À quarante ans, cest le moment idéal !
Maëlle, tu fais quoi là-dedans ? Tu tes endormie ou quoi ? Dépêche-toi, on va être en retard au travail !
Jarrive ! Maëlle tressaillit légèrement en jetant un regard vers la porte de la salle de bains.
Elle savait quelle y restait plus longtemps que dhabitude, mais elle avait ses raisons. Depuis une semaine, elle avait des nausées matinales, et si elle ny avait pas prêté attention au début, maintenant, elle commençait à avoir peur.
Maëlle devinait bien la cause, mais lidée dune grossesse lui faisait trop peur. Elle chassa ces pensées et sortit enfin.
Désolée, murmura-t-elle à son mari en haussant les épaules. Jai eu du mal à me maquiller ce matin.
Mais tu te maquilles dans la chambre, dhabitude ! Théo la regarda avec agacement.
Ah, cest vrai ! Maëlle ne discuta pas.
Elle se précipita dans la cuisine pour préparer le café. Tous deux adoraient ça, mais aujourdhui, lodeur seule la soulevait le cœur.
Tout va bien ? demanda Théo, inquiet.
Oui, je nai juste pas envie de café.
Vraiment ? Tu as fait une drôle de tête. Tu es malade ?
Maëlle se serra les bras, secouée à lidée dun enfant. Théo sapprocha, posant une main sur son front.
Tu nas pas de fièvre Reste à la maison aujourdhui. Appelle le bureau, dis-leur que tu reprendras lundi. On na pas besoin que tu tombes malade en plus Il faut quon finisse de rembourser le prêt.
Une fois Théo parti, Maëlle sassit sur le canapé, perdue dans ses pensées. Elle savait ce quelle devait faire : aller en pharmacie pour confirmer ses doutes. Mais elle redoutait ce moment. Un enfant, cétait une réalité trop lourde.
« Je viens davoir une promotion, Théo a raison pour le prêt, et on rêvait de partir en vacances », songea-t-elle. Autrefois, ils avaient espéré un enfant, surtout après leur mariage, quand tout était encore rose et quils avaient vingt ans. Mais ça navait jamais marché.
Avec le temps, Maëlle avait arrêté dy penser. Elle sétait habituée à leur vie à deux. Théo non plus nen parlait plus. Et maintenant, un bébé allait tout chambouler : les dépenses, les nuits blanches, les bruits
Maëlle gémit. Quelle mauvaise timing.
Pourtant, épuisée par ses tourments, elle se décida à aller en pharmacie. Le test confirma ses craintes : elle était enceinte. Elle posa une main sur son ventre, simaginant déjà quil avait gonflé.
Soudain, un frisson la parcourut. Une petite vie grandissait en elle. Maëlle était partagée entre la peur et une étrange joie.
Tu seras le plus beau des bébés, chuchota-t-elle.
Mais les doutes revinrent. Elle nétait plus si jeune. Et Théo ? Et sil se fâchait ? Sil ne voulait plus denfant ? Lui non plus navait plus vingt ans.
La journée fut longue, rongée par langoisse. Quand Théo rentra, elle demanda simplement :
Tu veux dîner ?
Bien sûr ! Jai une faim de loup !
Il observa Maëlle, intrigué. Elle semblait différente, comme illuminée. Quest-ce qui nallait pas ? Il préféra ne rien supposer de mal et attendre quelle se confie.
Tu te sens mieux ?
Oui, jai dormi un peu. Le bureau ma dit de ne pas minquiéter, de toute façon, cétait une journée courte. Il y a lanniversaire de la boîte demain
Tu y vas ?
Maëlle faillit dire oui, mais se ravisa.
Non, je crois que je vais rester ici. Mieux vaut éviter les risques, non ?
Si tu le dis.
Théo était sûr maintenant : quelque chose clochait. Maëlle, toujours joyeuse, naurait jamais loupé une fête.
Tu ne veux pas fêter ta promotion avec les filles ?
Non, allons nous promener demain, toi et moi.
Théo hocha la tête.
Tu me fais un thé ?
Bien sûr.
Il la regarda saffairer, perplexe. Dhabitude, elle bougeait vite, mais aujourdhui, ses gestes étaient lents, mesurés.
Une seule explication lui vint à lesprit. Son cœur se serra. Il adorait Maëlle, mais elle, visiblement, ne laimait plus.
Il se leva, la voix sourde.
Cest qui, lui ?
Quoi ? Je ne comprends pas !
Lhomme dont tu es amoureuse.
Quoi ? Théo, quest-ce que tu racontes ?
Maëlle semblait sincèrement choquée, mais Théo ny crut pas. Il se dirigea vers la sortie, puis se retourna.
Tu rayonnes, tu danses presque ! Maëlle, je taime, mais si tu as trouvé quelquun dautre tant pis.
Il quitta la cuisine. Maëlle, sidérée, le rattrapa dans lentrée.
Elle avait imaginé annoncer la nouvelle avec poésie, mais il était trop tard.
Théo, je suis enceinte !
Quoi ?
Il revint lentement vers elle, incrédule. Elle prit sa main et la posa sur son ventre.
Il y a ton fils ou ta fille qui grandit là.
Les émotions se bousculèrent sur son visage. Puis il retira sa main et sortit sans un mot.
Maëlle resta là, effrayée, blessée. Elle avait cru quil serait heureux. Au lieu de ça, il avait fui.
Elle retourna dans la cuisine, rangeant machinalement la vaisselle pour ne pas fondre en larmes. Sans Théo, comment élèverait-elle cet enfant ?
Une demi-heure plus tard, alors quelle était assise dans le noir, la sonnette retentit.
Qui est là ?
Ce ne pouvait pas être Théo, il avait ses clés. Elle essuya ses larmes et ouvrit.
Devant elle, un immense bouquet de roses, ses préférées. Et derrière, Théo, souriant.
Tiens, Maëlle !
Il entra, rayonnant.
Pardonne-moi dêtre parti comme ça. Jétais sous le choc. Je suis tellement heureux ! Si cest un garçon, on lappellera Liam, si cest une fille, Élodie. Il faut appeler tes parents, prendre rendez-vous chez le médecin
Il sarrêta, voyant ses larmes.
Pourquoi tu pleures ?
Il la serra contre lui.
Jai cru que tu ne voulais plus de ce bébé Que tu trouvais quà quarante ans, cétait trop tard.
Jamais de la vie, Maëlle ! Je ne te quitterai pas. Et quarante ans, cest justement le bon âge.
Et le prêt ? Ma promotion ? Nos projets ?
Théo soupira, la regardant droit dans les yeux.
Maëlle, crois-moi, un enfant vaut plus que tout ça. On remboursera le prêt. Tu pourras travailler après ton congé Et les nuits blanches, ça ne me fait pas peur.
Maëlle sourit, blottie contre lui. Elle savait quensemble, ils relèveraient tous les défis. À trois.
**La vie nous réserve parfois des surprises là où on ne les attend plus. Et cest souvent là que commence le plus beau des voyages.**
