Sur un tapis de feuilles dorées…

Sur un tapis de feuilles jaunes

Marie parcourait la liste des prescriptions, prenait un nouveau blister et en pressait les gélules dans des gobelets en plastique. Une routine quotidienne préparer les médicaments pour les patients.

Toute sa vie allait sécouler ainsi, dans une suite dactions monotones. Seule. Son cœur se serra, comme si une blessure fraîche sétait rouverte et saignait. Marie se souvenait de la veille avec une précision douloureuse. Chaque mot blessant prononcé par son mari résonnait en elle comme un écho brûlant.

Elle jeta le blister vide dans la poubelle près de la table, prit un flacon, versa une poignée de comprimés dans sa paume et commença à les répartir dans les gobelets, accélérant peu à peu. Mais ses pensées étaient loin, dans le passé

« Marie, quest-ce que tu fais ? » La voix de linfirmière en chef résonna tout près. Marie sursauta, le flacon lui échappa des mains, renversant les gobelets. Elle contempla, désemparée, les médicaments éparpillés sur le plateau.

« Quest-ce que tu as ? Tu réalises que tu aurais pu tuer des patients en leur donnant une dose excessive ? Éloigne-toi de la table ! » Linfirmière en chef écarta Marie dun geste sec. « Mon Dieu, quest-ce quon va faire maintenant ? »

« Désolée, Élodie, je vais tout arranger » Marie prit un gobelet, versa son contenu dans sa main et fixa les comprimés, ne sachant que faire.

« Donne-moi ça ! Tout arranger Comment veux-tu distinguer les médicaments maintenant ? » Elle ramassa les comprimés de la paume de Marie et les jeta à la poubelle.

« Jai juste eu une seconde dinattention » Les mains de Marie tremblaient, son regard effrayé se posait sur les gobelets.

« Si je nétais pas entrée à temps, je nose imaginer Tu voulais finir en prison ? » lança linfirmière en chef, exaspérée.

« Je ne sais pas comment cest arrivé » Marie seffondra sur une chaise, cacha son visage dans ses mains et éclata. Ses épaules tremblaient sous les sanglots silencieux.

« Jespère que tu nas pas eu le temps de faire les injections ? »

Marie secoua la tête, continuant de pleurer.

« Tu nas jamais été aussi distraite avant. Pourtant, tu nes pas une débutante. »

« Mon mari il ma quittée hier » Sa voix était étouffée et lointaine derrière ses mains.

« Je vois. Bon, arrête de pleurer. » Linfirmière en chef se mit à vider les gobelets dans la poubelle. « Je moccupe des médicaments. Toi Je ne peux pas te laisser travailler dans cet état. Tu ferais des bêtises, et on finirait toutes les deux en procès. »

Marie retira enfin ses mains de son visage et se leva dun bond.

« Élodie, je »

« Écoute, reste assise. Ou mieux, rentre chez toi. Écris une demande de congé pour demain. Je la donnerai moi-même à la directrice et jexpliquerai. »

« Je voulais prendre mon congé quand ma fille accoucherait, pour laider Je ferai attention », promit Marie en essuyant le mascara qui coulait sur ses joues.

« Une semaine te suffira pour te reprendre ? Tu prendras le reste quand ta fille sera là. Et rentre chez toi, je ne veux plus te voir. Je ferai ton service. Et tais-toi, sinon ils te vireront pour faute professionnelle. »

Marie cligna des yeux, perdue.

« Mon Dieu, cest effrayant de penser à ce que tu aurais pu faire, gémit Élodie. Mais bon, nos patients sont méfiants, ils auraient crié au scandale en voyant la dose que tu leur donnais », ajouta-t-elle, plus calmement.

Elle était rondelette, les boutons de sa blouse blanche semblaient prêts à sauter sous la pression de sa poitrine généreuse. Marie, à côté delle, paraissait encore plus frêle.

« Et va te laver le visage. Tous les maris, même les meilleurs, finissent par regarder dun autre côté. » Élodie soupira et se remit à distribuer les médicaments. « Attends. Je tappelle un taxi, dans ton état, tu pourrais te faire écraser. »

Marie ne protesta pas. Elle rédigea sa demande de congé, changea de vêtements, prit son sac et sortit de lhôpital. Un taxi jaune lattendait déjà. Elle sinstalla à larrière et donna son adresse.

Rentrer chez elle lui pesait. « Mon mari est parti, sans doute heureux avec une plus jeune, et moi, jai failli envoyer des patients dans lautre monde. Il faut que je me reprenne » La sonnerie de son téléphone interrompit ses pensées. Cétait sa fille.

« Maman, salut ! » La voix joyeuse dÉlodie (la fille) la fit sourire. Lhorreur séloigna. Elle navait pas distribué les médicaments, rien de grave ne sétait passé.

« Élodie, ça va ? Pourquoi tu mappelles ? »

« Tout va bien, maman. Tu es au travail ? »

« Je rentre en taxi. Élodie, on ma mise en congé pour une semaine. »

« Pourquoi ? Tu es malade ? » sinquiéta sa fille.

« Non, je vais bien. Cest juste comme ça. Je peux venir chez vous une semaine ? »

« Bien sûr, viens. Quand ? »

« Demain, si je trouve des billets pour le train de nuit »

Elle parlait à sa fille sans remarquer que le taxi était déjà arrivé.

« Excusez-moi, nous sommes là. Jai une autre course », la pressa le chauffeur.

« Oui, oui. Combien je vous dois ? » Marie sagita, éloignant le téléphone de son oreille.

Le chauffeur la regarda avec indulgence.

« Cest réglé. Ça a été débité de la carte quand le taxi a été commandé. »

« Ah ? Ce nest pas moi qui lai appelé » Marie comprit quÉlodie (linfirmière) avait payé. Elle sortit du véhicule.

« Maman, à qui tu parlais ? » demanda sa fille.

« Au chauffeur. Je te rappelle quand jai mon billet », dit-elle en rangeant son téléphone mais son sac avait disparu.

Une vague de chaleur lenvahit. Elle regarda autour delle : la voiture était partie avec son sac. Les jambes molles, elle sassit sur un banc près de lentrée, balayant quelques feuilles jaunes. « Élodie avait raison, jai besoin de repos, à ce rythme, je vais perdre la tête »

Elle essaya de se rappeler ce quil y avait dans son sac. Ses clés étaient dans la poche de son manteau, son téléphone dans sa main mais son portefeuille ! Peu dargent liquide, mais ses cartes ! « Pourquoi je reste là ? Il faut les bloquer immédiatement ! »

Elle jeta un regard plein despoir vers la rue. « Peut-être que le chauffeur reviendra ? Quil verra le sac oublié et le rapportera ? » Elle sourit amèrement. « Jaurais dû demander à Élodie de rappeler plus tard. »

Elle bloqua sa carte par téléphone et soupira, soulagée. Maintenant, il fallait se calmer. Elle entra chez elle. Lincident des médicaments et la perte de son sac avaient momentanément tout éclipsé. Mais maintenant, la solitude revenait, brutale. Marie sassit sur le pouf. Et soudain, une colère immense contre son mari lenvahit. À cause de

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Une jeune SDF vole lors d’un mariage et le marié la reconnaît immédiatement – 5 min de lecture