Et ainsi se rencontrèrent trois solitudes

**Journal intime 15 décembre**

Trois solitudes se sont enfin rencontrées. Une femme encore belle, malgré les années, venait de coller une nouvelle annonce sur un réverbère avant de séloigner lentement, le dos légèrement voûté. Sa silhouette fragile commençait déjà à se dissoudre dans les flocons blancs qui tourbillonnaient, lorsquun grand chien maigre et transi de froid sarrêta sous la lumière pâle du lampadaire. Sa robe était dune couleur indéfinissable, sa race encore plus mystérieuse.

Il tremblait de froid et de faim, les yeux larmoyants. Se dressant péniblement sur ses pattes arrière, il lut lannonce : *« Femme seule cherche ami. »* « Cest moi quelle cherche, pensa le chien. Car je suis un ami véritable, fidèle et dévoué Et je dois être là où lon mattend. »

Dun coup de dent, il arracha le papier et, rassemblant ses dernières forces, suivit les traces à peine visibles de la femme, déjà ensevelies sous la neige.

Le jour glacial laissa place à une nuit encore plus rude. La neige brûlait ses pattes, son pelage rare était trempé et couvert de glace. Ses yeux se fermaient sous lassaut des flocons, ses forces labandonnaient, mais le chien avançait malgré tout, tombant et se relevant, guidé par lappel de cette femme en quête dun ami.

Puis il neut plus la force de se relever. Ses pattes flageolaient, la neige était si lourde, si froide

À quelques pas dun amas de neige fraîche, derrière une haute grille en fer, une belle femme solitaire, agitée par un pressentiment bonheur ou malheur ? ne parvenait pas à dormir. Elle sortit de sa maison chaude, vêtue dun peignoir et de pantoufles légères, insensible au froid. Elle resta là, derrière la grille, à attendre ce bonheur ou ce malheur inconnu.

Soudain, un petit tas de neige près delle frémit, et en émergea une créature à demi morte de froid, une feuille de papier serrée entre ses dents, le regard chargé dune loyauté et dun amour infinis

Sur le papier froissé, on distinguait à peine linscription : *« Femme seule cherche ami. »*

Avec précaution, la femme enveloppa lanimal frigorifié dans ses bras et le porta à lintérieur. Une recherche rapide sur Internet lui donna le numéro dune clinique vétérinaire ouverte toute la nuit. Dune voix tremblante, elle appela un médecin.

Par chance, le chien fut sauvé. Le vétérinaire, un homme distingué, prescrivit une série de piqûres et recommanda une nourriture de qualité. Comme il navait plus durgence ce soir-là, il accepta une tasse de thé accompagnée de délicieux biscuits maison. La conversation sengagea

Célibataire, il expliqua que les femmes ne comprenaient pas pourquoi il préférait soigner les animaux plutôt que de courir les boîtes de nuit ou séduire les stagiaires. Elles ne lui pardonnaient pas de se lever au milieu de la nuit pour reconstituer patiemment, comme un puzzle, la patte brisée dun chat blessé ou aider une chienne en difficulté lors dune mise bas.

« Et elles ne veulent pas entendre parler des animaux, ajouta-t-il. Elles préfèrent les bijoux à la lueur de gratitude dans les yeux dune bête sauvée. »

La femme lécoutait, et une étincelle salluma dans son regard. « Vous avez beaucoup de patients à la clinique ? » demanda-t-elle.

« Oui, surtout en cette période de fêtes. Accidents, intoxications, sans compter les actes de cruauté Dans une heure, je dois retourner faire des pansements et poser des perfusions. Je suis de garde ce soir. »

« Puis-je vous accompagner ? Je peux aider, jen suis capable ! »

Un an plus tard, dans une jolie petite maison, vivait une famille heureuse avec un magnifique chien bien soigné, et lodeur des biscuits frais embaumait toujours les lieux.

**Leçon du jour :** Parfois, le bonheur se cache derrière une grille, sous la neige, ou dans les yeux dun être vivant qui nattend quun peu de chaleur humaine. Il suffit douvrir son cœur pour le trouver.

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