Lors des funérailles de mon mari, j’ai remarqué une étrange vieille femme tenant dans ses bras un tout-petit. Étonnant, n’est-ce pas ?

Sur le cimetière de Montmartre, au pied de la tombe fraîchement creusée de son époux, Nathalie Bouvier ne pouvait encore accepter que Patrick Moreau nexiste plus. La mort de lhomme quelle aimait sétait abattue dun coup de vent, victime dun carambolage mortel sur lA86. Une semaine sétait écoulée, et chaque aube semblait encore murmurer le nom de son mari, comme un cauchemar qui refuse de sestomper.

Le cœur lourd, elle savança vers la sortie, cherchant désespérément une façon de reprendre sa vie en main. Soudain, une silhouette vieillissante surgit du brouillard du soir, les bras tremblants, serrant contre elle un nourrisson qui sanglotait à peine.

Vous êtes Nathalie? demanda la vieille femme dune voix rauque, tandis que le bébé se mettait à pousser de petits gémissements.

Nathalie fixa la inconnue, la méfiance se lisant dans ses yeux fatigués.

Oui. Et vous êtes?

Madeleine, répondit la femme, les yeux humides. Ce petit cest la fille de Patrick.

Un frisson glacé parcourut la colonne vertébrale de Nathalie. Elle recula instinctivement, les lèvres tremblantes.

Non! Cest impossible! Patrick était un mari fidèle. Il ne ferait jamais une chose pareille!

Sans un regard en arrière, elle se détourna, le visage bouillonnant de colère. Au même moment, un cri séleva derrière elle.

Attention! sécria Michel, ancien collègue de Patrick, qui, absorbé par ses propres pensées, navait même pas remarqué lintervention de Madeleine.

Michel tenta de la consoler, mais Nathalie, trop blessée, ne voulait entendre que le bruit de son propre souffle. Elle se hâta vers sa voiture, les mains tremblantes. En ouvrant la portière, elle découvrit, à sa grande horreur, le même bébé, lové sur le siège arrière, les yeux rougis de pleurs.

Où comment estil arrivé? marmonna-t-elle, la voix brisée.

Le vent mordait les arbres, et elle enleva son trenchcoat pour couvrir lenfant. En le soulevant, elle remarqua une petite tache de naissance sur le cou, exactement comme celle que Patrick portait depuis son enfance. Le sang sarrêta dans ses veines.

Cest cest vrai? se demandat-elle, le cœur battant la chamade.

Le besoin de vérité devint obsédant. Elle rentra chez elle, récupéra le peigne en argent que Patrick gardait toujours sur son chevet, et se rendit durgence à lhôpital.

Bonjour, je voudrais faire un test de paternité, sil vous plaît, déclarat-elle à la réceptionniste.

Le résultat sera prêt sous quelques jours, répondit la femme dun ton professionnel. Vous voulez une formule accélérée? Cela coûte un peu plus cher.

Jaccepte, insista Nathalie, en glissant les échantillons sur le comptoir.

Assise dans le couloir, elle essayait de calmer le bébé qui pleurait de nouveau, le couchecouché déjà sec. Elle se souvint daller au supermarché du quartier, dacheter du lait infantile, des biberons et des couches. De retour, elle nourrit lenfant, chaque seconde sétirant comme une éternité.

Enfin, une infirmière apparut, un petit sachet à la main.

Voici, ditelle en tendant le document.

Nathalie ouvrit le papier dune main tremblante. «Probabilité de paternité: 99%». Les larmes jaillirent, inondant son visage. Patrick lavait trahie, menant une double vie dont elle navait jamais soupçonné lexistence.

Déterminée à ne pas rester passive, elle décida de retrouver la mère de lenfant et de la remettre à son dû. Elle fouilla les affaires de son défunt mari, fouillant les tiroirs, les dossiers, les boîtes à gants de son vieux bureau, mais aucune trace dune liaison ne se révéla. Elle poussa alors la porte du bureau de Patrick, inspecta chaque placard, chaque recoin, en vain.

De retour chez elle, lenfant dormait paisiblement dans le salon. Elle prit le moniteur bébé, monta dans la voiture de Patrick, vérifia chaque recoin du coffre, sous les sièges, même le compartiment à gants. Aucun indice.

Le temps passa, et Nathalie ne pouvait plus ignorer le poids de ce secret. Elle repéra sur le GPS du véhicule une adresse qui revenait souvent, un petit immeuble du 11ᵉ arrondissement quelle navait jamais fréquenté. Elle sy rendit, frappa à la porte, mais aucune réponse. En séloignant, elle aperçut une silhouette familière dans la fenêtre du haut: Madeleine, la vieille femme, les yeux remplis de larmes.

Vous lavez trouvé? demanda Nathalie, la voix tremblante.

Cest Emma, répondit Madeleine. Elle était la maîtresse de Patrick, décédée il y a quelques jours dune crise cardiaque, submergée par la nouvelle du drame de son amant.

Emma? sécria Nathalie, la gorge serrée. Vous avez parlé du fils de Patrick ?

Madeleine hocha la tête, le visage pâle. Le voile du mensonge se levait enfin.

Nathalie, les larmes coulant, décida alors délever la petite Clémence comme sa propre fille, espérant quun jour le pardon viendrait, même de la part de la mémoire de Patrick. Dans le silence du cimetière, la brume se leva, et la nuit, lourde de secrets, laissa place à une lueur despoir, aussi fragile quun souffle de vent sur les toits de Paris.

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Lors des funérailles de mon mari, j’ai remarqué une étrange vieille femme tenant dans ses bras un tout-petit. Étonnant, n’est-ce pas ?
Toute ma vie, j’ai rêvé d’être à la place de mon frère, mais bientôt tout a changé.