La belle-mère se souvenait parfaitement de sa conversation avec cette femme désagréable, devenue lépouse dÉtienne. Elle avait pourtant tout fait pour dissuader son fils chéri de se marier. Mais rien ny avait fait Du moins, au début. Et puis, cette provinciale sans éducation se permettait trop de libertés.
Écoutez, Irène. Pourquoi jouez-vous à la mère sage ? Je vois bien que vous ne me supportez pas. Tout simplement parce que je vous vois à travers et que je ne compte pas me plier à vos caprices. De quel droit venez-vous chaque soir dans notre appartement sans demander ? Nous ne vivons pas à vos crochets, avait lancé cette insolente à la mère dÉtienne.
Quoi ? Tu oses me faire la leçon ? Attends davoir mon âge Irène commençait à séchauffer. Son apparente douceur et son vernis délégance sétaient envolés.
Elle redevenait en un instant ce quelle était vraiment : une petite bourgeoise bornée, dont le seul but dans la vie était de vivre douilletement, sans se soucier de ceux quelle écrasait sur son chemin. Chacun pour soi, nest-ce pas ?
Irène, Étienne et moi nous aimons. Et jai remarqué que vos conversations lui font du mal. Vous avez déjà chassé son père et convaincu celui-ci de vous céder sa part de lappartement Maintenant, vous voulez aussi gâcher la vie de votre fils ? Si vous ne laimez pas, laissez-le au moins avoir une chance dêtre aimé par une autre, déclara cette effrontée de Camille.
Ah, voilà comment tu chantes ! Eh bien, je vais te dire tes quatre vérités, petite pécore ! Qui es-tu, dabord ? De quel trou perdu viens-tu ? Tu nes personne. Un jour, tu perdras ton travail, et tu finiras à la rue. Pauvre comédienne ! Et tu oses me donner des ordres ? explosa Irène.
Ah, cest comme ça que vous mesurez la dignité humaine ? Camille ne cédait pas. Donc, si vous avez volé un appartement et mis tout le monde dehors, vous êtes une dame respectable ? Mais si je gagne ma vie honnêtement, cest mal. Tout le monde na pas eu la chance de saccrocher à un mari avec un logement pour ensuite le dépouiller ! Et pour votre information, je sais très bien que vous aussi, vous nêtes pas née à Paris. Camille venait de toucher le point sensible.
Irène était effectivement arrivée dun petit village des années auparavant, sans éducation ni métier.
Tu ne seras jamais avec mon fils ! Une mère, cest sacré ! Sors dici ! Irène, à court darguments, sortit son ultime carte, contre laquelle il était difficile de discuter.
Camille se contenta de ricaner et ne répondit plus. Cependant, cette dispute neut aucun impact sur le couple. Étienne et Camille se marièrent malgré tout.
Mais Irène ne baissa pas les bras. Lorsque Camille mit au monde leur petit garçon, elle semploya à monter son fils contre sa femme. Finalement, ils divorcèrent Leur fils, Alexis, navait que quatre ans
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Pourtant, la mère dÉtienne redoutait toujours que son fils ne retourne vers cette effrontée de comédienne. Elle savait quil la voyait parfois, et quil leur versait une pension.
Ce quelle ignorait, cest quÉtienne et Camille continuaient de vivre ensemble et délever Alexis. Pendant quIrène croyait son fils parti travailler dans une autre ville
Ce plan ingénieux nétait pas seulement dû à la méchanceté dIrène. Avant son mariage, Étienne sétait mis dans de sales draps, accumulant des dettes. Bien avant leur faux divorce.
Camille, il faut lui rendre justice, lavait mis en garde contre son associé.
Étienne, où vas-tu te fourrer ? Ce Vincent est un requin. À côté de lui, tu nes quun pigeon naïf. Ne tembarque pas là-dedans. Dès que je lai vu, jai compris quil te broierait sans remords, lui avait-elle dit.
Allons, Camille, exagère pas. Vincent est un bon gars. Entre hommes, on doit se serrer les coudes. Cest lui qui a raison. Cest comme ça quon tient debout
Je te le répète, Vincent veut juste tutiliser. Il sait que tu crois à la fraternité masculine. Quand comprendras-tu que lhonnêteté na pas de genre ? rétorqua-t-elle.
Il navait pas insisté et avait fait à sa tête. Erreur. Vincent lavait nommé directeur dune entreprise fictive, avant de tout siphonner, ne lui laissant que les dettes et disparaissant sans laisser de trace
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Il aurait mieux valu quil reste fonctionnaire, avec un salaire modeste mais stable, plutôt que de plonger sa famille dans le rouge.
Alors, avec Camille, ils avaient échafaudé ce plan pour régler deux problèmes dun coup.
La mère dÉtienne était contente du divorce. Et Camille et Alexis échappaient aux créanciers
Officiellement, Étienne logeait dans un foyer dentreprise, où il avait été réintégré. Le soir, il retrouvait sa femme et son fils dans un petit nid douillet.
Étienne était heureux. Mais il devait quand même rendre visite à sa mère une fois par mois, sous prétexte de voyage professionnel. Et celle-ci ne cessait pas de lui présenter des prétendantes avantageuses.
Et si tu disais tout à ta mère ? Les dettes et nous ? proposa Camille.
Non Ça la détruirait. Il faut trouver une autre solution soupira Étienne.
Mais laquelle ? On ne peut pas vivre cachés éternellement ! Quelle vie de clandestins ! sexclama Camille.
Elle ne voyait pas dissue. Elle survivait avec des petits boulots, tandis que le salaire dÉtienne partait en remboursements.
Ils étaient presque dans la misère. Et aucune solution ne se présentait. Parfois, Étienne suggérait de le quitter Mais Camille laimait.
***
Camille, tu ne peux pas lentretenir indéfiniment ! Tu nas rien à toi, que des problèmes. Tu paies cette chambre de ta poche, tu le nourris Pourquoi fais-tu ça ? Vous nêtes même plus mariés ! La mère de Camille, une simple institutrice, était prête à les accueillir, elle et son petit-fils, dans son deux-pièces. Mais sans Étienne.
Maman, tu sais combien je laime Nous avons un fils. Je ne peux pas labandonner ! expliqua Camille une fois de plus.
Sa mère, qui lavait élevée seule, sinquiétait. Elle pensait quun ultimatum ferait plier sa fille. Mais rien ny fit Alors, un plan germa dans son esprit
***
Alors, Irène Voilà la situation, la mère de Camille, Odile, était venue exprès de sa province pour parler en secret à la belle-mère.
Il a des dettes ? Et mon fils vit toujours avec elle ? Et il ma menti ? Lindignation dIrène était à son comble.
Oui, et figurez-vous que ma fille laide avec ses maigres économies, le nourrit, paie le loyer Je me suis dit quil fallait vous en parler. Bien que Camille me lait interdit !
Et en plus, il prétend travailler ailleurs Quel vaurien ! semporta Irène.
Alors, quallons-nous faire ? Nous sommes laînée. Il faut les aider !
Mais comment ?
Mettre nos économies en commun Les miennes sont modestes, mais pour ma fille et mon petit-fils Odile proposa une contribution égale, pour
