Je me suis réveillée avec du bruit et j’ai vu ma belle-mère fouiller dans ma commode.

Je me réveille au bruit et je vois la bellemaman fouiller dans ma commode.
«Maman, ça suffit!», crie Denis, sa voix résonnant dans tout lappartement. «Nous sommes adultes, on se débrouillera tout seuls!»

Célestine sarrête, la cuillère en bois dans la main, le visage figé près du four. Le mari se dispute avec la bellemaman depuis une vingtaine de minutes, et il ny a aucun signe de réconciliation.

«Je suis ta mère!», proclame Madame Jeanne Lemoine, debout au centre de la cuisine, les bras croisés sur la poitrine. «Jai le droit de savoir comment tu dépenses ton argent!»

«Maman, jai trentecinq ans! Jai une femme, un enfant! Questce que ça peut te regarder ce que je gagne et où je le mets?»

«Parce que je vois que quelque chose ne va pas! Hier, je suis passée, le frigo était vide! Célestine nest sûrement pas allée au marché!»

Célestine frissonne en entendant son prénom. Elle se tourne vers la bellemaman.

«Madame Lemoine, le frigo nest pas vide. Je nai tout simplement pas encore eu le temps daller faire les courses, javais prévu de le faire ce soir.»

«Ce soir,», ricane Madame Lemoine avec mépris. «Tu restes à la maison toute la journée et tu ne sais même pas acheter les produits de base!»

«Je ne reste pas à la maison, je suis en congé maternité! Manon na que huit mois!»

«À mon époque, on restait au foyer, mais on tenait la maison en ordre! Et on faisait du pot-aufeu pour le mari tous les jours!»

Denis passe la main sur son visage.

«Maman, sil te plaît, ne recommence pas.»

«Je ne commence pas, je dis la vérité! Regardela, toute échevelée, en peignoir depuis le petitdéjeuner!»

Les joues de Célestine rougissent. Elle porte effectivement un peignoir, les cheveux en queue de cheval négligée. Mais ce nest pas étonnant: depuis le matin, elle a nourri la petite, lavé le linge, étendu le linge, préparé le petitdéjeuner. Elle na plus de temps pour elle.

«Madame Lemoine, peutêtre devriezvous rentrer chez vous? Vous avez sûrement des choses à faire.»

«Jai des choses à faire: surveiller mon fils! Sinon je naurais pas été élevée comme ça!»

«Maman, ça suffit, partez!», saisit Denis le poignet de sa mère. «Sil vous plaît, ne compliquez pas les choses.»

Madame Lemoine arrache la main, saisit le sac posé sur la table.

«Très bien, je men vais! Mais sache, Denis, je vois ce qui se passe sous ce toit! Et tôt ou tard, tu comprendras tout toimême!»

Elle sort, claquant la porte bruyamment. Denis reste debout au milieu de la cuisine, haletant lourdement.

«Pardon, Célestine,», ditil, épuisé. «Elle ma harcelé toute la matinée, puis elle est arrivée sans prévenir.»

«Ce nest rien,», répond Célestine en retournant à la cuisinière. «Je my suis habituée.»

Mais shabituer était impossible. Madame Lemoine simmisce dans leur vie depuis le jour du mariage. Elle critique tout: la façon dont Célestine cuisine, nettoie, shabille, élève lenfant. Elle débarque sans prévenir, inspecte le frigo, fouille dans les armoires.

Denis défend sa femme, mais timidement. Cest sa mère, il ne peut pas se fâcher ouvertement. Et Célestine supporte. Que pouvaitelle faire dautre?

Ils sont mariés depuis quatre ans. Ils se sont rencontrés au travail, au service comptable dune usine parisienne. Denis était chef de service, Célestine simple comptable. Il la courtisait, lui offrait des fleurs, lemmenait au restaurant. Elle est tombée amoureuse, pour la première fois.

La bellemaman ne la jamais appréciée. Dès le premier rendezvous, elle la passée au crible de la tête aux pieds et a lancé: «Eh bien, Denis a choisi une fille modeste. Jespérais autre chose.» Ce «autre» reste un mystère pour Célestine.

Après le mariage, les reproches commencent. Madame Lemoine arrive avec des inspections, trouve de la poussière dans les coins, une soupe soussalée, de la vaisselle non lavée. Elle donne des leçons de vie, explique comment aimer son mari, comment tenir un foyer.

Denis réagit dabord, puis shabitue. Il lève les yeux au ciel: «Maman, rien ne peut être changé, ne fais pas attention.»

Mais comment ignorer quand la bellemaman appelle chaque jour? Elle demande ce quon prépare pour le dîner, ce que le mari mange, pourquoi il a lair fatigué. Elle insinue que Célestine est une mauvaise épouse, quelle ne prend pas soin du mari.

Quand Célestine tombe enceinte, la situation empire. Madame Lemoine contrôle chaque geste: ce quelle mange, quels compléments elle prend, à quelle fréquence elle voit le pédiatre. Après la naissance de Manon, elle emménage presque chez eux: elle vient chaque jour, enseigne comment changer la couche, nourrir, bercer.

Célestine endure, pour Denis, pour la famille. Mais ses forces sépuisent.

Le soir, quand Manon sendort enfin, Célestine sallonge sur le canapé avec son mari.

«Denis, cest dur,», avouetelle. «Ta mère ne connaît aucune limite.»

«Je sais,», il la serre contre ses épaules. «Mais que faire? Elle est seule, elle sennuie.»

«On peut sennuyer sans envahir la vie des autres.»

«Nous ne sommes pas étrangers.Je suis son fils.»

«Et moi?»

Denis pousse un soupir.

«Célestine, ne nous disputons pas.Je suis fatigué aujourdhui.»

Célestine reste silencieuse. Il est épuisé. Et elle? Elle a passé la journée avec lenfant, à cuisiner, nettoyer, laver. Puis la bellemaman, toujours avec ses exigences. Mais Denis na pas le temps de sen occuper, il a son travail, son stress.

Elle se lève, retourne à la cuisine, finit le dîner refroidi, fait la vaisselle, vérifie que Manon dort paisiblement, puis revient à la chambre.

Denis dort déjà. Célestine se glisse à côté, se couvre dune couverture. Elle ferme les yeux, mais le sommeil ne vient pas. Elle repense à la bellemaman, à ses mots tranchants, à la certitude quelle reviendra demain.

Au petit matin, Célestine se réveille au bruit. Elle ouvre les yeux: il fait encore noir dehors. Elle regarde lhorloge: six heures et demie. Quel bruit?

Elle écoute. Depuis la chambre, on entend un léger froissement, comme quelquun qui feuillette des papiers ou trie des objets. Manon? Non, elle dort encore dans son berceau. Denis? Il dort, immobile à côté delle.

Célestine se redresse sur son avantbras. Le bruit provient du commode dans le coin de la chambre, où elle garde vêtements, documents, bricoles.

Dans la semiobscurité, une silhouette se dessine. Une silhouette féminine, penchée sur le tiroir ouvert, manipule des affaires.

Célestine reste figée, incrédule. Qui estce? Comment estelle entrée dans lappartement?

La silhouette se tourne, et à la lumière dun réverbère qui perce les rideaux, Célestine reconnaît le visage de Madame Lemoine. La bellemaman fouille dans son commode à six heures du matin, dans leur chambre.

Célestine sassied, les yeux rivés sur elle, le cœur battant. Que se passetil? Que faitelle ici?

Madame Lemoine sort quelque chose du tiroir, le porte à ses yeux, lexamine, puis le remet, continue de fouiller.

«Madame Lemoine?», forcetelle la voix. «Que faitesvous?»

Madame Lemoine se retourne brusquement. Un instant, une étincelle de peur apparaît dans ses yeux, puis elle retrouve son air impassible.

«Ah, vous êtes réveillée,», ditelle comme si de rien nétait. «Je ne voulais pas vous réveiller.»

«Questce que vous faites dans mon commode?», sélève Célestine, se levant.

«Je cherchais des mouchoirs. Le nez est bouché, jai envie de me moucher.»

«Des mouchoirs sont à la cuisine, pas dans la chambre.»

«Je ne le savais pas,» claque Madame Lemoine le tiroir. «Jai décidé de chercher.»

Célestine sapproche, la regarde droit dans les yeux.

«Comment êtesvous entrée dans lappartement?»

«Jai les clés. Denis me les a données quand Manon est née, au cas où.»

«Et vous avez pensé venir à six heures du matin?»

«Je me lève tôt. Je voulais aider avec la petite pour que vous puissiez dormir.»

«Aider en fouillant mes affaires?»

Madame Lemoine se redresse, adoptant une posture de défi.

«Je ne fouillais pas! Jai dit que je cherchais des mouchoirs.»

«Quels mouchoirs? Vous êtes dans mon tiroir à sousvêtements!»

«Vous vous autorisez à me parler ainsi?»

Denis bouge dans le lit, ouvre les yeux.

«Que se passetil?», marmonnetil, à moitié endormi.

«Demande à ta mère!», sécrie Célestine, la colère montant. «Elle est venue à six heures et fouille mes affaires!»

Denis se redresse, se frotte les yeux.

«Maman? Que faistu ici?»

«Je voulais aider,» feintelle linsoucieuse. «Et maintenant on maccuse de vol!»

«Je nai jamais dit que vous étiez voleuse! Je demandais juste ce que vous faisiez dans mon commode!»

«Je cherchais des mouchoirs!»

«Quels mouchoirs?! Vous croyez que je suis idiote? Vous êtes venue exprès pour fouiller mes affaires!»

Manon, dans la pièce voisine, se met à pleurer, réveillée par les cris. Célestine attrape sa fille, la berce.

«Chut, mon petit soleil,» chuchotetelle, la calmant. «Tout va bien.»

Dans la chambre, la dispute continue. Denis interroge sa mère, elle se justifie. Célestine entend des bribes.

«Denis, je suis vraiment juste venue aider»

«Maman, pourquoi fouiller le commode?»

«Je ne fouillais pas! Elle invente.»

Célestine revient avec Manon dans la chambre.

«Denis, je ne mens pas. Je me suis réveillée et jai vu votre mère trier mes affaires dans le commode. Cest vrai.»

«Célestine exagère,» proteste Madame Lemoine, sasseyant au bord du lit. «Je cherchais vraiment des mouchoirs. Je suis allée dans la chambre, jai pensé les trouver sur la table de nuit, je nai pas trouvé, jai ouvert le tiroir. Voilà tout.»

«Dans le tiroir, il y a mes dessousvêtements!», sécrie Célestine, incrédule. «Quel rapport avec des mouchoirs?»

«Je nai pas vu dans le noir!»

«Vous mentez! Vous êtes venue exprès pour fouiller mes affaires! Questce que vous cherchiez?»

Madame Lemoine se lève brusquement.

«Je ne cherchais rien! Vous êtes simplement mal élevée, vous inventez tout!»

«Maman, calmezvous,» intervient Denis, se plaçant entre eux. «Célestine, vous aussi. Manon pleure, vous la faites peur.»

«Je ne la fais pas peur! Cest votre mère qui envahit la maison à six heures du matin!»

«Je nai pas forcé la porte, jai les clés!»

«Les clés sont pour les urgences, pas pour espionner!»

«Je nespionne pas!»

«Ça suffit!», hausse la voix Denis. «Silence, vous deux!»

Manon pousse un cri plus fort. Célestine serre sa petite contre elle, quitte la chambre, se dirige vers la cuisine, prépare un biberon, les mains tremblantes.

Que sestil passé? La bellemaman a vraiment fouillé ses affaires. Pourquoi? Questce quelle cherchait?

Denis entre dans la cuisine pendant que Célestine nourrit Manon.

«Annie, maman est partie,» ditil.
«Très bien,» répondelle.
«Elle voulait vraiment aider.»

Célestine lève les yeux vers son mari.

«Tu crois vraiment à cette histoire de mouchoirs?»
«Peutêtre, elle cherchait vraiment.»

«Denis, dans le commode, il y a mes sousvêtements, pas des mouchoirs!»

«Bon, cest sombre, je nai pas vu.»

«Il ny avait pas dobscurité, il faisait déjà laube!»

Denis boit de leau.

«Annie, ne faisons pas dun grain de sable un éléphant. Elle a juste»

«Quoi? Elle sest introduite dans notre appartement à laube et a fouillé mes affaires? Cest normal?»

«Ce nest pas une intrusion, jai les clés.»

«Alors retirelui les clés!»

«Pourquoi?Si jamais il se passe quelque chose, elle pourra venir.»

«Je ne veux pas quelle envahisse mon espace!»

Denis soupFinalement, ils établirent des limites claires, rendirent les clés à leur place et, en acceptant leurs différences, reconstruitèrent une vie familiale plus sereine.

Оцените статью
Je me suis réveillée avec du bruit et j’ai vu ma belle-mère fouiller dans ma commode.
Dans l’ascenseur ensemble