorée de papiers peints représentant des planètes, un lit en forme de voiture, des jouets rangés dans un grand placard.

«Qui vit ici?» demandail.

Damien et Amélie sassirent sur le sol, prirent chacune une main de Sacha et dirent :

«Sacha, nous voulons que tu vives avec nous. Cette chambre est la tienne, les jouets sont à toi, le lit est à toi. Si tu veux, reste avec nous pour toujours.»

«Pour toujours?Donc vous madoptez?»

«Oui,» confirma Amélie, «nous taccueillons dans notre famille.»

«Mais pourquoi moi?Je suis un étranger, jai cassé le robot.»

«Tu nes pas un étranger, tu es notre fils,» murmura doucement Amélie.

Sacha, les larmes aux yeux, hocha la tête. Il aimait Amélie, Damien, la nouvelle chambre. Il ne voulait plus retourner à lorphelinat.

«Tu es daccord?» demanda Damien.

«Oui, je me comporterai bien.»

Damien et Amélie le prirent dans leurs bras, le baisèrent, le serrèrent fort. Sacha était enfin heureux, enfin il avait une vraie famille, une famille qui laimait réellement.

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Sashenka observait Lyudmila avec une envie profonde. Lyudmila s’apprêtait à quitter l’orphelinat. Ses nouveaux parents finalisaient les formalités et elle allait enfin avoir une famille.
Катя была девушкой несовременной и отчаянно мечтала о ЗАГСе в эпоху, когда вокруг — «сосиски» всех сортов: гостевые браки, почасовые квартиры и смазливые блогеры-Обломовы со смартфонами; она — естественная, без новомодного тюнинга, с высшим престижным образованием, хорошей работой и квартирой, подаренной бабушкой на шестнадцать, — но мужчины прохаживались мимо, попадая то на Вадика, который исчез, когда выяснилось, кто покупает продукты, то на Сергея/Юрия‑аналитика без работы, гордого цитатами Маяковского и привыкшего просить у мамы; Катя, верящая в астрологические прогнозы и сама — Стрелец, переживала первую большую любовь на курсе, затем Леню с его «зодияками» и нескончаемыми «смешками» и оскорбительными шутками в адрес Регины Дубовицкой, когда дед, ветеран КГБ с польскими корнями, в сердцах высказался иза обидной подмены Дзержинского на «Жердинского», и, наконец, Петра‑Деву — аккуратного, бережливого, но прижимистого хозяина однушки, который, переехав к ней и сдав свою квартиру, потребовал прописки и вызвал у Кати холодное сомнение; в бытовых перепалках про «прописку — это ли любовь» и предложении жить по очереди — месяц в её, месяц в его — вспыхивали старые и новые претензии, а гороскопы, «мамочкин сынизм», хроническое ничОгонеробливание кавалеров и барышень, торгашество чувств и шопинг делали семейную жизнь скорее испытанием, чем романом; подруги — одна вышла «на полгода», другая — «на год», третья — «потихоньку», и Катя, перевалившая за тридцать, после повышения, покупки иномарки, смены однушки на двушку и отпуска приходит к выводу, что жизнь удалась и дети «для себя» ещё ждут (детородный возраст теперь до шестидесяти), но вопрос остаётся: стоит ли жертвовать спокойной самостоятельностью ради сомнительных «союзов» в мире, где замена морали на удобство и шуточную эрудицию оборачивается потерей надежды на настоящую семью?