Oh, tu vas adorer cette histoire Cest lhistoire dune institutrice qui a vu son élève dormir dans la rue.
Clémence était létoile du CM2. Ses cahiers étaient parfaits, son sourire radieux. Toujours propre, toujours à lheure, toujours la première à finir. Mademoiselle Léa, sa maîtresse, ladorait, mais elle remarquait quelque chose détrange dans ses yeux, une hâte pour arriver et une réticence à partir Pas normal pour une fille de dix ans.
Maîtresse, je peux rester un peu pour aider ? demandait Clémence chaque soir.
Bien sûr, ma chérie, mais ta maman doit tattendre, répondait Léa, bien quelle ne voie jamais personne venir chercher Clémence.
Un mardi de pluie battante, Clémence arriva à lécole tremblante, les cheveux trempés. Mademoiselle Léa sinquiéta.
Clémence, quest-ce qui sest passé ? Ta maman ne ta pas accompagnée ?
Non, maîtresse. Jai glissé dans une flaque. Mais ça va, mentit-elle en essuyant ses larmes avec sa manche.
Ce soir-là, Mademoiselle Léa, rongée par un malaise, décida de suivre Clémence. Elle la vit marcher vite, se faufiler dans des ruelles jusquà un banc sous un arbre, dans un square couvert. Là, sa maman, enroulée dans une bâche, lattendait.
Le cœur de la maîtresse se serra. La petite Clémence navait pas de maison. Elles dormaient dans la rue, et son apparence impeccable était le résultat des efforts surhumains de sa mère pour quon ne les «découvre» pas et quon ne leur enlève pas Clémence.
Le lendemain, Mademoiselle Léa rassembla les enseignants. Elle leur raconta ce quelle avait vu, la voix tremblante. La nouvelle se propagea comme une traînée de poudre et arriva aux oreilles des élèves plus grands et de leurs parents, membres de lassociation des parents délèves.
Il faut faire quelque chose ! dit la directrice, les yeux humides.
Ma mère est coiffeuse, elle pourrait proposer un travail à la maman de Clémence, proposa une élève de cinquième.
Moi, jai un contact dans une agence immobilière, ajouta un professeur.
En moins de vingt-quatre heures, lécole devint un tourbillon de solidarité. Les élèves organisèrent une tombola avec des jouets et des livres donnés. Les profs mirent la main à la poche. Les parents se mobilisèrent à une vitesse incroyable.
Deux jours plus tard, Mademoiselle Léa appela Clémence et sa maman, Élodie, dans le bureau de la directrice. Élodie entra, pâle, les yeux baissés, sachant que son secret était découvert et redoutant quon lui retire sa fille.
Élodie, commença la directrice avec un sourire chaleureux, nous savons la vérité. Et personne nest ici pour vous juger ou vous séparer.
La maman de Clémence releva les yeux, confuse.
Au contraire, poursuivit la directrice en lui tendant une enveloppe. Dedans, il y a de largent. Cest de toute lécole. Ça couvrira un mois de loyer pour un petit appartement, le temps de vous installer.
Élodie ouvrit lenveloppe et ses yeux semplirent de larmes.
Et ce nest pas tout, dit Mademoiselle Léa en prenant sa main. Une de nos élèves ta trouvé un travail dans le salon de coiffure de sa mère. Cest laprès-midi, pour que tu puisses emmener et chercher Clémence à lécole.
Élodie nen croyait pas ses oreilles. Elle regarda Clémence, qui pleurait aussi, mais de joie.
Mais pourquoi vous faites ça ? demanda Élodie dune voix à peine audible.
Mademoiselle Léa se pencha et serra Clémence dans ses bras.
Parce que cette école nest pas quun bâtiment, Élodie. On est une famille. Et la lumière de ta fille, celle quelle nous offre chaque jour, nous a tous éclairés pour comprendre que parfois, la leçon la plus importante nest pas dans les livres, mais dans la vie. On ne veut pas que Clémence parte dans un foyer. On veut quelle ait un vrai chez-elle, avec toi.
Ce soir-là, quand Clémence quitta lécole, elle ne marcha pas vers le square. Elle prit la main de sa maman pour aller vers un petit appartement, un endroit quelles pouvaient enfin appeler «chez elles». Et même si les larmes coulaient encore, cette fois, cétait des larmes de bonheur, plus brillantes que le soleil. Sans le savoir, lécole navait pas seulement sauvé un toit, elle avait redonné de lespoir à deux cœurs.
