Quand Natacha ramena Denis de la crèche, son mari Valère fut immédiatement méfiant. On voyait à l’œil nu que son épouse était dans un état étrange et agité.

Quand Aurélie ramena Damien de la crèche, son mari Théo sentit immédiatement que quelque chose nallait pas. Lagitation de sa femme était palpable, ses gestes saccadés.

Quelque chose sest passé, Aurélie ? demanda-t-il, la voix tendue.

Oui, Théo, oui Elle lattrapa par le bras et lentraîna dans la cuisine, loin des oreilles de leur fils. On va peut-être nous renvoyer de la crèche.

Quoi ? Théo pâlit. Ce nest pas possible. On paie les frais sans retard.

Je ne sais pas, mais la directrice ma dit en français, très clairement, que si Damien ne se calmait pas, il serait expulsé comme un bouchon de champagne.

Elle a dit ça exactement ?

Oui. En privé, très bas, mais distinctement. Et elle a ajouté que les autres parents veulent déposer une plainte collective. À la police.

Quoi ? Théo fixa sa femme, incrédule. Mais pourquoi ? Qua-t-il fait, notre petit bonhomme si joyeux ?

Parce quil frappe tous les enfants de son groupe.

Damien ? Théo faillit rire, mais se reprit. Ce petit bout dhomme ? Il bat les autres ?

Oui ! Il cogne sans raison, daprès la directrice !

Même les filles ?

Je ne sais pas ! répondit Aurélie, nerveuse. Je nai pas posé la question. Quand jai entendu ça, jai eu un choc. Jai attrapé Damien et je suis rentrée en courant. Sils nous renvoient, Théo, quallons-nous faire ? Où le mettrons-nous ? Je devrai quitter mon travail ! Ou toi Et comment rembourserons-nous le prêt immobilier ? Je deviens folle

Ne tévanouis pas tout de suite ! Théo réfléchit. Dabord, comprenons ce qui se passe avec notre fils.

Je lui ai posé des questions en rentrant, mais il refuse de parler. Il boude.

Tu las interrogé, toi. Maintenant, cest mon tour.

Théo entra dans la chambre denfant. Damien jouait tranquillement avec ses petites voitures, comme si de rien nétait.

Damien, nous devons parler sérieusement, dit le père dun ton ferme.

Mmm répondit lenfant, sans lever les yeux.

Arrête de jouer, ordonna Théo, plus sévère.

Théo, parle-lui calmement ! sexclama Aurélie depuis la porte.

Oui, Papa, parle calmement, répéta Damien, moqueur, tout en continuant à jouer.

Dis-nous la vérité. Pourquoi frappes-tu les enfants à la crèche ?

Damien se figea, la voiture en suspens. Il baissa les yeux.

Tu frappes même les filles ?

Non, pas les filles, murmura-t-il. Elles ne méritent pas.

Et les garçons, si ?

Oh que oui

Pour quelle raison, si ce nest pas un secret ?

Damien regarda son père, puis sa mère, méfiant.

Et si cétait un secret ?

Ses yeux étaient si sérieux que Théo en fut presque gêné. Mais il se ressaisit.

Damien, tu es mon fils, oui ou non ?

Ben oui.

Alors, pas de secrets entre nous.

Avec toi, non, Papa admit lenfant à contrecœur. Mais avec Maman

Quoi ? soffusqua Aurélie. Tu as des secrets pour moi, Damien ?

Oui.

Mais pourquoi ?

Parce que cest entre hommes

Ah, entre hommes Théo cligna de lœil à sa femme. Désolé, chérie, mais il faut nous laisser.

Daccord fit-elle, vexée, en quittant la pièce.

Et pas découte aux portes ! lança Théo. Puis, baissant la voix, il demanda : Alors, mon grand, pourquoi tapes-tu les garçons ?

Damien soupira profondément, détourna le regard et avoua :

Ils se collent à elle.

Qui ?

Les garçons

Et à qui se collent-ils ?

À Élodie Martin.

Qui ça ?

Notre auxiliaire. Elle leur caresse les cheveux, et eux, ils lembrassent et se serrent contre elle. Très fort.

Et alors ?

Ça me déplaît.

Théo sourit intérieurement.

Pourquoi ?

Parce que cest moi qui dois lembrasser.

Ah bon ?

Papa Damien le regarda, blessé. Tu ne comprends pas ? Toi, tu es le seul à embrasser Maman ! Et moi aussi, mais je suis ton fils. Les autres hommes ne lembrassent pas !

Mais Maman est ma femme, expliqua Théo, amusé.

Élodie sera ma femme, chuchota Damien. Quand je serai grand. Je lépouserai

Ah, daccord Théo retint un éclat de rire. Donc tu es amoureux de cette auxiliaire ?

Oui avoua lenfant, tête basse.

Et tu es jaloux

Toi aussi, tu es jaloux de Maman

Moi ?

Bien sûr. Vous vous disputez souvent à cause de ça.

Oh, mon petit Théo hésita. Alors, tu as hérité de notre défaut familial. Mon grand-père était comme ça, mon père aussi. Tous les hommes de la famille en ont souffert

Souffert ?

Oui. La jalousie est une sale chose Alors, que faisons-nous ? Si tu continues à battre tes rivaux, tu seras renvoyé.

Tant pis ! Personne ne la touchera !

Mais si on texpulse, tu ne la verras plus jamais.

Plus jamais ? sinquiéta Damien.

Jamais. Écoute, je te comprends, mais tu ne peux pas frapper les autres. Et puis, normalement, cest à elle de choisir qui elle embrasse.

Elle ne choisit pas. Elle embrasse tout le monde.

Cest son travail. Elle doit câliner chaque enfant plusieurs fois par jour.

Cest obligé ?

Bien sûr ! Elle tembrasse, toi ?

Oui.

Voilà. Elle doit faire pareil avec les autres. Sinon, elle sera licenciée. Et tu ne la verras plus. Alors, il faut supporter.

Cest vraiment juste pour le travail ? insista Damien.

Exactement. Elle y est forcée.

Promis ?

Parole de papa !

Bon, daccord Damien esquissa un sourire. Alors elle peut les embrasser. Et les bisous, cest obligé aussi ?

Oui, approuva Théo.

Quelle drôle de profession soupira Damien, moins triste. Bon, je réfléchirai avant de lépouser.

À partir du lendemain, plus aucune plainte ne vint de la crèche.

Оцените статью
Quand Natacha ramena Denis de la crèche, son mari Valère fut immédiatement méfiant. On voyait à l’œil nu que son épouse était dans un état étrange et agité.
Ma belle-mère croyait que je la soutiendrais par peur après le divorce, mais elle ignorait mes véritables intentions