Puisque je suis l’ennemi de ta mère, qu’elle vive comme elle l’entend ! Je ne la servirai plus !

Si je suis lennemie de ta mère, alors quelle vive comme elle lentend ! Je ne serai plus sa bonne à tout faire !

Léa sefforçait toujours de garder son calme quand il sagissait de Valentine Michèle. Sa belle-mère débarquait dans leur appartement deux ou trois fois par semaine, et chaque visite tournait à lépreuve. Les jours de septembre raccourcissaient, et lhumeur de Léa sassombrissait un peu plus chaque fois.

Valentine Michèle adorait organiser des festins. Elle arrivait avec des sacs pleins de victuailles, semparait de la cuisine et cuisinait comme pour une armée. Bien sûr, elle invitait à table les voisines, les connaissances, et parfois même des parfaits inconnus.

Ça, cest ce que jappelle lhospitalité ! lançait-elle en disposant les assiettes. Pas comme certaines qui ne savent même pas faire un thé correct.

Léa serrait les dents et continuait à couper le pain. Valentine Michèle ne nommait jamais personne, mais tout le monde comprenait de qui elle parlait.

À table, la belle-mère se transformait en conteuse. Ses yeux silluminaient, sa voix prenait des airs solennels, et le spectacle commençait.

Ma nièce Camille, elle, a une femme en or ! sexclamait Valentine en levant les mains au ciel. Une vraie fée du logis ! Ses broderies ? De véritables œuvres dart ! Elle tricote, elle coud, son potager est impeccable. Elle fait ses conserves, ses confitures Une vraie maîtresse de maison !

Les invitées opinaient du chef, tandis que Léa sentait la chaleur lui monter aux joues. Son mari, Théo, plongé dans son téléphone, faisait semblant de ne rien entendre.

Et ma cousine Élodie, quelle femme admirable ! poursuivait Valentine. Douce, obéissante, jamais un mot plus haut que lautre. Sa belle-mère se sent comme derrière un rempart. Elle laide en tout, la consulte pour chaque décision. Ça, cest de léducation !

Une voisine se tourna vers Léa :

Et vous, vous savez faire quoi ?

Léa ouvrit la bouche, mais Valentine Michèle lui coupa lherbe sous le pied :

Oh, à quoi bon demander ! fit-elle avec un sourire en coin. Notre Léa est une femme moderne. Elle travaille dans un bureau, devant son ordinateur. Pas le temps de soccuper du foyer. Elle a lhabitude quon fasse tout à sa place.

Je suis responsable commerciale dans une entreprise, tenta dexpliquer Léa.

Ah oui, responsable, approuva Valentine avec un hochement de tête entendu. Et à la maison, qui fait tout ? Mon pauvre Théo doit cuisiner et nettoyer après sa journée. Notre bru est bien trop gâtée.

Léa serra les dents si fort quelle en eut mal à la mâchoire. Théo, toujours scotché à son écran, feignait lindifférence.

Après un de ces repas, une fois les invitées parties et la vaisselle rangée, Valentine Michèle sapprocha de Léa avec un sourire mielleux.

Ma chérie, tu pourrais maccompagner demain à lhôpital ? demanda-t-elle comme si cétait un immense service. Je dois récupérer des analyses, et jai un peu peur dy aller seule.

Bien sûr, Valentine Michèle, répondit Léa, bien quelle ait une réunion importante le lendemain.

Merci, mon ange ! Théo est trop occupé, je ne veux pas le déranger. Toi, avec ton emploi du temps flexible, tu peux tabsenter quand tu veux.

Léa aurait voulu préciser que son emploi du temps navait rien de flexible, mais elle se tut. Mieux valait éviter les drames.

La semaine suivante, même scénario. Valentine débarqua avec une nouvelle requête :

Léa, tu pourrais aller à la pharmacie ? demanda-t-elle en tendant une liste de médicaments. Le médecin ma prescrit des nouveaux traitements, et je ne my retrouve pas. Jai peur de me tromper.

Daccord, acquiesça Léa.

Et si ce nest pas trop demander, passe aussi au supermarché. Il me faut des céréales et des produits dentretien. Je ne peux pas porter de charges lourdes, mon dos me fait mal.

Léa passa laprès-midi à courir trois pharmacies pour trouver les médicaments, puis fit la queue au supermarché. Elle rentra épuisée et de mauvaise humeur.

Ça sest bien passé ? demanda Théo, les yeux rivés sur la télé.

Très bien, répondit-elle sèchement.

Quelques jours plus tard, Valentine réapparut, cette fois avec une tribu de parentes.

Voici ma bru, Léa, présenta-t-elle. Et voici ma belle-sœur Margaux et sa fille, Anaïs.

Anaïs, bien quà peine plus âgée que Léa, prenait des airs supérieurs.

Vous travaillez dans un bureau, cest ça ? demanda-t-elle en inspectant lappartement.

Oui, dans une entreprise de commerce.

Comme cest intéressant ! sexclama Anaïs avec un enthousiasme faux. Moi, je reste à la maison pour mes enfants. Jai trois anges, vous imaginez ? Tous si sages et intelligents. Laîné va au conservatoire, il joue du violon.

Valentine rayonnait :

Ça, cest une vraie femme ! sextasia-t-elle. Elle soccupe de son foyer, élève ses enfants, soutient son mari. Pas comme celles qui courent les bureaux.

Léa sentit la colère lui brûler le visage, mais elle se contint.

Exactement, enchaîna Margaux. Anaïs est une perle ! Elle cuisine à la perfection, elle coud, elle tricote. Je lui dis toujours : «Ma fille, tu es un trésor pour nimporte quel homme.»

Et jai même un potager, ajouta modestement Anaïs. Je cultive mes légumes, je fais mes conserves. Mon mari dit que notre maison est un paradis.

Valentine se tourna vers Léa :

Tu entends, ma chérie ? Tu devrais prendre exemple sur Anaïs ! Peut-être que Théo resterait plus à la maison au lieu de traîner dehors.

Léa resta figée. Seule elle savait que Théo rentrait tard depuis quelques semaines. Comment Valentine était-elle au courant ?

Théo est souvent absent ? senquit Margaux avec curiosité.

Il travaille beaucoup, répondit évasivement Léa.

Bien sûr quil travaille ! ricana Valentine. Avec une maison pareille, aucun homme ne voudrait rester. Le frigo est vide, la femme toujours au boulot. Forcément, il cherche du réconfort ailleurs.

Anaïs hocha la tête avec compassion :

Quel dommage ! Un homme, ça se retient. Il faut créer du réconfort, le choyer, le gâter. Le mien refuse même les déplacements professionnels il préfère être à la maison.

La conversation continua sur ce ton pendant une heure. Léa, silencieuse, sentait lirritation monter. Ces sous-entendus, ces comparaisons, ces leçons lui taillaient les nerfs mieux quune scie.

Quand les invitées furent enfin parties, Léa explosa :

Théo, tu as entendu ce que ta mère a dit ?

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Puisque je suis l’ennemi de ta mère, qu’elle vive comme elle l’entend ! Je ne la servirai plus !
Boris n’a jamais voulu faire de mal aux enfants.