Quand on marche à deux, le chemin est plus court

Cher journal,

Aujourdhui, en préparant des croissants avec ma mère, Madame Dubois, Aline sest exclamée,«Regarde la forme que jai donnée à ce croissant!». Elle était toute fière, les yeux brillants démotion. Ma mère, souriante, lui a répondu: «Quand tu seras grande, tu auras ta propre famille et tu deviendras une excellente cuisinière. Tout le monde taimera et te respectera, parce que tu es un être merveilleux. Je souhaite tant que tu sois heureuse.»

Ces paroles résonnaient encore dans mes oreilles alors quelle essuyait les larmes qui coulaient sur ses joues. Aline était assise sur le banc du parc voisin, ses jambes tremblantes, et tout sest effondré en un instant. Elle se souvenait du jour où, enfants, elles sétaient assises sur ce même banc pour déguster une glace sur bâton. Cétait dans une autre vie.

«Je suis seule au monde», pensait-elle, «et je nai plus de maison. Après linternat, on ma donné une chambre dans une résidence universitaire bruyante, dans une ville qui nest pas la mienne. Jaimerais tant vivre dans ma vieille maison, mais elle nest plus à moi.»

Aline navait que sept ans lorsquelles rentraient du supermarché. Soudain, un gros homme sest approché et a exigé de largent à sa mère. Elles avaient presque tout dépensé. Lhomme a menacé, mais Madame Dubois a reculé, a trébuché et est tombée, se cognant le crâne contre une pierre.

Aline a supplié sa mère douvrir les yeux, de se relever, mais elle ne la pas entendue. Lambulance a hurlé, les secouristes ont emmené la mère et la fille. Aline a été placée en foyer. Elle a peiné à shabituer à cette nouvelle vie qui ne lui plaisait pas du tout.

Assise sur le même banc, elle repensait à son lit denfance, aux photos de sa mère dans ses bras. En sapprochant de la vieille maison, une tante grincheuse la interceptée: «Tu ne vaux rien, petite orpheline. Cette maison est maintenant à moi, tout ce qui sy trouve mappartient. Pars dici, sinon jappelle la police.»

Aline comprit quelle était seule, sans aucun secours.

Soudain, une voix familière lappela: «Aline, salut». Elle leva les yeux et vit un jeune homme au sourire chaleureux. Il sappelait Michaël. Il se rappelait leurs années de maternelle et de première classe, où ils étaient assis côte à côte, surnommés «le futur marié et la future mariée». Elle se souvint de lui, plus grand, aux épaules larges, boxeur, même champion de la région.

Michaël ma raconté quil avait rencontré Tante Jeanne, qui lui avait dit que je devais revenir bientôt, car javais désormais dix-huit ans, comme elle. «Je viens chaque jour près de votre maison pour ne pas vous perdre de vue», avait-elle ajouté.

Tante Jeanne, plus âgée dune dizaine dannées que Madame Dubois, travaillait avec elle et était devenue son amie. Elle parlait souvent de la mère dAline comme dune petite sœur et dAline comme dune fille.

«Michaël, jai oublié Tante Jeanne, elle vit à trois maisons dici,» dit Aline. Michaël proposa daller la voir, en soulevant son sac contenant quelques effets personnels, quelques euros et les papiers qui restaient. «Notre village connaît bien les histoires de la maison. Tante Jeanne tattend, elle taccueillera.»

Nous nous dirigeâmes lentement vers la maison de Tante Jeanne, qui avait essayé dadopter Aline après le décès de sa mère, sans succès. Elle avait malgré tout offert un toit.

Lorsque Tante Jeanne ouvrit la porte, les larmes lui montèrent aux yeux. «Ma petite Aline quel bonheur de te revoir!», sécria-t-elle, membrassant et me serrant dans ses bras. Elle invita également Michaël à entrer.

«Je suis rassurée, tu es en de bonnes mains,» déclara-t-il. «Si besoin, Tante Jeanne sait où me trouver, et je reviendrai demain.»

«Viens souvent, Michaël,» dit Tante Jeanne, en refermant la porte, «Tu es un gars formidable, toujours curieux de savoir où jen suis.»

Aline sinstalla à table. «Je vais te nourrir, repose-toi. Tu voulais rentrer chez toi? On ne ta pas laissée entrer? Pardonne-moi de ne pas tavoir prévenue, mais je tattendais. Je taime, ma petite. Nous vivrons ensemble, comme on le dit: à deux, le chemin est plus court.»

Quelques heures plus tard, elle dormait sous une couverture chaude, rêvant dun champ fleuri où elle se promenait avec sa mère, arrachant des fleurs. Le lendemain, au petit déjeuner, Tante Jeanne promit: «Il faut que tu ailles à la Caisse dAllocations Familiales, jirai avec toi.»

«Non, Tante Jeanne, je suis assez grande pour régler mes affaires,» répliqua Aline en sortant vers larrêt de bus, passant devant son ancienne maison. Une femme qui y habitait linterpella: «Encore ici? Tu vas encore voler quelque chose, tes yeux ne tont jamais vu!»

Avant quelle ne réponde, Michaël la défendit dune voix forte: «Ne diffamez pas Aline. Vous pourriez répondre de votre calomnie.»

Sur le chemin, Michaël lui parla dun nouveau café ouvert à proximité, dirigé par un ami de son père, ancien militaire, qui cherchait du personnel. «Romain Serge, le patron, ma promis de taider,» dit-il.

«Daccord, mais dabord réglons le problème de la maison,» insista Aline.

Michaël, confiant, déclara: «Nous ferons triompher la vérité.»

Le combat pour la maison savéra plus complexe. Sans acte de propriété, la police exigea une plainte. Une voisine révéla quelle avait vu la même femme passer chez Madame Dubois, la qualifiant de «orpheline du foyer». Michaël soupira et rassura Aline: «Dans notre village, tout le monde sait ce qui se passe. Le chef de police protège les puissants, mais nous nallons pas avoir peur. Si besoin, nous irons en préfecture.»

Le soir, Aline fit les courses pour Tante Jeanne. En rentrant, un policier la stoppa: «Oublie ta maison. Tu as trois jours pour partir, sinon tu finiras comme ta mère.»

Effrayée, elle sentit ce ton familier. Le lendemain, Michaël arriva avec une proposition: «Allons au café, je te présenterai le directeur, tu deviendras chef pâtissier.»

Le directeur, Romain Serge, était doux et intéressé par son histoire. «Si quelquun te menace, fais-le moi savoir. Jai des contacts dans les forces de lordre,» ajouta-t-il.

Aline raconta lincident du policier. Romain confirma: «Il nous a menacés? Nous le connaissons, il a des antécédents.»

Elle aimait travailler au café, dabord aidecuisine, puis assistant du chef grâce à son talent au couteau. Romain proposa même de la financer pour des études culinaires dès que la maison serait réglée.

Un soir dautomne, on lui demanda de remplacer une cuisinière. En rentrant, le même policier surgit, brandissant un couteau. Aline ferma les yeux, pensant que sa mère serait là pour la protéger. Mais des agents arrivèrent, menottant lhomme. Romain arriva et la conduisit chez elle, expliquant quils avaient enfin arrêté le réseau de corruption qui trafiquait les biens immobiliers.

Le bureau de police mit à jour les titres de propriété de la maison dAline. Michaël et elle se rendirent sur la tombe de sa mère, où il la laissa parler seule.

«Maman, je vis maintenant avec Michaël dans notre maison. Nous nous sommes mariés, il a rénové, tout est beau. Il maime, je laime. Romain Serge a promis de me prendre sous son aile quand jaurai mon diplôme.»

Je ferme ce journal avec une pensée : la route peut être longue, mais lorsquon la parcourt à deux, le fardeau sallège et la destination devient plus claire. La persévérance et le soutien mutuel transforment les épreuves en leçons de vie.

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