Il n’est jamais trop tard pour tout récupérer

Il nest jamais trop tard pour tout réparer

Lamour peut parfois vous faire perdre la tête, vous faire tout oublier, jusquà ne plus penser quà lêtre aimé. Cest exactement ce qui est arrivé à Théo, tombé fou amoureux de Mélanie et ayant tout oublié, y compris sa conscience et son devoir filial. Le choix entre le confort et lhonnêteté nest jamais simple.

« Théo, mon chéri, où est-ce quon va vivre ensemble ? » demanda Mélanie dune voix douce en le regardant avec malice.

« Ben chez moi, bien sûr. »

« Mouais mais tu habites encore avec ta mère, non ? » fit-elle en faisant la moue.

« Et alors ? Ma mère est gentille et tranquille, tinquiète pas », rassura Théo, essayant de calmer sa bien-aimée.

Théo nétait plus un gamin, il avait dépassé la trentaine et ce serait son deuxième mariage. Le premier navait pas marché, sa femme et lui étaient trop différents. Elle sétait un peu trompée en le croyant plus argenté, espérant quil se lance dans les affaires. Mais sans capital de départ, il navait pas pu se lancer. Elle était partie, heureusement sans lui laisser denfant.

Théo avait rencontré Mélanie dans un café, un soir où il était sorti boire un verre avec son ami Vincent pour fêter la naissance de son fils. Après quelques verres, ils avaient remarqué cette fille seule, lair triste.

« Mademoiselle, pourquoi cette mine si sombre ? » demanda Théo en souriant, sapprochant de sa table. « Venez plutôt vous joindre à nous, mon ami a une bonne raison de célébrer : son fils pèse presque quatre kilos ! »

Sans trop réfléchir, Mélanie se déplaça à leur table.

« Félicitations », dit-elle en regardant Vincent. « Un fils, cest bien, un héritier. »

Après le café, Vincent rentra chez lui, et Théo raccompagna Mélanie jusquà sa résidence universitaire. Elle travaillait dans une usine textile et vivait non loin. Elle venait dun petit village et avait dix ans de moins que lui. Ce soir-là, il resta chez elle.

Ils se virent souvent, se promenèrent, et sans quil sen rende vraiment compte, Mélanie le poussa doucement vers lidée du mariage et des enfants.

« Théo, tas plus de trente ans et toujours pas denfant, faudrait peut-être remédier à ça avant quil ne soit trop tard », disait-elle en riant. Elle en avait assez du bruit de la résidence universitaire et rêvait dun vrai appartement.

Théo, déjà profondément amoureux, finit par lui faire sa demande.

« Oui, oui, jaccepte ! » sexclama-t-elle, ravie. « Quand est-ce quon va déclarer ça en mairie ? »

« Bientôt. En attendant, viens vivre avec ma mère et moi. »

« Non, Théo, je ne veux pas vivre avec ta mère. Tu sais, jai entendu tellement dhistoires sur les belles-mères et leurs belles-filles Je ne veux pas commencer ma vie comme ça. Louons plutôt un appartement à nous. »

« Mais, ma chérie, je ne peux pas me permettre de payer un loyer. Avec mon salaire, il ne nous resterait presque rien pour vivre. Bon, on trouvera une autre solution. »

Élisabeth était assise à la fenêtre de la cuisine, contemplant les premiers flocons de neige tomber lentement. Elle ne se sentait pas bien. À la retraite après avoir enseigné les mathématiques pendant des années, elle aurait aimé continuer, mais sa santé ne le permettait plus. Elle avait même été hospitalisée plusieurs fois en urgence.

Ce jour-là, Théo rentra à la maison avec Mélanie. Ils sétaient déjà rencontrés, la jeune femme était venue deux ou trois fois, mais elle ne cherchait jamais à parler à Élisabeth. Elle se contentait dun bonjour avant de disparaître dans la chambre de Théo, doù son rire résonnait souvent. Quand elle partait, elle ne disait jamais au revoir à Élisabeth, ne la regardant même pas.

« Maman, Mélanie et moi avons décidé de nous marier, alors elle va vivre ici », commença Théo avant dhésiter. « Et elle ne veut pas que tu restes avec nous. Jai pris des renseignements, on va temmener dans une maison de retraite. Les conditions sont bonnes, il y a des médecins sur place Tu comprends, maman, on a besoin dintimité. »

Dans ce monde, tout peut devenir cruel. On peut parfois balayer dun revers de main ses parents vieillissants, après tout, il y a des maisons de retraite. On peut oublier ses proches, plongé dans le confort de sa vie. On peut oublier la dette envers ceux qui ont veillé des nuits entières, qui ont tout donné et cru en leur enfant. Théo ny avait pas pensé.

« Je comprends, mon fils », murmura sa mère, sentant quelque chose se briser dans sa poitrine.

Elle fit ses valises, rassemblant ses modestes affaires dans une vieille malle, et son fils lemmena dans une maison de retraite, loin de la ville.

Désormais, toute la vie dÉlisabeth se résumait à cette petite chambre, où elle restait assise à la fenêtre, jour après jour. Sur sa table de chevet trônait une photo usée de son fils, le seul souvenir de sa vie davant.

Au fond delle, une lueur despoir persistait : peut-être que son fils viendrait la chercher. Elle était devenue veuve à trente-six ans et avait élevé seule son petit Théo. Sa vie navait tourné quautour de lui, travaillant deux emplois pour quil ne manque de rien.

« Mon petit Théo », murmurait-elle souvent en regardant la photo, les larmes aux yeux.

Le temps passa, mais Théo ne venait pas. Avec Mélanie, la vie était joyeuse, mais moins de six mois plus tard, elle rentrait souvent ivre, sattardant on ne sait où.

« Mélanie, je ne comprends pas, où est-ce que tu traînes alors que ton mari tattend à la maison ? »

« On sort entre filles après le boulot, cétait lanniversaire de Sandrine », répondait-elle avec désinvolture, sans se soucier de lui.

« Je me suis marié pour avoir une épouse, pas une femme qui court les rues. »

« Oh, arrête de me faire la morale, cest trop tard pour me changer. Et puis, tes pas mort de faim, tu sais cuisiner », ricanait-elle avant daller se coucher.

Un an plus tard, Théo divorça et se souvint enfin de son devoir filial.

« Mon Dieu, cest la punition divine Jai envoyé maman au loin sans même minquiéter delle »

Un jour, dans le silence de sa vie confortable, la voix de sa conscience se fit entendre. Théo finit par lentendre. Un après-midi, alors quÉlisabeth était assise dans son fauteuil usé, contemplant le ciel gris par la fenêtre, la porte de sa chambre souvrit brusquement.

« Maman »

Elle se retourna et nen crut pas ses yeux. Cétait son fils, amaigri, avec des cernes sombres sous les yeux.

« Théo, quest-ce qui tarrive ? Tu es malade ? » demanda-t-elle, effrayée, oubliant instantanément toutes ses blessures.

« Maman, pardonne-moi Je naurais jamais dû », sa voix tremblait. « Maman, jai été un salaud, je tai trahie Sil te plaît, pardonne-moi »

Il tomba à genoux devant elle.

« Mélanie elle nétait pas celle que je croyais. Elle voyait dautres hommes, ne pensait quà sortir. Elle a arrêté de travailler, parfois même, elle ne rentrait pas Enfin bref, elle est partie avec un autre. Jai demandé le divorce. »

Élisabeth écouta en silence, caressant doucement la tête de son fils.

« Maman, je tai abandonnée pour elle Pardonne-moi. Comment ai-je pu » Il pleurait, serrant ses épaules frêles.

« Ce nest rien, mon fils. Tu es revenu, tu as compris. Cest lessentiel. »

« Prépare tes affaires, maman. Je te ramène à la maison tout de suite. »

Élisabeth retrouva son appartement, où flottait encore un léger parfum féminin, et ils recommencèrent à vivre ensemble. Théo fit tout pour se racheter.

« Maman, regarde ce que je tai acheté », disait-il en rentrant du travail, lui offrant des cadeaux. « Cette couverture te sera bien utile. » Puis, une fois, cétait un pull douillet, une autre fois, un oreiller ergonomique.

« Mon fils, tu nas pas besoin de dépenser autant », murmurait-elle tendrement en acceptant ses présents.

« Maman, je veux que tu sois bien. Tu as vécu pour moi toutes ces années. Je suis heureux davoir compris à temps. Maintenant, tout ira bien », disait-il avec fermeté. « Jai changé de travail, mon salaire est bien meilleur. Avec le temps, on pourra même acheter un plus grand appartement, avec une chambre rien que pour toi. »

« Mon fils, je suis si heureuse pour toi. Merci pour ton attention Mais tu dois te remarier, ne vis pas seulement pour moi. Tu as besoin dune famille. Cest la vie »

« Daccord, maman, ne tinquiète pas. Dailleurs, je vais te présenter Aurélie. On se voit depuis deux mois. »

Le soir suivant, Théo rentra avec Aurélie, lui tenant la main.

« Bonjour, Élisabeth », dit la jeune femme avec douceur. Elle avait un regard chaleureux et des yeux gris pleins de bonté. « Je vous ai apporté une tarte aux pommes, je lai faite moi-même. »

« Oh, ma chérie, cest trop gentil, tu naurais pas dû »

« Ce nest rien », sourit Aurélie pendant que Théo sortait les tasses à thé.

Lorsque Théo raccompagna Aurélie et revint, Élisabeth demanda :

« Mon fils, est-ce quAurélie accepte que je vive avec vous ? »

Il sembrouilla un peu.

« Mais bien sûr, maman ! Quand je lui ai raconté lhistoire de la maison de retraite, honnêtement, elle a failli me tuer. Elle ma tellement fait honte Jai préféré lui dire moi-même plutôt quelle lapprenne ailleurs. Je noublierai jamais cette faute. »

Pour la première fois, Élisabeth sentit une douce chaleur dans son cœur. Tous les êtres ne sont pas perdus, il y a encore des gens bons sur cette terre. Bientôt, ils prirent lhabitude de boire le thé ensemble, accompagné des tartes aux pommes ou aux cerises quAurélie préparait. Ils vivaient à trois, dans une atmosphère tendre et chaleureuse.

Et quand Élisabeth sendormait parfois dans son fauteuil, Aurélie la couvrait doucement avec une couverture, tandis quelle murmurait :

« Merci, ma fille. »

Théo comprit enfin ce quétait le vrai bonheur : un foyer, ce ne sont pas les murs, mais ceux qui tattendent, quoi quil arrive.

Un soir, pendant le dîner, Aurélie leur fit une annonce joyeuse :

« Maman, Théo On va avoir un bébé. Je suis enceinte », dit-elle, un peu nerveuse.

« Mon Dieu, jai tant attendu ce moment », pleura Élisabeth, émue. « Quelle joie, ma petite Aurélie Je suis si heureuse Mon fils, et toi ? »

Théo ne croyait pas à son bonheur. Lui aussi rêvait denfants depuis longtemps, tous ses amis en avaient déjà. Enfin revenu à lui, il bondit vers sa femme et létreignit.

« Aurélie, tu es merveilleuse, je taime tant »

« Toi aussi, tu es merveilleux », rit-elle, rayonnante.

Cette nuit-là, Théo eut du mal à sendormir.

« Comme cest beau de pouvoir réparer ses erreurs. Tant que maman est là, il est toujours possible de retrouver ce quon a perdu, de demander pardon, et de redevenir une famille. »

Le temps passa. Aurélie donna un petit-fils à Élisabeth et un fils à Théo. Ils étaient heureux dentendre enfin des rires denfant dans lappartement. Deux ans plus tard, ils emménagèrent dans un plus grand logement, avec une chambre denfant et une pièce rien que pour Élisabeth.

Merci davoir lu cette histoire. Que la vie vous apporte bonheur et douceur !

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