28février2025
Cher journal,
«Éléonore, pourquoi voudrionsnous un enfant?» sest emparée ma femme ce matin, «nous nous portons très bien à deux!». Elle ma rappelé que les enfants sont un fardeau: les nuits sans sommeil, les couches à changer à toute heure, le corps qui se transforme en souche de vache après laccouchement «Je ne veux pas sacrifier ma jeunesse», at-elle conclu. «Repoussons larrivée du bébé de six ans, daccord?»
Nous étions mariés depuis cinq ans, et au départ tout ressemblait à un conte de fées. Petit à petit, jai glissé lidée de la maternité dans son esprit, tandis quÉléonore se débattait pour la retarder, puis, un jour, a déclaré quelle ne voulait plus entendre parler denfants. Nos disputes se sont intensifiées, les éclats se sont multipliés. Jai fini par user du chantage, mais elle ne cessait de répéter:
«Jean, à quoi bon ce petit paquet de salive et de croûtes?Les nuits blanches, les couches qui débordent, un corps qui ressemble à celui dune vache après un veau, et une fatigue permanente. Cest tout ce que jai pu énumérer!Je ne veux pas enterrer ma jeunesse pour ça. Attends un peu!»
Avant le mariage, Éléonore rêvait dune grande famille. «Bien sûr, mon chéri, nous aurons beaucoup denfants! Au moins trois! Mais pas tout de suite, daccord? Dabord un temps pour nous, installer notre vie, puis nous concevrons.» Cinq ans plus tard, elle affirme soudain quelle nest «pas encore prête». Moi, qui ai toujours espéré un héritier, je tente de la convaincre que le moment est venu:
«Éléonore, huit ans ensemble, dont cinq mariés, il est temps de penser à la descendance! Nous avons un appartement à Paris, une voiture, un compte dépargne où nous avons déjà mis de côté les 10000 nécessaires pour le congé maternité et tout le reste. Quattendonsnous?»
«Comment saistu que cest le bon moment?» at-elle rétorqué, «jai tant de projets, tant de choses à accomplir! Un bébé ne rentre pas dans mon planning. Pourquoi voudrionsnous un troisième?»
Je me suis emporté : «Quentendstu par «troisième»?Tu parles de lenfant comme dun étranger! Quand mûrirastu?Dans une famille normale, il faut des enfants. Je veux être père, point final! Avant le mariage tu disais le contraire.»
Elle a explosé: «Cest facile pour toi de parler!Ce nest pas à toi de porter neuf mois de ventre, de souffrir du nausée, de prendre du poids! Jai passé cinq ans à la salle de sport! Et maintenant, tout cela seraitil foutu?Je ne veux pas perdre ma silhouette, je ne veux pas abandonner mon mode de vie! Après lenfant, je passerai cinq ans à ignorer amis, boutiques, vie normale! Pourquoi le feraisje?»
Jai essayé de la rassurer: «Tout le monde vit comme ça! Le bébé grandira, tu reviendras à tes loisirs, et je taiderai à chaque étape.»
Elle a proposé de remettre la discussion à dans cinq ou six ans. «Je ne suis pas prête maintenant! Ce nest pas ton corps, cest le mien, et je décide ce que jen fais. Je ne veux pas le déformer.»
Nous avons tenté mille stratagèmes: soirées cinéma avec des films sur la parentalité, balades dans les parcs et près des aires de jeux, visites chez ma sœur où venait de naître son quatrième enfant, même des promenades pour quÉléonore touche le bébé. Son instinct maternel restait absent, comme sil nexistait pas.
Finalement, jai brandi lultimatum:
«Éléonore, si tu ne veux pas denfants avec moi, ce nest plus notre chemin! Divorçonsnous. Chacun reprendra sa route. Tu trouveras quelquun qui partage tes convictions, et moi je ne resterai pas seul.»
Elle a eu peur: elle travaille à domicile, je laide quotidiennement, une séparation impliquerait un nouveau travail, un nouveau logement. «Attends, Jean!Pourquoi parler de divorce?Tu veux vraiment perdre tout ça?»
Je lui ai rappelé que jai grandi dans une famille nombreuse, que le mariage sans enfants est voué à léchec, que je me sens trahi: «Avant le mariage tu disais que tu voulais des enfants, maintenant cest la peur de prendre du poids!»
Elle a argumenté que le coût dun enfant serait énorme, que nous devrions renoncer à tout: «Je ne veux plus sortir, rester à la maison 24h/24, subir insomnie et fatigue.» Jai rétorqué que nous pourrions engager une nounou, une femme de ménage, que les parents nous aideraient, que le problème était son attitude froide.
Sa tante est intervenue, la critiquant: «Éléonore, tu te comportes honteusement! Tu oublies que tu es mariée! Tu traînes dans les bars pendant que je travaille!» Éléonore a tenté de se défendre, mais la tante a insisté: «Tu dois mettre au monde un enfant, sinon tu perdras la raison.»
Éléonore, ne voulant pas renoncer à ses projets de voyages et de shopping, a feint daccepter, à condition que la nounou soccupe du bébé. Jai cru à son accord, tandis quelle continuait à prendre des pilules et à consulter un médecin ami qui lui conseillait de «se détendre, oublier le bébé pour le moment».
Six mois plus tard, le test de grossesse a affiché deux bandes. Elle a paniqué: «Et maintenant?Faire un bébé, gâcher ma vie planifiée?»
Jean a sursauté dans la salle de bains: «Questce que cest?» Il a arraché le test des mains dÉléonore.
«Éléonore!Tu es enceinte!Mon Dieu, je vais être père!», sestil exclamé, me soulevant dans les bras, tournoyant dans la salle. «Merci, mon amour!Cest le plus beau jour de ma vie.»
Nous avons célébré au restaurant Le Procope. Un anneau scintillant à son doigt, moi en costume sombre, je répétais: «Nous serons les meilleurs parents du monde! Tu ne manqueras de rien, je te le promets.»
Cette nuit, elle na pu dormir, le visage joyeux de Jean hantait ses pensées: «Et si le bébé rendait vraiment notre vie meilleure?Et si javais peur du changement?Je peux encore faire du sport, rester jolie les femmes sen sortent.Après tout, cest le fruit dun homme que jaime.»
Le temps a filé. Neuf mois plus tard, Éléonore a donné naissance à un petit garçon en bonne santé. En le prenant dans ses bras, elle a vu ce petit visage, un minuscule bout de chair qui ressemblait étrangement à moi, poussant de petits gémissements. Tous ses doutes se sont évanouis.
«Mon», at-elle murmuré, les larmes coulant sur ses joues. Nous lavons nommé «Samuel». Dès les premiers jours, Éléonore sest immergée dans la maternité: allaitements, berceuses, promenades au parc du Luxembourg. Elle jalousait parfois le fait que je le tenais. Chaque soir, assise près du berceau, elle se demandait: «Comment aije pu être si stupide?Si javais su combien le bonheur que mapportera la maternité, jaurais accepté plus tôt.»
Je note ces lignes comme témoin de notre cheminement, de nos luttes et de notre finalement trouvée harmonie. Le futur reste incertain, mais aujourdhui, je sens que nous avons franchi le cap le plus important de nos vies.







