LA DEUXIÈME FEMME
Jétais certaine que mon ex-mari finirait par fuir cette femme.
Élodie nétait pas de son monde. Maladroite, capricieuse, une aventurière éperdue. Elle avait six ans de plus que Hugo.
À sa décharge, Élodie était charmante, toujours élégante. Elle savait se draper de mystère, jouer la femme énigmatique.
Mais dès quelle ouvrait la bouche, tout son charme sévaporait. Hugo, mon ex-mari, était son exact opposé : doux, attentionné, calme. Vous vous demandez pourquoi nous avons divorcé, avec un homme si parfait ? La faute était mienne. Je lavoue
Quand nous nous sommes séparés, Hugo a sombré dans lexcès. Dabord, il sest épris de sa collègue, Amandine. Elle le courtisait depuis des années, rêvant de devenir sa femme. Amandine élevait seule son petit garçon, qui avait besoin dun père. Elle se montrait prête à tout pour Hugo : repas mijotés, chemises impeccablement repassées Mais Hugo ne cherchait pas une mère, il en avait déjà une. Cette idylle professionnelle na duré que trois mois. Il sest finalement échappé de létreinte étouffante dAmandine.
Puis, ce fut au tour de ma meilleure amie désormais ex , Aurélie. Hugo lavait toujours trouvée à son goût. Il croyait que jignorais son faible pour elle. Libre, sans enfants, assoiffée damour Dès quAurélie a senti la faille dans notre couple, elle sest transformée en épaule réconfortante. Hugo a passé un an à osciller entre elle et notre foyer éteint. Toutes ses économies y passaient. Un mariage semblait inévitable.
Et puis, Élodie est apparue. Une rencontre chez des amis communs, qui ont joué les entremetteurs : *«Vous êtes tous les deux seuls, avec des enfants, pourquoi ne pas tenter votre chance ?»* Hugo lui a parlé dAurélie. *«Une fiancée nest pas une épouse !»* a rétorqué Élodie, catégorique.
Aurélie a dû seffacer. Élodie a traîné Hugo à la mairie, emménageant aussitôt avec sa fille, Léa, dans son appartement. À cette époque, Hugo et moi avions déjà vendu notre bien commun.
Léa avait quatorze ans. Une enfant difficile, qui poussait sa mère à bout : fugues, comportement rebelle
Une fois mariée, Élodie a suggéré à la mère de Hugo déchanger son deux-pièces contre un studio. *«À votre âge, cest plus pratique»*, a-t-elle insisté. La pauvre femme a obéi, soucieuse du bonheur de son fils. Avec largent de la vente, Élodie a rénové lappartement et sy est installée officiellement avec Léa.
Élodie était une éternelle victime. On lui volait son manteau en fourrure, elle avait des trous dans sa caisse, elle insultait les clientes fortunées Son patron a fermé les yeux tant que Hugo remboursait ses dettes. Dès la dernière somme versée, il la congédiée.
Hugo lui a proposé de rester à la maison. *«Ce sera plus économique»*. Elle a accepté, mais point de tricot ni de ratatouille.
Ce furent des après-midi interminables au café avec ses amies, des salons de beauté, des emplettes. Hugo rentrait épuisé, se faisait une omelette et attendait sa dulcinée. Comme on dit, *«la femme samuse, et lhomme en a la gueule de bois»*.
Chaque été, ils parcouraient lEurope. Hugo aimait avec passion, sans compter.
Les années ont passé
À vingt ans, Léa a eu un enfant, on ne sait de qui. *«Apporté dans un tablier»*, comme disent les anciens.
Élodie a dû soccuper du petit. Léa, elle, enchaînait les « papas » pour son fils, au grand agacement de Hugo. Élodie a alors exigé quil leur achète un trois-pièces *«Comme ça, elle trouvera un vrai mari»*. Hugo a obtempéré. Bientôt, Léa a rencontré un garçon gentil, qui les aimait toutes les deux. Mais Élodie la rejeté : *«Il ne gagne pas assez»*. Elle a pleurniché sur les partis plus riches. Le garçon est parti. Aujourdhui, cest Hugo qui subvient aux besoins de son petit-fils.
Pour son trentième anniversaire, notre fille a voulu réunir la famille éclatée.
Élodie a refusé de laisser Hugo y aller seul. Elle sest pointée avec lui. Après quelques verres, elle sest mise à me raconter ses préférences masculines : *«Jaime les mauvais garçons, les types brutaux»*, ma-t-elle lancé, un sourire narquois aux lèvres. *«Hugo nest pas du tout mon genre Mais cest ma baguette magique. Un petit moue, et il se met en quatre pour moi. Avec lui, cest la belle vie !»*
Visiblement lassée du foyer, elle sest immiscée dans les affaires de Hugo. Maintenant, il court emprunter de largent à notre gendre.
Voilà leur histoire.
Hugo et Élodie se sont mariés il y a vingt ans. Ils sont toujours ensemble. Je ne comprends pas
