**Journal intime 15 novembre**
Un léger miaulement a attiré lattention de Robert. En baissant les yeux, il a aperçu un petit chaton que sa mère tentait désespérément de protéger dun chien
Il trébuchait sur le trottoir glissant de cet automne parisien, ses jambes refusaient dobéir, et sa tête était embrumée par lalcool. Son intérieur était aussi sombre que la nuit autour de lui comme si quelquun avait éteint toutes les lumières de son âme.
Dans sa main, il serrait une bouteille à peine débouchée, prêt à avaler une gorgée, espérant que lalcool emporterait un peu de cette douleur qui létouffait. La même question revenait sans cesse : « Pourquoi moi ? » Mais il navait plus la force dy chercher une réponse
Robert était un chirurgien brillant. Ses « mains dor » avaient sauvé des vies, même dans les situations les plus désespérées. Il travaillait jusquà lépuisement, se battant pour chaque patient. Pour lui, chaque opération était un combat : pour la santé, pour le destin, pour lespoir.
Les journaux parlaient de lui, la télévision le montrait, tout le quartier le reconnaissait. Mais cela navait aucune importance. Ce quil voulait, cétait aider. Il refusait les offres des cliniques prestigieuses, rejetait les salaires mirobolants il restait fidèle à son arrondissement. Sa femme le lui reprochait. Elle criait, laccusait, mais Robert tenait bon.
Et ce jour-là, elle avait découvert quil avait encore refusé un poste dans un hôpital de la capitale. Une dispute éclata au téléphone. Elle hurlait quil détruisait leur famille. Leur fils était dans la voiture, mais même sa présence navait pas arrêté le flot de reproches. Elle navait pas vu le camion qui sortait dune ruelle.
Un choc. Des freins qui crissent. Un procès. Des funérailles. Et le vide.
Il allait porter la bouteille à ses lèvres quand un aboiement le fit sursauter. Robert, fronçant les sourcils, chercha doù venait le bruit. Le vent soufflait fort, mais il finit par apercevoir, sous une arche près dun immeuble, un adolescent excitant un chien contre une chatte.
Celle-ci, plaquée contre le mur, crachait de peur, tandis que le garçon encourageait le chien dun ton exalté :
Attrape ! Vas-y !
Le chien se ruait en avant, aboyant, visiblement ravi de ce jeu cruel. Mais la chatte, malgré sa peur, lui donna un coup de patte sur le museau. Robert plissa les yeux. Il y avait quelque chose détrange dans cette scène Il remarqua alors quelle protégeait une petite boule de poils un chaton.
Tu es fou ?! sécria Robert en jetant la bouteille et en courant vers eux, glissant dans les flaques.
Le garçon se retourna. Voyant cet homme approcher, il enroula vite la laisse autour de son bras et recula. Robert se précipita, souleva la chatte épuisée, la serra contre lui. Elle se débattit, mais un faible miaulement lui fit baisser les yeux le chaton était là, sous ses pieds.
Il le prit délicatement et le posa près de sa mère. La chatte se calma aussitôt.
Pourquoi tu montes ton chien contre elle ? Tu veux quil déchire une mère et son petit ?! Robert fixa le garçon avec colère. Si tu étais mon fils, je taurais donné une correction dont tu te souviendrais ! Où est ton père ? Cest lui qui tapprend ça ?
Le garçon baissa les yeux, reculant encore.
Il nest plus là, murmura-t-il à peine audible.
Robert se raidit. Il y avait de la douleur dans sa voix. Dans la pénombre, il vit une larme sur la joue du garçon. Il sapprocha, plus calme.
Tu comprends que cétait mal, ce que tu as fait ?
Le garçon hocha la tête, reniflant.
Maman ma offert Rex récemment. Je je voulais juste voir ce quil savait faire. Désolé. Je ne recommencerai pas. Il tourna les talons pour partir.
Comment tu tappelles ? demanda soudain Robert.
Arthur, répondit le garçon en sarrêtant, regardant lhomme qui ten







