Belle-mère : Secrets, Conflits et Amour dans une Famille Française

**Journal Intime de Geneviève**

Geneviève Moreau était une belle-mère née. Pas une belle-mère réservée et distante, non, une vraie *belle-mère*autoritaire, têtue, bruyante. Sa mère, Ludivine, racontait en tremblant à ses amies ses premières impressions de sa fille nouveau-née :
Elle était là, dans son berceau, déjà fâchée, les sourcils froncés, les poings serrés Une vraie belle-mère en puissance.

Heureusement, la propre belle-mère de Ludivine, Valérie, vivait dans la région voisine et ne venait que rarement. Mais quand elle débarquait, toute la boulangerie où travaillait Ludivine le savait. La pâte ne levait plus, elle confondait vanille et sucre, les gâteaux sortaient tout de travers, et la pauvre pâtissière sursautait au moindre bruit.
Écoute, prends tes jours de congé, lui dit un jour sa patronne, excédée. Tu reviendras quand elle sera partie.
Mais, madame Charbonneau, je vous en supplie ! sécria Ludivine, arrachant sa toque. Au moins, ici, je lui échappe. Sinon, je devrai lécouter toute la journée et mexcuser pour tout.
Texcuser pour quoi ?
Pour tout ! Ma cuisine, mon ménage, la façon dont je moccupe de son fils Madame, même mes rideaux ne sont pas tirés comme il faut !
Et comment faudrait-il ?
Je ne sais pas. Mais pas comme ça !

Quand Geneviève naquit, Valérie arriva aussitôt pour « aider ». Elle exigea le prénom Geneviève, en hommage à sa défunte mère, fit baptiser le bébé malgré les réticences des parents, terrorisa la pédiatre et réduisit sa bru à un état de nerfs avant de repartir, convaincue que cette idiote mènerait lenfant à sa perte.
Ludivine pleura pendant une semaine. Son mari, Guillaume, puisa dans ses économiesdestinées à un bateaupour lui offrir un pendentif en or.

Contre toute attente, lenfant survécut et grandit même remarquablement. Geneviève marcha tôt, fut propre rapidement et parla clairement, avec une logique déconcertante. À lâge des « pourquoi », elle déconcertait tout le monde :
Quest-ce que tu aimes ? Cest quoi, être gentil ? Pourquoi on sourit ?
Les amis de Ludivine et de Guillaume, des gens simples, ne savaient que répondre et lui prédisaient un grand avenir.

Et puis, elle régla le problème de sa grand-mère en un clin dœil.
Un jour, Valérie débarqua et, cinq minutes plus tard, hurlait à propos du nouveau canapétrop clair, pas pratique. Geneviève, cinq ans, écouta, puis attrapa les valises de sa grand-mère et les traîna vers la porte.
Où tu vas avec mes affaires ? sindigna Valérie.
Tu es venue sans amour. Tu cries sur maman. Pars.
Vous montez lenfant contre moi ! glapit la vieille femme.
Mais Geneviève lui fourra sous le nez une poupée offerte quelques minutes plus tôt et déclara :
Reprends-la. Je nen veux pas. Et apprends à te comporter.
Eh bien, maman, tas vu ? rigola Guillaume. Geneviève ne plaisante pas. Un jour, jai un peu trop bu avec les copains, elle ma passé un savon pendant une semaine !

Dès lors, Ludivine gardait Geneviève à la maison quand Valérie venait. La grand-mère repartait souvent sans avoir pu dire tout ce quelle avait en tête.

À lécole, Geneviève simposa naturellement. Déléguée de classe, jeune pionnière, elle faillit obtenir son bac avec mention. Seule la littérature lui résista.
Les lièvres ne parlent pas. Cyrano ne pouvait pas parler en rimant aussi vite. Et Rousseau ? Un radoteur ennuyeux.
Même scepticisme envers le chant, le dessin et le sport. En revanche, en sciences, elle brillait.

Ses professeurs lui conseillèrent une grande école, mais elle choisit lenseignement à distance. Sa mère était souvent malade, et Valérie, maintenant septuagénaire, réclamait des visites. Puis, Damien, le fils du contremaître de lusine, revint de larmée. Il la vit en robe bleue, le jour du bal de fin dannée, et en resta bouche bée.
Geneviève, tu es sublime !
Bah, cest normal, rétorqua-t-elle, ajustant sa robe. Le jour de mon mariage, je serai carrément une reine.
Compris ! sexclama-t-il. Je vais demander à ma mère de me faire un costume en velours.
Très bien. Mais pas noirbleu, ou gris. Ça fait plus classe.

Sans jamais parler damour ni même sembrasser, ils planifièrent méticuleusement leur mariage, leur voyage de noces et les prénoms de leurs futurs fils. Ils partirent ensemble pour la ville voisineGeneviève pour une session universitaire, Damien pour reprendre ses études. Ils revinrent, déposèrent les papiers. Et hop. Un fils naquit, Alexandre. Puis deux autres garçons, à un an dintervalle, après quelle eut obtenu son diplôme.

Geneviève gravit rapidement les échelons, dépassant même son mari. Damien, bien que charmant, manquait cruellement dambition. Elle travaillait dur, se formait, intriguait un peu ; lui filait à la pêche dès quil le pouvait, répétant que le temps passé avec une canne ne comptait pas dans une vie.

Organisatrice née, elle savait distinguer les doléances légitimes des caprices. Aujourdhui, on laurait qualifiée de « manager efficace » ; à lépoque, on murmurait « une sacrée femme » ou, pour ceux qui subissaient ses foudres, « une belle-mère en puissance ». Et on plaignait davance ses futures belles.

Puis Valérie tomba gravement malade et mourut. Entre les funérailles, la vente de la maison et le placement de la chèvre (baptisée Ludivine, par ironie), Geneviève ne vit pas le temps passer.

Un jour, ses fils cadets lui présentèrent leurs promises. Vladimir, son portrait craché, amena Alinetimide, fragile, qui cuisinait comme un chef. Geneviève, qui sattendait à dominer cette douce fille, se retrouva à la dorloter, surtout après la naissance de jumeaux.

Quant à Stanislas, le dernier, il prit son temps. À trente ans, il présenta Julieune jeune femme rieuse, incapable de garder son sérieux, même devant les initiales « G.G. » de sa future belle-mère.
Un double « gé » ! pouffait-elle. Stas, comment elle a fait toute sa vie avec ça ?
Leur mariage fut un spectacle : des invités solennels et une mariée hilare, coincée dans ses jupons.

Aujourdhui, tout va bien. Julie et Stanislas ont une petite fille, aussi rieuse que sa mère. Alexandre et sa femme vivent à létranger. Vladimir et Aline sont installés près de lusine.

Et les amies de Geneviève ne comprennent toujours pas :
Qui aurait cru que notre Geneviève, si dure, deviendrait une telle belle-mère ? Ses brus sont en or. Chance ? Ou bien avions-nous mal jugé Geneviève ?

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Belle-mère : Secrets, Conflits et Amour dans une Famille Française
Tout simplement, tu es irrésistible.