**Journal de Pierre 12 juin 2023**
Ce matin, la porte de la maison accueillante de Claudette sest ouverte brusquement. Sur le seuil se tenait une jeune femmegrande, élégante, avec des yeux perçants et un regard audacieux. Claudette la reconnue immédiatement : cétait Élodie, sa nièce cadette, quelle avait laissée à lorphelinat des années auparavant.
Tante ! dit-elle dun ton sec, les bras croisés. Je tai cherchée longtemps. On ma dit que tu vivais ici.
Sa voix était assurée, son regard glaçant. Claudette lui proposa dentrer, un thé peut-être, mais Élodie refusa, préférant rester plantée au milieu du salon.
Tu te souviens de moi ? demanda-t-elle sans détour. Je mappelle Élodie. La petite fille que tu as abandonnée.
Claudette hocha la tête, le cœur serré par les souvenirs. Elle revoyait cette enfant difficile, imprévisible, quelle navait pas su gérer.
Pourquoi tu as fait ça ? continua Élodie. Jétais ta famille !
Elle sapprocha, les poings serrés. Claudette devina sa vulnérabilité, malgré ses airs de force.
Je navais pas le choix, répondit Claudette calmement. Je navais pas les moyens de moccuper de vous deux. Amélie avait plus besoin de moi.
Élodie fronça les sourcils, blessée :
Donc, tu as choisi ma sœur ? Tu mas jetée comme un vieux meuble ?
Sa voix tremblait. Claudette sentit la culpabilité lenvahir. Tant dannées plus tard, les conséquences de son choix la rattrapaient.
Il me faut de largent, ajouta Élodie sèchement. Pour ce que tu mas fait. Une compensation.
Le conflit intérieur de Claudette sintensifia. Elle voyait quÉlodie avait grandi forte, indépendante, mais la rancœur et la solitude habitaient toujours son cœur.
Combien ? murmura Claudette, retenant ses larmes.
Élodie nomma une somme considérable pour les modestes revenus de Claudette. Un silence pesant sinstalla avant que celle-ci ne cède :
Daccord.
Elle se sentait coupable. Peut-être que largent apaiserait sa conscience. Et puis, elle craignait pour Amélie. Que ferait sa sœur en colère ?
Tout avait commencé il y a longtemps, quand la sœur de Claudette sétait éprise dun homme dangereux. Une histoire dalcool, de rencontres hasardeuses et de conséquences imprévues. Un jour, elle avait découvert quelle attendait un enfant. Amélie était néeune petite fille vive, souriante, qui illuminait tout sur son passage. Claudette lavait souvent gardée, lui apprenant à lire, à dessiner, lui offrant un peu de bonheur. Elle sétait attachée à elle.
Puis, cinq ans plus tard, sa sœur eut un second enfantÉlodie. Une enfant colérique, difficile, comme si le destin sacharnait. Les parents, incapables de faire face, sombrèrent. On leur retira leurs droits. Les services sociaux proposèrent à Claudette de prendre les deux filles ou aucune.
Son cœur se déchira. Elle voulait Amélie, mais Élodie ? Comment affronter une telle épreuve ? Après mûre réflexion, Claudette choisit Amélie. Par égoïsme, par nécessité. Elle obtint la garde. Élodie resta à lorphelinat.
Et maintenant, la voilà.
Dabord, ce fut la joie. Puis vint la réalité : les attentes, les demandes, largent. Claudette devait trouver un équilibre entre aider Élodie et préserver sa propre vie.
Les questions matérielles, émotionnelles, tout pesait. Élodie bousculait ses habitudes, ses limites. Le stress grandissait.
Claudette avait de nouveau perdu sa paix.
**Leçon du jour :** Parfois, les choix du passé nous rattrapent, exigeant réparation. Mais est-ce vraiment la dette quil faut payer, ou plutôt la peur de ce quon a fui ?







