Quelqu’un a arraché ses pommes de terre, les secouant délicatement, et a récolté la plus grande…

Écoute, je vais te raconter ce qui sest passé avec Élodie. Elle arrachait les pommes de terre, les épluchait, et en a ramassé la plus grosse Élodie sest figée, le cœur battait la chamade. Elle a continué à marcher et a vu que les choux manquaient aussi de leurs gros chefsdebout. En gros la moitié de la récolte de choux avait disparu.

Antoinette Durand était aux anges. Pas juste parce quelle achetait, mais parce que cétait son rêve : pouvoir sinstaller dans une petite maison à la campagne après la retraite.

Elle avait bien préparé son coup, choisi un village pittoresque près de Lyon, avec peu dhabitants elle voulait le calme, la nature, un jardin tout près de la maison. Le destin a fait quune vieille bâtisse solide, avec un jardin, a été trouvée à la lisière du hameau. Un peu isolée, mais ça la rassurait : dun côté les voisins, de lautre le champ, puis la forêt. Une vue à couper le souffle.

Cest sur ce sentier doux quÉlodie aimait se balader jusquau bois. Le soir, le soleil se couchait derrière les sapins et les épicéas, et les couchers de soleil, là, étaient vraiment magiques pendant ses promenades.

Au début du printemps, la terre venait juste de se réchauffer, et Élodie a remonté le vieux grillage qui penchait.

« Il faudrait remplacer la clôture, Élodie, » a suggéré Antoinette, sa voisine dâge similaire.

« Laissele comme ça un moment, je le changerai quand il tombera vraiment, » a répondu Élodie en tapant sur le poteau rouillé avec sa hache. Antoinette a souri.

« Tu es une vraie Française de la campagne, Élodie ! Mais cest dommage quon manque dhommes ici certains sont partis, dautres sont vieux, dautres encore ont disparu. Moi, je suis veuve depuis dix ans. »

« Moi aussi, mon sort est similaire. Je ne suis pas veuve, jai divorcé quand mon mari et moi avons compris quon ne tenait le foyer que pour la fille. Une fois quelle a grandi, mariée, on ne pouvait plus vivre ensemble cest comme ça, parfois. »

« Au moins, on ne se fait plus la vie dure, et ça a son bon côté, » a conclu Antoinette, « mais je mettrai une clôture plus solide à lautomne. »

Le printemps et lété, Élodie a passé ses journées au potager et dans les bois.

« Jamais je nai été autant dehors de ma vie, » disait-elle en pointant les ifs devant la maison et le pinson où elle cueillait des champignons, même des morilles. Les myrtilles et les fraises étaient à foison.

« Cest ça le bonheur dun déménagement, » sest réjouie Antoinette, « pour moi, cest la routine. »

Les deux femmes sont devenues amies. Lautomne est arrivé, le potager regorgeait de gros choux, les pommes de terre roulaient en ragoût, la récolte était magnifique. Élodie creusait les tubercules pour la soupe et ne pouvait plus se rassasier.

« Antoinette, je pars en ville quelques jours, » a-t-elle annoncé, « la classe se retrouve comme dhabitude, on fête lanniversaire de notre ancienne camarade, Svetlana. Je reviendrai puis je récolterai. »

Antoinette a fait signe. La soirée sest bien passée, Élodie montrant des photos de sa maison et vantant le beau rendement.

« Ce sol sest reposé, » expliquaitelle à Valérie Dubois, son ancien camarade de classe, « deux ans sans rien planter, mais lan prochain je commanderai du fumier pour notre tracteur. »

« Fais gaffe, » a prévenu Valérie, « si tu veux, je viendrai taider. »

Élodie a souri, mais elle voulait dabord se débrouiller. Elle et Valérie sétaient aimés à la fin du lycée, puis leurs chemins se sont séparés quand ils sont allés étudier dans des villes différentes. Maintenant, ils se retrouvent chaque année chez Svetlana.

Valérie, veuf, ne cherchait plus à se remarier, tout comme Élodie. Leur liberté les attirait, aucun poids, aucune dette.

Ce soir-là, Valérie a raccompagné Élodie jusquà la porte et ils ont papoté jusquà deux heures du matin.

« Tu sais quil est tard, nestce pas ? » a noté Élodie en regardant sa montre.

« Peutêtre je trouverais un coin ici, » a plaisanté Valérie.

« Non, non, je pars à laube, prends un taxi, on se reverra demain, » a dit Élodie, avant de sendormir, rêvant du lendemain.

Le lendemain, elle a pris le premier bus pour le village. En descendant, elle a senti lair frais du matin, le chant des coqs. Elle est entrée dans la maison, a pris un thé, sest changée en tenue de travail, a parcouru le jardin pour planifier sa journée et est sortie dans la cour. Le village était calme, les habitants sortaient à peine, elle attendait 9h pour prendre le thé chez Antoinette.

Dans le jardin, elle a vu les touffes de pommes de terre tout éparpillées, les tubercules jetés partout. Quelquun les arrachait, les épluchait, et avait ramassé le plus gros Élodie sest figée, son cœur a rebondi. En avançant, elle a constaté quil manquait la moitié des gros choux.

Elle a poussé un cri, puis a remarqué la clôture cassée. Le poteau quelle avait planté au printemps était à terre, des traces de bottes lourdes marquaient le sol.

Élodie a filé chez Antoinette, a frappé à la fenêtre, et la voisine a tout de suite ouvert :

« Questce qui se passe, Élodie ? »

« On ma volé, Antoinette, viens, on va voir Que faire maintenant ? » Des larmes coulaient.

Antoinette a enfilé son manteau et a sorti :

« Sacré voleur ils ont profité que la maison est en bout de rue, quil ny a pas de chien, que tu es seule »

Elles ont examiné le site : on voyait des traces de vélos venant du côté du grillage, des braconniers qui ont cassé le poteau, plié la clôture et se sont glissés dans le potager pour prendre tout ce qui était à portée. Ils ont jeté les petites pommes de terre, gardé les gros choux dans des sacs et sont partis à vélo.

« Jen avais pas mal, mais quelle perte ! » a soupiré Élodie.

« Cest la même chose, personne ne peut prouver le vol, les jardins sont comme ça, » a répliqué Antoinette. « Je devine doù ils venaient, des gars sans le sou Mais on ne va pas sen occuper. »

« Et maintenant ? » a demandé Élodie, assise sur le pas de la porte, « Jétais si heureuse, comme une petite fille en lunettes roses. Tout le monde me semblait gentil. »

« Ce nest pas chez nous, Élodie, il y a plein de villages où les gens peinent, mais Dieu voit tout, » a dit Antoinette. « Je vais chercher le menuisier Ivan, il réparera la clôture. On verra ensuite. »

Ivan, un homme de soixantedix ans, a remplacé le poteau par un solide en bois et a rebouché un espace avec de vieilles planches robustes.

« Voilà, maîtresse, votre clôture. Ne vous en faites pas, ce genre de chose arrive souvent dans les campagnes, il ne faut pas laisser la maison sans surveillance, » a expliqué Ivan.

« Et quoi dautre ? » a demandé Élodie.

« Il faut changer la serrure de la porte dentrée, mettre un loquet, pour que lon voie tout de suite quon nest pas chez soi, » a ajouté Ivan.

« Un petit chien aussi, ça ferait du bruit, » a ajouté Antoinette. « On ne peut pas vivre au bord du chemin sans un toutou. »

« Ça fait cinq, » a conclu Ivan en comptant.

Tout le monde a ri, Élodie a essuyé ses larmes.

« Ce nest pas les pommes ou les choux qui me manquent, cest le travail que jai mis là-dedans, » a-t-elle dit.

« Ne tinquiète pas, je te donne tout le chou que tu veux, mon jardin est plein, on pourra le conserver pour lhiver, » a proposé Antoinette.

Ils sont allés déjeuner ensemble. Élodie, rassurée, a parlé de sa réunion en ville et a prévu, dès que la récolte serait faite, de mettre en place des mesures de sécurité.

Une semaine plus tard, Valérie est venu à la ville, a aidé Élodie à acheter un loquet pour la porte et a regardé les prix du matériel.

« Je taide, ne refuse pas, on va mesurer sur place, on va aller au village ensemble, je resterai quelques jours pour voir ton exploitation et préparer les travaux, » a dit Valérie.

« Tu veux vraiment maider ? Alors je paierai » a commencé Élodie.

« Pas la peine, je suis en congé, jai rien dautre à faire, » a répondu Valérie en lembrassant.

Le village était impressionné.

« Comme le menuisier est venu, les artisans du coin ont été surpris, » disaient les voisins.

Valérie et le menuisier ont installé une nouvelle clôture en une semaine, en apportant des panneaux et des poteaux métalliques de la ville. Élodie a préparé le repas pour les aides et était heureuse que son jardin soit enfin bien entouré.

« Un voleur ne pourra rien faire, même si la récolte est partie, le vrai trésor, cest toi, Élodie, » a dit Valérie.

Ivan a offert à Élodie un chiot nommé Baron, un petit toutou qui courait dans la cour comme une peluche, pas vraiment un gardechien mais adorable. Ils ont construit un petit abri chaud pour lui près du jardin.

« Ça ressemble à tout ce quon a imaginé, » a souri Élodie un jour autour dun thé avec Antoinette et Ivan.

« Et le menuisier, il restera ici ? » a demandé Ivan.

« Bien sûr, on ne fait pas laveugle, on voit que vous vous aimez, » a répliqué Antoinette. « Il est bon, il ne prend pas dargent, il garde sa liberté. »

Après son congé, Valérie est revenu chez Élodie avec ses provisions.

« Tu veux un aidemaison permanent ? » a-t-il demandé en plaisantant à la porte. « Je ne demande que des soupes, des tartes, le potager suffit à ne pas mourir de faim. »

« Daccord, il faut juste un peu de travail, » a ri Élodie. « Et tu garderas la maison, surtout quand Baron grandira. »

Valérie travaillait en ville, ne revenait quoccasionnellement, payait les factures, et Élodie louait son appartement en ville à des locataires pendant quelle attendait son retour. Ils aimaient être ensemble, rêvant de la chaleur dun foyer.

Un an, puis un mois, le couple était respecté dans le village, mais ils noubliaient pas la ville et partaient chaque printemps au spa préféré. Ivan gardait la maison, nourrissait Baron, le chat, et faisait des comptes par téléphone.

« Profitez du spa, ne vous inquiétez de rien, la maison, le chat et le chien sont sous contrôle, » disait-il.

« Le meilleur spa, cest notre village, je ne peux plus attendre de revenir, » répondait Élodie.

Ainsi, Valérie et Élodie vivent ensemble, de moins en moins attirés par les voyages lointains, car leurs champs offrent les plus beaux couchers de soleil. Ils aiment se promener aux abords du bois, regarder le soleil se coucher, et le fidèle Baron court à leurs côtés, poursuivant les corbeaux qui se posent sur le bord du chemin.

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Tu n’es qu’une étrangère pour lui, alors que moi, je suis sa mère» – murmura la belle-mère