– Tu n’es pas des nôtres, – m’a dit ma belle-fille quand je lui ai offert des fleurs le jour du dépôt du dossier

Tu nes pas des nôtres, dit la belle-fille lorsque japportai des fleurs le jour de la déclaration.

«Thérèse, vous avez quitté le travail tôt aujourdhui, sétonna la voisine de palier en la croisant devant limmeuble. Vous êtes malade ?»

Non, Claudine, je vais bien. Jai juste des choses urgentes à régler, répondit Thérèse en ajustant son sac à main.

Tant mieux. À notre âge, il faut faire attention. Hier, jai eu une montée de tension, jai failli appeler les urgences.

Thérèse acquiesça, distraite. Une seule pensée lobsédait : arriver à temps à la mairie. Son fils Antoine navait pas précisé lheure, mais elle savait que les jeunes couples faisaient ces démarches tôt le matin.

Le bus avançait lentement, coincé dans les embouteillages. Nerveuse, Thérèse vérifiait lheure et fouillait dans son sac : carte didentité, justificatif de domicile, relevé de compte tout ce qui pourrait aider si les jeunes décidaient de régler la question du logement.

Elle imaginait la surprise heureuse dAntoine, les remerciements timides de sa future belle-fille, Élodie. Comment pouvaient-ils envisager ce jour sans leurs parents ?

La mairie se dressait dans un bâtiment historique au cœur de Paris. Les mains moites, Thérèse gravit les marches, aussi émue que le jour où elle avait épousé son défunt mari, quarante ans plus tôt.

Dans le hall, des couples attendaient leur tour, des jeunes parents déclaraient des naissances. Thérèse chercha Antoine en vain.

Pardon, madame, demanda-t-elle à laccueil, où dépose-t-on les dossiers de mariage ?

Premier étage, bureau 14, répondit lemployée sans lever les yeux.

Lescalier craquait sous ses pas. Elle trouva la porte entrouverte.

Maman, quest-ce que tu fais ici ? sétonna Antoine.

Assis face à une fonctionnaire, il tenait la main dÉlodie, élégante dans une robe bleue. Leurs papiers sétalaient sur le bureau.

Mon chéri ! Thérèse entra, radieuse. Je ne pouvais pas manquer ça !

Élodie lança un regard froid à Antoine avant de saluer dun ton sec :

Bonjour, Thérèse.

Ma chérie, félicitations ! Elle voulut lembrasser, mais la jeune femme esquiva.

Madame, nous sommes en pleine formalité, intervint lemployée. Asseyez-vous là, sil vous plaît.

Thérèse sortit un petit bouquet de lys quelle avait acheté en chemin.

Pour toi, Élodie. Je sais que tu aimes ces fleurs.

Merci, murmura-t-elle sans sourire.

La date souhaitée ? demanda lofficiante.

Le 15 octobre, répondit Antoine.

Onze heures, cela vous convient ?

Ils approuvèrent.

Et pourquoi pas un samedi ? suggéra Thérèse. Pour que la famille puisse venir.

Maman, cest décidé, soupira Antoine.

Bien sûr, vous savez ce que vous faites.

Élodie la dévisagea, irritée. Thérèse feignit de ne pas remarquer.

Les témoins ? reprit lemployée.

Mon frère et sa meilleure amie, dit Élodie.

Et si les parents signaient aussi ? insista Thérèse. Pour la symbolique.

Maman, cest deux témoins maximum, expliqua Antoine, patient.

Les formalités durèrent encore une demi-heure. Lorsque tout fut signé, Thérèse se leva la première.

Et maintenant, célébrons ! Jai réservé une table au Café de Flore.

Antoine et Élodie échangèrent un regard gêné.

On avait prévu de se balader juste tous les deux, dit-il doucement.

Mais cest un jour spécial ! Et jai déjà acheté de quoi faire ta blanquette préférée pour ce soir

Thérèse, coupa Élodie, glaciale, nous avons nos projets.

Le cœur serré, Thérèse les suivit dehors. Sur le parvis, des amoureux riaient près des fontaines. Elle se sentit invisible.

Antoine, une photo ? supplia-t-elle en sortant son téléphone.

Il accepta à contrecœur. Élodie sourit à peine.

Magnifique ! Je limprime tout de suite !

On doit y aller, maman.

Attendez, je vous accompagne ?

On veut être seuls, trancha Élodie.

Blessée, Thérèse embrassa son fils et tenta à nouveau détreindre sa belle-fille, qui recula.

Dans le bus, elle contempla les photos. Antoine rayonnait ; Élodie semblait tendue.

Chez elle, elle prépara la blanquette pour rien. Le téléphone sonna.

Alors, ça sest bien passé ? demanda Claudine.

Oui Mais ils ont refusé de fêter ça avec moi.

Quelle ingratitude ! Après tout ce que tu as fait pour lui !

Thérèse raccrocha, épuisée. Le soir, son amie Jeanne lappela.

Cette petite peste ! sindigna-t-elle en entendant lhistoire. Elle veut técarter !

Peut-être quelle a juste peur

Non ! Elle manipule ton fils.

Le lendemain matin, Antoine appela.

Maman, Élodie a mal pris ton attitude hier. Elle trouve que tu es trop envahissante.

Envahissante ? Sa voix trembla. Je voulais partager votre bonheur !

On est grands. Laisse-nous respirer.

Donc je ne suis plus utile ?

Ne dis pas ça Mais Élodie menace de ne plus te voir si tu continues.

Sous le choc, Thérèse raccrocha. Elle avait tout sacrifié pour lui. Et aujourdhui, une inconnue décidait de leur relation.

Jeanne la rappela, furieuse :

Laisse-les se débrouiller ! Ils reviendront quand ils auront des problèmes.

Le soir, Thérèse rappela Antoine, conciliante :

Dis à Élodie que je respecte votre choix.

Merci, maman.

Et le mariage, ce sera quand ?

Peut-être au printemps

Je serai invitée ?

Bien sûr.

Un peu apaisée, elle regarda les photos. Sur lune delles, Antoine et Élodie souriaient, jeunes et amoureux.

À côté deux, il y avait une place vide.

Celle où elle aurait dû se tenir.

Elle éteignit lordinateur. Demain serait un autre jour. Peut-être quAntoine linviterait, quÉlodie comprendrait

En attendant, le silence de lappartement se faisait plus lourd.

Dehors, la nuit tombait sur Paris.

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