**Journal intime 15 avril**
Aujourdhui, quelque chose détrange sest produit. Je suis allée chez lépicerie du coin, *LÉclat*, comme dhabitude. Une routine. Pourtant, tout a basculé lorsque la vendeuse, Élodie, ma attrapé le bras en chuchotant : *« Pars, vite. »*
Je ne comprenais pas. Son regard était figé, ses doigts tremblaient. *« Ce sont eux ceux qui ont attaqué la boulangerie hier. »* Elle avait pressé le bouton dalarme, mais la gendarmerie mettrait des minutes à arriver. Et ces deux hommes près des bonbons lun grand, casquette enfoncée, lautre au visage dur ne semblaient pas être là pour du sucre en poudre.
Elle ma poussée vers larrière-boutique, entre les cartons de conserve et les sacs de farine. Une porte dérobée, rouillée, qui donnait sur une ruelle. Mon cœur battait à se briser. *« Et les autres clients ? »* ai-je murmuré. *« Allez, vite ! »* a-t-elle insisté, avant de retourner vers son comptoir, aussi pâle quun linge.
Je me suis enfuie, les jambes flageolantes, jusquau poste de gendarmerie, deux rues plus loin. Le brigadier Lefèvre ma écoutée, les sourcils froncés. Les sirènes ont hurlé.
Quand tout fut terminé, on ma raconté : un coup de feu en lair (un pistolet à gaz, heureusement), une jeune mère terrifiée, un vieil monsieur qui avait failli sévanouir. Mais les gendarmes les avaient coincés près des bacs à recyclage. Élodie, malgré ses mains tremblantes, avait réussi à décrire leurs visages à la perfection.
En rentrant, jai croisé ma voisine, Margaux, sur le palier. *« Tout va bien, Sophie ? Tu es livide ! »* Jai hoché la tête, incapable de parler.
Maintenant, assise devant ma tasse de tisane, je repense à tout cela. Demain, *LÉclat* rouvrira, avec peut-être un vigile à lentrée. La vie reprendra son cours. Mais quelque chose a changé. Ce nest pas la peur qui me reste cest cette certitude étrange que le quotidien, même à Montluçon, même entre les rayons dune épicerie, peut basculer en un instant.
Demain, jirai remercier Élodie. Et peut-être apporterai-je des croissants.







