BORCH FAMILIAL : UN CLASSIQUE RUSSE À PARTAGER EN FAMILLE

Cher journal,

Ce matin, Pierre a reniflé lair de la cuisine avec un mépris presque animal. « Encore du bœuf à la sauce tomate et du chou de lan dernier ? » sest-il plaint, en rappelant leurs fréquents allersretours dans les fastfood et les restaurants chics de Paris. « Tu ne pourrais pas préparer autre chose que ce vieux potage ? Beurk ! »

« Il y aura des boulettes, une salade à la mayo, des crêpes, et même des tranches de jambon, » a rétorqué Albertine, piquée au vif, puis a ajouté dune voix tranchante : « Laissemoi tranquille, vieux crétin. Sans toi, je men sortirai. Fuis dici avant que je ne te frappe avec la louche. Attends, reste. Éteins la marmite dans cinq minutes, je pars. » Elle a arraché son tablier dun geste brusque.

« Où vastu ? » a demandé Pierre, embarrassé, les yeux clignant vers le four.

« Chez le fils. Ils ont dit quils seraient là dans dix minutes. Jen profiterai pour acheter du pain, il paraît que certains ne mangent jamais assez. » Albertine sest corrigée devant le miroir, réarrangeant ses cheveux courts, jadis si rebondis et fiers, désormais ternes comme les feuilles dun automne qui ne veut plus se coucher. Le temps avait fait faner la fleur quelle était autrefois, et elle acceptait la décadence sans illusion.

« Ils sont petits, non ? Ils se débrouilleront tout seuls, » a étonné Pierre.

« Pas question, Pierre, ne me fais pas rêver. Souvienstoi de la marmite, et couvretoi, mon dieu, tu ne peux pas rester en sousvêtements, » a répliqué Albertine, sourde à son propre ton aigri. « Pourquoi tu es si fâchée aujourdhui ? » a tenté de raisonner Pierre.

Albertine, les hanches se balançant comme un vieux manège, a pris lascenseur et sest dirigée vers le hall. Elle ne pouvait plus supporter les visites de filles superficielles, toujours plus exigeantes, végétariennes dun jour, diététiques dun autre, qui ne savaient jamais comment manier le couteau du restaurant. Elles dédaignaient tout ce quelle cuisait, et elle, las, a décidé de ne rien faire dextraordinaire : simplement offrir un plat simple, suffisant pour combler la faim.

La rue de Montmartre la accueillie avec la fraîcheur dun matin de mai. En inspirant lair pur, Albertine a vu le SUV argenté de son fils arriver. Pascal, maintenant trentesept ans, na ni titre ni statut, il vit de ses projets en ligne, bricolant des programmes comme on tisse une toile. Il rêve dune famille, dun petit bébé ; Albertine, elle, désire ardemment un petitenfant, pendant que ses amies sont déjà dans leurs petites maisons, elle, seule, se sent abandonnée. Les filles de Pascal, toutes mariées, refusent denfanter.

« Maman, pourquoi être sortie ? Nous aurions monté les escaliers nousmêmes, » ma enlacé Pascal en me présentant sa compagne. « Voici Mazarine. »

« Bonjour, » a dit Mazarine avec un sourire poli.

Albertine a pâli, mais un souffle de soulagement la traversée : enfin quelquun qui ne joue pas à lintrigue, qui ressemble à une vraie personne, un peu comme une paysanne du terroir.

« Attends, maman, il y a un sac de boissons et une boîte cadeau de Mazarine dans le coffre. »

« Vraiment ? » a demandé Albertine, intriguée, tandis que Mazarine rayonnait.

« Elle travaille pour lécologie, milite pour la propreté du cadre de vie, alors le présent colle à son activité, » a expliqué Pascal en soulevant la boîte lourde.

Albertine, se sentant déjà désabusée, a pris le sac dune façon mécanique, comme un robot, et la déposé dans lentrée.

Après les salutations dusage, nous nous sommes assis autour de la table. Mazarine, sans broncher, a plongé sa cuillère dans le potage. Elle parlait timidement de son travail, presque à voix basse, comme une petite pièce dune grande chaîne de surveillance environnementale. Albertine a insisté :

« Cest un travail officiel ? »

« Oui, je suis en contrat. »

« Tu vois, Pascal, toi qui nas jamais de contrat, ta fiche de paie prend la poussière depuis dix ans. Et si tu tombes malade ? Tu ne penses pas à la retraite ? Le temps file, tu as déjà trentesept ans. »

Pascal a ri, « Je ne vivrai pas jusquà la retraite, ne tinquiète pas. »

Albertine, irritée, a rétorqué : « Un jour, tu seras assis à ne rien faire, alors ne me dérange plus, tu me donnes la nausée. Papa, sors une crêpe et du fromage. »

Pascal voulait porter un toast, mais son père linterrompait toujours, levant son verre et lançant des souhaits.

Mazarine, un peu rougissante, a proposé daider à débarrasser la table. En voyant le désordre et la plaque de cuisson peu brillante, elle a crié :

« Le cadeau est là ! Jai presque oublié. »

Elle a sorti la boîte, révélant des produits de nettoyage écologiques, faits à base de fruits et légumes, qui se dissolvent dans leau sans nuire à la planète. « On les teste maintenant ? » a lancé Mazarine, rayonnante.

Albertine, effrayée, a reculé : « Non, chérie, ne touche pas à la plaque, je ne lai pas lavée depuis trois jours. »

Mazarine a plaisanté : « Jai vu toutes sortes de plaques dans mon village, faisle à ta façon, je finirai avec une éponge. »

Elle a lavé la vaisselle avec une grâce presque chorégraphique, posant des questions sur son parcours, ses parents, sa rencontre avec Pascal. Les réponses étaient correctes et satisfaisantes, et Albertine se sentait rassurée.

Quand Mazarine a frotté la plaque, la saleté sest évanouie sans effort. Albertine, encore méfiante, a murmuré :

« Merci pour les cadeaux, ma petite Mazarine, mais je garde les yeux ouverts. »

Le bruit dun verre a rappelé Pascal, qui a proposé de se rassembler sur le canapé. Il a enlacé Mazarine, posé sa main sur son ventre et a annoncé :

« Maman, papa Mazarine et moi, on va se marier. »

Un silence, puis un souffle : « Et ce nest pas tout Nous attendons un bébé, lhiver prochain, un petitenfant. »

Albertine a sauté, les bras en lair, criant :

« Quelle joie, Dieu ! La Vierge a entendu mes prières, les anges ont souri ! »

Elle a embrassé Mazarine : « Viens, ma chère, soleil de ma vie, je te serre fort, mais ne te laisse pas emporter, je sais comment prendre soin dune femme enceinte. »

Mazarine, les larmes aux yeux, a murmuré :

« Albertine, pourriezvous me transmettre vos recettes ? Je ne sais pas cuisiner un bon bœuf comme vous, surtout le fameux potage. »

Albertine, toute émue, a éclaté :

« Ma chère Mazarine, cest mon rêve, partager mon savoir, offrir mon amour au futur petitenfant. Grâce à toi, mon rêve modestement caché devient réalité. »

Et je termine ce jour, le cœur léger, avec lespoir que ce nouveau chapitre remplira enfin ma maison de rires denfants.

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Tu resteras seule, n’est-ce pas ?