Un camarade de classe fortuné lors de la réunion d’anciens élèves

Cher journal,

Aujourdhui, je me suis rendu au rassemblement de mes anciens camarades du lycée. Trente années sétaient écoulées depuis nos dernières retrouvailles, et le temps avait filé à toute allure. Après le bac, jai quitté ma ville natale de Lille pour poursuivre des études à Paris, dabord à luniversité, puis directement dans le monde du travail. Plus tard, désireux daugmenter mes revenus, jai créé ma propre société. Le chemin fut ponctué de succès et de revers, mais jai toujours gardé en tête les visages de ceux qui ont partagé mes bancs.

Dans les moments de solitude, je feuillette leurs photos sur les réseaux sociaux, et je partage les miennes à mon tour. Parmi eux, cest surtout Élodie qui revient sans cesse à mon esprit. Au lycée, je laimais secrètement, mais elle ne ma jamais remarqué ; le studieux que jétais ne suffisait pas à éveiller son intérêt. Le dernier jour où je lai approchée avec un bouquet, elle a sauté sur la selle de la moto dAdrien, sans même jeter un regard au bouquet, et a filé en soulevant la poussière. Depuis, je nai plus osé men approcher.

Je nai jamais eu de grands amis dans cette promotion, car jai toujours préféré les révisions aux bavardages. Je ne me suis lié quà quelques camarades qui suivaient avec moi les cours de maths de soutien, afin de préparer le concours dentrée à lécole dingénieurs. Ce matin, je suis arrivé à la réunion le sourire aux lèvres, le cœur léger, et jai apporté un petit présent à chacun, sans en oublier aucun.

Nous nous sommes installés dans un petit café du centre-ville, autour de tables en bois, et les rires ont fait vibrer la salle. Nous évoquions nos souvenirs, nos professeurs, les fêtes de la fin dannée. Mon regard, toutefois, restait fixé sur Élodie, qui, comme à son habitude, semblait distante, le téléphone collé à loreille. Après le lycée, elle sest mariée avec Adrien, mais ils ne vivent plus ensemble depuis longtemps. Jai découvert quelle élève seule un petit garçon atteint dune maladie chronique.

Je me suis résolu à entamer la conversation, espérant la soutenir. Sa réponse fut pourtant un torrent damertume.

« Vous vivez dans votre grande maison et vous ne comprenez rien à nos soucis ! Jai vu votre demeure, votre femme qui ne travaille pas, les salons de beauté où elle traîne. Vous avez des domestiques, vous ne les montrez jamais en photo. Vous avez des enfants qui étudient à létranger, alors que moi je moccupe dun fils malade. De quoi parler ? Vous ne pourriez jamais comprendre. »

« Élodie, suisje vraiment responsable de tes problèmes ? »

« Dans notre pays, il manque dargent pour les enfants malades, et des gens comme vous senrichissent sur ces fonds, avares ! »

Ces paroles me brûlaient, car le sujet me touche profondément. Jai tenté de répondre.

« Combien denfants malades avezvous aidés, Élodie ? »

« Moi-même je suis malade! Et parfois jenvoie des SMS pour demander de laide. »

« Moi, je verse régulièrement de grosses sommes à des associations, sans jamais en faire étalage. Alors, qui de nous deux est le plus utile ? »

« Ce nest rien pour vous, vous ne perdez pas cent mille euros. Ma contribution, je la fais en me privant de mon propre pain. Vous savez comment je gagne de largent ? Chaque matin, je prends deux bus pour aller travailler et je touche à peine assez pour couvrir les factures. »

Les autres clients nous observaient. Certains hochaient la tête en faveur dÉlodie, dautres restaient silencieux.

Après la discussion, je suis parti. Sur la table près de la porte, jai laissé les cadeaux pour les camarades et jai demandé au serveur dapporter une enveloppe à Élodie. En marchant, je pensais à nos chances égales. Tous avaient les mêmes talents, mais javais choisi les études au lieu de boire une bière sur le terrain, javais préféré les livres à la fumette derrière le coin, javais opté pour luniversité plutôt que le lycée professionnel. Javais pris des risques, quitté ma zone de confort, et lancé ma propre entreprise.

Le parcours fut semé dépreuves, mais chaque chute ma enseigné quelque chose. Je nai jamais volé largent de qui que ce soit; je lai mérité avec mon travail. Peutêtre estce injuste que certains jugent mon succès alors que leurs propres vies les mènent différemment.

Combien dentre vous connaissent des personnes comme Élodie ou mes anciens camarades, qui comptent sur largent des autres? Certains ont eu la chance de naître dans des familles aisées, dobtenir une bonne éducation. Dautres, issus de milieux modestes, ont bâti leur destin avec leurs propres mains. Tout dépend de nos choix, et chaque main peut façonner son propre avenir.

Je referme ce journal avec lespoir que, malgré les divergences, la bienveillance finira par lemporter.

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