Clémence et Bastien se préparent à se marier. Ils sortent ensemble depuis un an et demi, et Bastien finit par lui faire sa demande. Clémence, sans la moindre hésitation, accepte, et les préparatifs démarrent immédiatement.
«Le témoin sera Lucas, mon ami denfance,» affirme Bastien avec certitude, puis ajoute, un brin moqueur, «Et qui vastu choisir comme demoiselle dhonneur ? Il faut que ce soit la plus jolie, Lucas ne supporte pas les laides.»
Clémence ne saisit pas la plaisanterie et, dun ton égal, rétorque: «Et si je prenais Mélisande comme demoiselle dhonneur?»
Bastien sétouffe avec son verre et, incrédule, demande: «Tu as perdu la tête, non ? Un homme comme témoin?»
«Cest mon meilleur ami, je nai pas besoin dautre», réplique Clémence avec défi.
Mélisande devient pour Bastien une sorte de drapeau rouge: «Elle na jamais pu trouver dautre amie, elle traîne partout avec Théo, que ce soit aux magasins ou à la fac.»
Théo et Clémence se connaissent depuis la première année duniversité. Elle na jamais vu en Théo autre chose quun ami, et lui répète toujours que Clémence nest pour lui quune amie. Malgré cela, les connaissances ne cessent de plaisanter en disant: «Clémence et Mélisande, les meilleures copines».
Dès que Clémence présente Théo à Bastien, ce dernier le rechigne immédiatement. Théo reste poli, jamais hostile, tandis que Bastien se montre parfois grossier et lance des blagues cruelles. Clémence doit souvent rappeler à son futur époux les limites du respect, mais elle aime Bastien à la folie et lui pardonne tout.
Pendant les préparatifs, Théo est toujours aux côtés de Clémence: il laide à choisir son bouquet, laccompagne aux essayages chez le couturier. «Quoi? Le futur mari ne doit pas voir la robe avant le jour J, mais lui, il peut,» plaisantet-elle plus tard avec ses amies.
Finalement, la demoiselle dhonneur devient Amélie, amie depuis le premier semestre, mais Amélie ne peut aider à lorganisation car elle soccupe de sa mère malade. Les deux jeunes femmes passent des heures à discuter, mais Amélie na pas le temps daccompagner Clémence.
À une semaine du grand jour, le vent change: Bastien annonce à Clémence quil a trouvé une nouvelle flamme et quil ne veut plus de mariage.
Clémence tente de le raisonner, le voyant les invitations déjà envoyées et les lieux réservés. «Comment vaisje pouvoir regarder mes proches dans les yeux?», sanglotet-elle. Bastien reste inflexible, lui souhaite simplement bonheur et bloque son numéro.
Toute la journée, Clémence se lamente sur lépaule de Théo. «Comment atil pu faire ça?Que faire maintenant?», sanglotetelle. Théo la caresse la tête, la serre dans ses bras, tente de la réconforter.
«Jai une idée!», souritil, «Je peux devenir ton mari.»
Clémence sarrête de pleurer, incrédule, et demande: «Toi? Mais nous ne sommes que des amis.»
«Exactement, je suis ton ami du cœur, je ne te ferai jamais de mal. Avec moi, tu seras en sécurité comme derrière un mur de pierre,» prometil, ajoutant dun ton léger: «Et Bastien, sil apprend, mourra de jalousie.»
«Comment organiser la mairie? Le mariage est dans cinq jours seulement,» sinquiètetelle.
«Ne ten fais pas, je moccupe de tout. Ma mère a une amie qui travaille à la mairie,» assure Théo.
Le mariage se déroule parfaitement, exactement comme Clémence lavait rêvé. Le seul hic: les invités appellent constamment Théo «Bastien». Il rit bonhomme et corrige poliment les erreurs. La première nuit nuptiale ne se concrétise pas: Théo reste doux, Clémence nimagine même pas une intimité immédiate.
«Je men sortirai,» pense Théo en étreignant sa nouvelle épouse endormie.
Vingt ans plus tard, Théo prend son petitdéjeuner sur la terrasse du chalet, profitant de lair frais du matin. Au coin du jardin, les pivoines plantées par Clémence éclatent en fleurs. Larbre à pommes, que Théo a greffé il y a quelques années, commence à bourgeonner. Au loin, les oiseaux chantent, le soleil dété monte doucement.
Les habitants de la maison séveillent peu à peu. Clémence pratique le yoga dans la chambre, accompagnée dune musique douce. Leur fille de quinze ans, Véra, remet à leau ses tubes de son idole et chante dans la salle de bain. Leur fils de dixneuf ans, Kévin, descend sur la terrasse pour prendre son petitdéjeuner avec son père.
«Pourquoi tu as lair si morose? Tu ne te lèves jamais avant onze heures, même en vacances!», lance Théo à son fils étudiant.
«Papa, je nai pas dormi de la nuit. Jai un problème: il y a une fille de ma promotion qui me plaît énormément, mais elle ma dit quon ne pourra être que amis. Que faire? Estce que tout est vraiment perdu?»
«Ce nest pas vrai, mon fils. Il y a dautres façons. Je vais te raconter ma méthode secrète, le «ami du cœur». Une fois, à la fac, jétais moi aussi éconduit»
Et cest ainsi que le secret de la confiance se transmet de génération en génération, sous le même toit où lamour, lamitié et la persévérance se conjuguent au présent.







