Le Lien du Destin
Les rayons du soleil matinal, tendres mais insistants, traversent les fines étoffes des rideaux et dessinent des reflets dorés sur le visage de la femme endormie. Ils semblent murmurer : « Réveille-toi, le monde est déjà magnifique et il tattend. » Élodie sétire dans son lit, ressentant une agréable légèreté après une nuit profonde. Cette sensation était la récompense méritée après des années defforts sur elle-même.
Cela faisait exactement huit ans, deux mois et dix-sept jours quelle avait montré la porte à son ex-mari. Non quelle comptât chaque jour, mais cette date sétait gravée dans sa mémoire comme le début dune nouvelle vie, la vraie. Leur fils, Théo, était devenu un homme autonome. Il étudiait à Lyon, en quatrième année dune école prestigieuse, et ne rentrait presque plus à la maison. Seuls des appels, une voix au téléphone, si familière et pourtant un peu plus distante chaque jour.
Maman, jai mes partiels, puis mon job étudiant, et avec Chloé entendait-elle, cachant une légère tristesse derrière un ton enjoué : « Bien sûr, mon chéri, je comprends. Tout va bien pour moi ! » Et ce nétait pas un mensonge. Sa vie était remplie de sens et dordre.
Élodie avait quarante-trois ans, mais elle se sentait en avoir trente. Mince, tonique, avec un regard clair bleu-gris, elle paraissait plus jeune que son âge. Le secret ? Quatre ans de rituel immuable : réveil à six heures, jogging, douche écossaise, petit-déjeuner équilibré, puis départ pour le bureau. Elle travaillait comme manager dans une grande entreprise et appréciait son poste. Le directeur, méticuleux et doté dun sixième sens pour les retards, détestait par-dessus tout le manque de discipline.
Souvent, elle le voyait surgir comme par magie dans le couloir à 9h01 pile, face à un collègue essoufflé.
Alors, on est en retard ? Il faudrait se lever plus tôt ! Une explication par écrit sur mon bureau ! Sa voix, grave et autoritaire, faisait sursauter même les innocents.
Élodie était respectée dans léquipe. Intelligente, déterminée et toujours prête à aider, elle restait simple et abordable. Mais après son divorce, sa vie sentimentale était silencieuse. Son temps libre ? Travail, soins personnels et son fidèle compagnon : un labrador prénommé Milo, quelle surnommait affectueusement Milou.
Cest avec son arrivée, quatre ans plus tôt, quavaient commencé ces jogging matinaux revigorants. Milo était son réveil, son coach et son plus fidèle ami. Un chien dun magnifique chocolat, aux yeux intelligents et pleins de bonté. Jamais de problèmes, un caractère facile et joyeux : le meilleur antidépresseur pour Élodie. Quand elle avait choisi la race, elle sétait fiée aux conseils de lami dune copine :
Prends un labrador, tu ne le regretteras pas. Cest un ami, un remède contre la solitude et un psy personnel en un seul être. Il avait vu juste.
Enfant, elle avait toujours eu des chiens, mais pendant son mariage avec Laurent, elle avait dû renoncer à ce rêve. Il détestait les animaux.
Si tu ramènes une de ces boules de poils avec Théo, je la balance par la fenêtre du septième étage. Promis. Ses yeux reflétaient une haine si sincère quÉlodie lavait cru.
Finalement, cest elle qui avait failli le jeter par la fenêtre quand, ivre, il avait levé la main sur elle pour la première fois. Pas assez de force physique, mais assez de rage. Elle avait sangloté dans la chambre, lentendant vociférer dans le salon. Puis il était parti en claquant la porte, emportant les affaires quelle avait préparées. Quinze ans de vie, dont les trois dernières années avaient été un enfer. Laurent avait échoué comme mari et comme père égoïste, narcissique, toujours insatisfait. Le coup de trop avait été cette gifle. Dieu merci, Théo nétait pas là
« Tant mieux que je lai viré. On sen sortira. Mon salaire est correct. Mieux vaut seule que de subir et montrer à mon fils un modèle familial toxique », avait-elle pensé. Et elle ne sétait pas trompée. Pendant huit ans, elle avait vécu heureuse, en harmonie avec elle-même. Les hommes ? Elle les tenait à distance. Laurent lavait dégoûtée pour longtemps.
Ce matin daoût, tiède et doux, sentait les derniers jours de lété. Élodie se leva et jeta un œil dans le couloir. Milo ly attendait déjà, assis près de la porte, son harnais entre les dents. Sa queue battait le sol en rythme.
Milou, en avant ! Tu es un amour ! On na même pas besoin de réveil, sourit-elle en enfilant ses baskets. On y va !
Elle adorait leur parc ! Il suffisait de traverser la rue par le passage souterrain pour atteindre cet oasis vert aux allées bien entretenues. Le matin, cétait animé : joggeurs, cyclistes, propriétaires de chiens comme elle. Élodie détacha la laisse, et Milo, goûtant enfin sa liberté, fonça en avant, jetant des regards pour sassurer quelle le suivait.
Elle courait lentement, profitant de lair frais, saluant les habitués ces inconnus qui partageaient son rituel. Soudain, un miaulement surgit derrière un buisson de lilas. Élodie quitta la







