Je suis déjà installée dans ton appartement — a annoncé ma belle-sœur en envoyant une photo de mon canapé.

Jai déjà emménagé dans ton appartement lança la bellesœur, en joignant une photo prise sur mon canapé.
Tu as encore zappé le lait ?! sécria Marie, debout devant le réfrigérateur, la porte grande ouverte comme si elle pouvait senfuir. Je tavais pourtant rappelée ce matin!

Maman, jétais submergée au travail! sinterjeta Amélie, ne retirant pas ses chaussures, tout en fouillant son sac à la recherche du portable. Jai carrément oublié!

Oublier, cest ton habit! Et le café, je vais le boire comment le matin?

Bois-le noir! Sinon je repars tout de suite!

Partir? Il est déjà neuf heures, les boutiques sont fermées!

Amélie jeta ses escarpins, traversa la cuisine. Marie continuait de grogner en fouillant dans le frigo. Amélie seffondra sur une chaise, alluma son téléphone. La batterie, à plat depuis le bureau, venait à peine de se recharger.

Le téléphone vibra, se mit à sonner. Les messages senchaînèrent: publicités, newsletters, collègues puis un texte de Rita.

Rita, la sœur de son mari Pierre.

Amélie ouvrit le fil de discussion et lut :

«Salut, Amélou! Jai déjà emménagé dans ton appartement. Voilà, cest fait.»

Une photo accompagnait le message: Rita, rayonnante, allongée sur le canapé vert que Amélie et Pierre avaient choisi trois mois auparavant, après avoir tourné la ville en rond.

Le sang dAmélie se glaça. Elle relut le message, encore et encore.

Maman? cria-t-elle, la voix étranglée.

Quoi? se retourna Marie, toujours au réfrigérateur.

Tu as donné les clés de notre appartement à quelquun?

De quel appartement?

De notre cheznous! De lappartement que Pierre et moi partageons!

Non, jamais! Pourquoi?

Amélie fixa lécran. Rita, sur son propre canapé, dans son propre appartement. Impossible.

Elle tapa: «Rita, cest une erreur. De quel appartement?»

Rita répondit instantanément: «Celui de la rue de la Paix! Pierre ma dit que ça ne te dérangerait pas dhéberger maman un petit moment, alors jai sauté le pas.»

Le cœur dAmélie battait la chamade. Elle sempara de son manteau.

Où tu vas?! bloqua Marie la porte. Amélou, questce qui se passe?!

Rita est dans notre appartement! Pierre la laissée!

Quelle Rita? Celle qui se plaint tout le temps?

Celleci!

Amélie sélança dans lescalier, attrapa un taxi dune main tremblante. Le chauffeur, hésitant, demanda ladresse à plusieurs reprises, tandis quelle hurlait, pressait le véhicule.

Le trajet sembla durer une éternité. Amélie, le regard rivé sur la vitre, revivait les souvenirs de Rita: la petite sœur de Pierre, «la éternelle ratée», comme elle aimait se qualifier. Trentecinq ans, trois mariages, une suite de jobs où elle finissait toujours par être licenciée.

Quand tout avait commencé, Rita avait été douce, souriante, félicitant Pierre. Puis les appels : «Je nai plus dargent, mon mari ma larguée, je nai nulle part où aller». Pierre, toujours généreux, lui proposait un lit, de largent, un toit. Amélie, dabord tolérante, avait fini par voir le jeu.

Rita venait une fois par mois, restait des semaines, envahissait lappartement, transformait la cuisine en champ de bataille, parlait au téléphone pendant des heures. Pierre, suppliant, disait que Rita était seule, quil fallait laider.

La dernière fois, Rita était restée un mois. Amélie, à bout, avait confronté Pierre: plus de tolérance, la petite famille avait besoin dintimité. Pierre avait accepté, Rita était partie, puis trois mois sans nouvelles.

Et maintenant? Sans prévenir, elle était de retour.

Le taxi sarrêta devant limmeuble. Amélie paya, courut les escaliers, ouvrit la porte avec sa clé. Lodeur dun parfum inconnu la frappa en plein visage.

Elle entra. Rita était bien installée sur le canapé, le téléviseur allumé, une poignée de chips entre les doigts.

Oh, Amélou! sexclama la bellesœur, ravie. Tu es là! Pierre ma dit que tu allais rester chez maman tout le mois!

Tout le mois?! le sang dAmélie monta à ébullition. Rita, questce que tu fiches ici?!

Jhabite, haussaelle les épaules. Pierre a donné son feu vert. Il a dit que tu ny serais pas opposée.

Pas du tout! Où est Pierre?!

Au boulot, il a des urgences, il va tarder.

Amélie tenta dappeler son mari. Aucun décroché. Elle rappela, puis envoya un message: «Pourquoi astu laissé Rita entrer?!»

Une réponse arriva une minute plus tard: «Chérie, je suis en réunion, je texpliquerai plus tard.»

Rita, sors de chez nous, lança Amélie, glaciale.

Comment? posa Rita, posant ses chips. Où je dois aller? Mon appartement a inondé! Les travaux dureront au moins un mois! Pierre ma dit que je pouvais rester ici!

Sans mon accord!

Mais il est le propriétaire! Lappartement est à son nom!

Amélie serra les poings. Oui, lappartement avait été acheté avant le mariage, Pierre avait mis plus dargent, elle navait jamais exigé la copropriété.

Cest notre appartement, Amélie, déclara Rita, hautaine. Et je nai pas besoin de ton autorisation!

Tu ne peux pas tapproprier ma maison! cria Amélie, les larmes aux yeux.

Rita, outrée, répliqua: «Pierre est mon frère, il est ma famille! Et toi? Juste la femme! Les épouses viennent et repartent!»

Le choc était total.

Cest fini. Demain matin, tu pars, dit Amélie, se dirigeant vers la porte.

Jamais! Pierre ma donné un mois! hurla Rita.

Amélie claqua la porte, descendit dans le hall, les mains tremblantes, la gorge serrée.

Pierre arriva une heure plus tard, la regarda, sarrêta.

Amélie, que faistu?

Jattends que tu mexpliques pourquoi Rita squatte notre appartement!

Calmetoi, on va parler,

Parler? Tu as laissé ta sœur entrer sans me prévenir! Tu lui as dit que jallais passer le mois chez ma mère! Doù tienstu ça?!

Tu disais que ta mère était seule, quil fallait lui rendre visite plus souvent

Visiter! Pas emménager! Pierre, cest aussi mon appartement!

Rita na nulle part où aller! Son appartement a inondé, cétait un cauchemar. Je ne pouvais pas la refuser.

Tu aurais pu me consulter!

Pierre resta muet, puis murmura: «Je nai pas pu la chasser.»

Mais je suis la femme de la maison!

Je comprends, mais je ne pouvais pas la laisser à la rue.

Amélie, furieuse, saisit son sac. Tu sais quoi, Pierre? Vis avec ta sœur émotionnelle! Quant à moi, je rentre chez ma mère, et ce nest pas pour un mois, mais pour toujours.

Amélou!Questce que tu fais?

Elle savança vers la sortie. Pierre, désemparé, resta planté. Amélie se retourna, le vit les épaules affaissées, puis repartit vers lescalier.

Elle attrapa un taxi, se rendit chez Marie. Maman, je nen peux plus! sanglotaelle.

Marie la serra dans ses bras. Je le savais, ton mari est un vrai fils de maman!

Jai tout supporté, je lai aidé, et il me traite de «femme de passage».

Rita cest une vraie tornade. Souvienstoi du jour de votre mariage, elle saccrochait à Pierre comme à son voile.

Que faire maintenant?

Vivre, ma fille. Laisse Pierre réfléchir.

Amélie rentra dans sa vieille chambre, le téléphone vibra sans cesse. Pierre appelait, envoyait des messages, elle ne répondait pas.

Le lendemain, un message de Rita: «Amélou, ne te fâche! Jai fait des tartes, viens!»

Amélie bloqua le numéro.

Une semaine passa. Elle allait travailler, puis rentrait chez sa mère. Pierre appelait chaque jour, suppliant de revenir, promettant de parler à Rita. Amélie restait muette.

Sophie, son amie, la téléphona:

Amélou, pourquoi tu ne dors plus chez toi?

Comment le saistu?

Jai vu Rita sur le balcon, elle agitait les bras, crie que cest une pendaison de crémaillère.

Amélie sentit le feu revenir. Elle se rendit à la rue de la Paix. En haut, la porte souvrit sur un appartement méconnaissable: le mobilier déplacé, des rideaux flamboyants, des vases partout.

Amélou! sécria Rita, en peignoir. Tu me manques?

Questce que tu fabriques?!

Je minstalle! Pierre ny voit pas dobjection.

Où est Pierre?!

Au travail, quoi!

Amélie entra dans la chambre. Le lit était recouvert du linge de Rita.

Tu dors dans notre lit?!

Et pourquoi pas? Le canapé, cest trop petit pour moi!

Tu nes quune invitée!

Pierre ma dit que je pouvais rester aussi longtemps que je veux!

Pierre, Pierre! jeta Amélie les affaires de Rita du lit. Cest aussi mon appartement! Partout, tu nas aucun droit!

Rita pâlit.

Tu nas pas le droit de mexpulser! Lappartement est à son nom!

Mais je suis sa femme! Jai le même droit!

Alors reste! Jai la place!

Je ne veux pas vivre avec toi!

Et je nai rien à faire! Je ne pars jamais! Mon logement est en rénovation!

Trouve un autre toit!

Je nai pas dargent!

Travaille!

Amélie, furieuse, saisit son sac et cria: «Rita, tu vas rester ici, seule, avec Pierre! Je ne reviendrai plus jamais!»

Elle sortit, claqua la porte, descendit, monta dans sa voiture.

Le soir, Pierre lappela.

Amélou, Rita ma dit que tu étais venue crier.

Crier? Elle a tout refait dans notre salon! Elle dort dans notre lit!

Elle elle se sent plus à laise

Retourne! Retourne, sinon je ne reviendrai plus.

Rien à discuter! Rita part ou je pars.

Mais elle est ma sœur!

Et moi? Tu peux me perdre?

Pierre resta muet.

Amélie raccrocha.

Un mois passa. Rita continua dhabiter lappartement. Pierre vint voir Amélie, la suppliant de revenir. Elle refusait.

Léa, lamie de Rita, lappela.

Amélou, on doit parler.

De quoi?

Rita ma tout avoué. Elle a volontairement inondé son propre appartement pour pouvoir venir chez Pierre.

Amélie resta bouche bée.

Cest vrai?

Elle la dit: «Je nen peux plus dêtre seule, je veux revenir chez mon frère».

Les captures décran montrèrent les messages où Rita se vantait davoir piégé Pierre.

Amélie, le visage blême, remercia Léa, envoya les preuves à Marie. Puis appela Pierre.

Viens, cest urgent.

Il arriva en demiheure. Amélie lui tendit le téléphone. Pierre lut, pâlit, la gorge se serra.

Cest vrai?

Oui. Rita a volontairement fait inonder son appartement, puis a demandé à Pierre de lhéberger.

Pierre sassit, le cœur lourd.

Je ne savais pas

Maintenant tu sais.

Dieu, pardonnemoi, Amélou! Jai été idiot, je pensais aider ma sœur.

Elle ta manipulé.

Que faire maintenant?

Lexpulser, tout de suite.

Pierre acquiesça, se leva.

Tu viens avec moi?

Non. Gère ça toimême, cest ta sœur.

Il partit. Amélie sallongea sur le canapé, les yeux clos, épuisée.

Pierre revint tard, le visage pâle, les yeux rouges.

Elle a été expulsée?

Oui. Elle a pleuré, juré que tout était faux. Mais jai montré les messages. Elle a avoué quelle me détestait, que je lavais ruinée.

Et toi?

Jai dit que je ne voulais plus jamais la voir.

Amélie le regarda, sincère.

Tu réalises que tu as failli me perdre?

Je le sais. Et je ne me pardonnerai jamais.

Je reviendrai, à une condition.

Laquelle?

Que Rita ne franchira plus jamais le seuil de notre foyer, sous aucun prétexte.

Promis.

Une semaine plus tard, Amélie revint dans lappartement. Pierre avait tout remis en ordre, débarrassé les affaires de Rita, replacé le mobilier.

Pardon, Amélou, jai été aveugle,

Tu las été, mais tu as changé. Jespère que cest pour toujours.

Rita avait encore essayé dappeler pendant un mois, Pierre ne décrocha plus. Finalement, elle disparut, trouva un travail, récupéra son propre logement.

Cest triste,? dit Amélou.

Pas vraiment, répondit Pierre. Elle a choisi sa voie.

Ils ne parlèrent plus jamais de Rita. Ils reconstruisirent leur vie, firent des projets. Pierre fit inscrire lappartement aux deux noms, afin quAmélie se sente pleinement maîtresse des lieux.

Le canapé vert, celui quils avaient choisi trois mois plus tôt, trônait toujours à sa place,Et chaque soir, en sasseyant côte à côte sur ce même canapé vert, ils se promettaient mutuellement de ne jamais laisser le passé troubler la lumière de leur avenir.

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Je suis déjà installée dans ton appartement — a annoncé ma belle-sœur en envoyant une photo de mon canapé.
«J’ai 67 Ans, Je Vis Seule… J’ai Demandé à mes Enfants de m’Accueillir, mais Ils Ont Refusé. Je Ne Sais Plus Comment Vivre»