Mon beau-fils m’a dit qu’il en avait assez, alors j’ai décidé de ne plus continuer comme avant : treize ans à l’élever comme ma propre fille, mais il refuse toujours mon aide, me repousse au moment où il s’apprête à choisir son lycée, et ma femme pense que c’est moi qui réagis de façon immature.

Mon beau-fils a dit quil en avait assez, alors jai décidé de ne plus tenir le coup.

Depuis treize longues années, jai élevé le fils de ma femme, issu de son premier mariage, comme sil avait été le mien. Ma fille, cest une autre histoire : on se ressemble comme deux gouttes deau, mêmes tempéraments, mêmes ambitions, on partage tout, même la façon dont on regarde le monde. Mais le garçon, lui, cest limage crachée de sa mère dans les gestes, dans les silences, dans cette suffisance étrange qui flotte autour de lui. Avec lui, tout est toujours « suffisant ».

Quand son anniversaire sapproche, ou quand les vitrines de la ville de Lyon se parent détoiles à Noël, je pose la question rituelle au petit-déjeuner : « Quest-ce qui te ferait plaisir, Louis ? » Ma fille Camille, elle, sort sans hésitation une liste griffonnée au stylo bleu elle anticipe, calcule, rêve à voix haute. Louis, lui, répond toujours dun haussement dépaules : « Peu importe Je prendrai ce que tu veux, papa. » Son indifférence me traverse en silence.

Quand Camille sort avec ses amis dans les ruelles du Vieux Lyon, je lui propose quelques billets de vingt euros pour le cinéma ou une gaufre en terrasse ; elle accepte sans ciller, souriante. Louis, au contraire, refuse poliment tout ce que je lui tends : « Non, merci, jai ce quil faut, vraiment. » Mais je le sais bien, il na jamais de pièces au fond de ses poches. Plus tard, il va trouver sa mère dans la cuisine, lui chuchoter ses besoins, mais jamais à moi.

Treize ans à vivre sous le même toit, à partager le parfum du café chaque matin, et il ne peut toujours pas me demander quoi que ce soit ? Je lai aimé comme mon propre fils et pourtant, il glisse toujours dans lombre de sa mère, se cache derrière sa jupe comme une brume matinale qui refuse de disparaître. Et son père, ce fantôme de Paris, na jamais donné signe de vie, jamais un mot, jamais une carte. Malgré tout, Louis reste un étranger pour moi.

Voilà que, maintenant quil a seize ans, la question de son avenir scolaire plane au-dessus de nous comme un vieux manteau. Toute la famille en parle autour de la table en bois massif, sous la lumière jaune. Dans sa tête, il est certain dintégrer le lycée public quil vise. Moi, je lui propose dautres options, des écoles privées, des internats réputés, je suis prêt à sortir mon carnet de chèques, à investir dans ses rêves… Mais Louis, inlassablement, refuse encore. « Ce nest pas la peine, Michel. Je me débrouillerai, ou je trouverai une solution. »

Ce genre de fierté silencieuse, de refus de collaborer avec moi, son beau-père, me blesse plus que les épines dun rosier. Sil veut faire tout tout seul, alors quil le fasse ! Sil ne veut pas de mon argent, quil lignore !

Quand jen ai parlé à ma femme, Laure, elle ma regardé longtemps, juste le temps que la lumière de la télévision vacille sur son visage. Elle ma traité de gamin, ma dit que je me comportais comme un enfant. Mais moi, je pense que Louis, lui, porte le monde sur ses épaules… bien trop adulte pour un gosse de son âge. Alors, comment pourrait-on, dans ce songe étrange et sans réveil, trouver la bonne manière de répondre à cet enfant-fantôme ?

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Mon beau-fils m’a dit qu’il en avait assez, alors j’ai décidé de ne plus continuer comme avant : treize ans à l’élever comme ma propre fille, mais il refuse toujours mon aide, me repousse au moment où il s’apprête à choisir son lycée, et ma femme pense que c’est moi qui réagis de façon immature.
J’étais un idiot, reviens !» suppliait mon ex en me voyant amaigrie. Mais il ignorait que j’allais épouser… son propre patron.