Je vous raconte ce qui sest passé il y a quelques semaines dans la ville de Lyon, où le juge François Caprio est connu de tous les avocats comme dun bon père de famille. Un lundi matin, une jeune femme totalement aveugle, nommée Adèle Lemoine, est entrée dans le tribunal du Rhône avec son chien guide, un golden retriever vêtu dun gilet bleu. Elle portait dans la main une canne blanche et, curieusement, une petite canne de marche en bois.
Sur le bureau du juge reposaient six amendes de 40 euros chacune, toutes infligées en lespace dune semaine pour stationnement sur une place handicapée. Adèle, dune voix calme, a expliqué : «Je nai jamais conduit de voiture. Les policiers mont vue sortir dun VTC avec mon chien guide et ont supposé que jétais conductrice.» Le juge, intrigué, a demandé : «Vous dites quune femme aveugle et son chien ont reçu une contravention pour stationnement?»
Adèle a hoché la tête. «Un policier ma reproché dêtre trop sûre de moi pour être aveugle, comme si mon chien nétait quun accessoire.» Le silence sest installé dans la salle daudience. Le juge a immédiatement fait venir le représentant de la Commission des Malvoyants, qui a confirmé quAdèle était aveugle depuis la naissance et que son chien, nommé Malo, était officiellement reconnu comme chien guide.
Sur demande du juge, Adèle a montré comment Malo laidait. «Malo, trouve la porte,» a-t-elle dit. Le chien la conduite sans heurt jusquà la sortie, puis la ramenée auprès du juge. Un applaudissement a retenti. «Il est mes yeux,» a déclaré Adèle.
Le juge a alors convoqué linspecteur Julien Martin, qui avait dressé trois des amendes. «Je ne pensais pas que vous étiez aveugle,» a-t-il protesté. Le juge a rétorqué : «Quand on vous dit quune personne est handicapée, vous ne pouvez pas juger de son apparence. Cest du préjugé.»
Lenquête a révélé que, lan dernier, Lyon avait infligé 247 amendes à des personnes handicapées, dont 89 à des aveugles. Le juge Caprio a décrété : «Ça suffit.» Les six contraventions ont été annulées, la municipalité sest excusée publiquement, et linspecteur Martin a suivi une formation sur le handicap et a rédigé une lettre dexcuses.
Adèle a ensuite fondé lassociation «Vision au-delà des Stéréotypes», qui forme les policiers et sensibilise le public. Son témoignage lors dune conférence TED a marqué les esprits : «Si vous mavez vu marcher avec assurance, pensez que votre incompréhension nest pas mon handicap, mais votre préjugé.»
Aujourdhui, dans le bureau du juge Caprio, on voit encadrée la copie dune des amendes, avec la mention : «Rejetée les préjugés pèsent plus que le handicap.» Adèle vit toujours à Lyon, mariée à son fidèle guide Malo. Lorsquon la croise dans la rue, elle répond avec le sourire : «Le monde navait pas besoin que je voie ; il devait simplement ouvrir les yeux.»







