J’ai laissé une amie dormir chez moi, et au matin, je l’ai surprise en train de fouiller dans mes affaires

** Où est-ce que tu comptes aller ? Il est presque 23 heures !**

** Maman, je tai prévenue ! Cest lanniversaire de Sophie, on va prendre un café et je rentre tout de suite après. Je te jure, jappellerai un taxi !**

Adèle se tenait dans le couloir, les bras croisés, barrant le passage à sa fille de dix-sept ans. Clémence, déjà maquillée et vêtue dune nouvelle robe, piétinait dimpatience.

** Un taxi à cette heure-ci ? Tu as perdu la raison ? Demain cest samedi, vous pouvez vous voir en journée. Je ne te laisse pas sortir, et cest non négociable.**

** Mais maman !** gémit Clémence, la voix tremblante démotion. ** Tout le monde a le droit, sauf moi ! Tu ne me fais pas confiance, cest ça ? Tu me prends encore pour une gamine ?**

** Je pense que les rues de Paris ne sont pas faites pour les adolescentes la nuit. Point final. Va te changer et retourne dans ta chambre.**

Clémence lui lança un regard noir, pivota sur elle-même et disparut en claquant la porte. La vaisselle dans le buffet tinta faiblement. Adèle soupira et se dirigea vers la cuisine, le cœur encore agité par la dispute. Elle savait que Clémence bouderait jusquau matin, mais la peur pour son unique enfant était plus forte que lenvie dêtre une mère « cool »

Elle fit chauffer la bouilloire et saffala sur une chaise, épuisée. La soirée était fichue.
Le téléphone sonna dans le silence de lappartement. Adèle décrocha à la hâte, sattendant aux reproches de sa mère ou à une nouvelle requête de la voisine.

** Allô ?** murmura-t-elle, lasse.

** Adèle ? Cest bien toi ?** Une voix féminine, familière mais oubliée, tremblait au bout du fil. ** Cest moi, Élodie. Élodie Laurent. Tu te souviens de moi ?**

Adèle retint son souffle. Élodie Laurent ? Son amie de fac, dont elle avait perdu la trace depuis quinze ans. Dabord, quelques coups de fil, puis juste des cartes de vœux avant le silence total.

** Élodie ? Bien sûr. Quest-ce qui se passe ? Tu as une drôle de voix**

** Adèle, désolée pour lheure tardive** Un sanglot étouffé. ** Je navais personne dautre à appeler. Jai un tel malheur**

Dune voix entrecoupée, Élodie raconta son histoire : son compagnon, avec qui elle vivait depuis dix ans, lavait mise à la porte. Il avait rencontré une autre femme et lui avait donné une heure pour partir. Comme lappartement était à lui et quelle travaillait au noir dans sa boîte, elle se retrouvait sans rien.

** Je suis à la gare Montparnasse, Adèle** chuchota-t-elle. ** Je ne sais pas où aller. Tous mes amis mont tourné le dos, et je ne peux pas retourner chez mes parents à la campagne. Honteuse, tu comprends ?**

Le cœur dAdèle se serra. Elle imagina Élodie, autrefois rayonnante et sûre delle, assise dans la froide lumière des néons de la gare, perdue et seule. Sa colère envers Clémence sévapora aussitôt.

** Élodie, reste où tu es. Prends un taxi et viens chez moi. Je te rembourserai.**

** Non, je ne veux pas timposer**

** Arrête !** coupa Adèle. ** Tu te souviens de ladresse ?**

** Oui Rue des Acacias, numéro 12 ?**

** Cest ça. Appartement 45. Je tattends.**

Raccompagnant Élodie dans le salon, elle prépara le canapé-lit avec des draps propres. Un mélange dinquiétude et de réconfort lenvahissait. Elle faisait ce quil fallait.

Une heure plus tard, on sonna à la porte. Sur le seuil se tenait Élodie, méconnaissable : le visage bouffi, les cheveux en bataille, une veste froissée et un sac de sport à la main.

** Adèle** Élodie se jeta dans ses bras en sanglotant.

** Chut, tout va bien Entre, tu es glacée.**

Adèle la conduisit à la cuisine, lui servit un thé brûlant. Les mains dÉlodie tremblaient.

** Merci Sans toi, je ne sais pas ce que jaurais fait.**

** Cest normal. On est amies, non ? Tu veux manger quelque chose ?**

** Non, je nai pas faim Je peux juste me coucher ?**

Adèle linstalla sur le canapé et referma doucement la porte. Elle alla embrasser Clémence, endormie dans sa chambre, oubliant leur dispute.

À laube, Adèle se réveilla plus tôt que dhabitude. Elle avança sur la pointe des pieds vers la cuisine et sarrêta net. La porte de sa chambre, quelle avait fermée, était entrouverte. Un froissement.

Son cœur manqua un battement. Clémence dormait. Alors Élodie ?

Elle se glissa vers lentrebâillement. Élodie, à genoux devant sa commode, fouillait méthodiquement ses affaires. Elle palpait les piles de linge, inspectait chaque recoin, comme si elle cherchait quelque chose. Elle sortit une petite boîte à bijoux les boucles doreilles de sa mère, une fine chaîne en or offerte par son défunt mari louvrit, la reposa déçue, puis passa aux papiers.

Le sang dAdèle se glaça. Son amie, quelle avait recueillie par la pitié, la volait.

Elle recula sans bruit, retourna se coucher, le corps parcouru de frissons. Pourquoi ? De largent ? Mais pourquoi navait-elle pas pris la boîte ?

Au bout de quelques minutes, les bruits cessèrent. Adèle entendit Élodie regagner le salon.

Une demi-heure plus tard, elle osa se lever. Élodie, attablée à la cuisine, fixait la fenêtre dun air las.

** Bonjour,** dit-elle en se retournant. Rien dans son attitude ne trahissait ses agissements.

** Bonjour,** répondit Adèle dune voix neutre en préparant le café. Elle observait Élodie à la dérobée. Celle-ci parlait de son ex, de ses projets flous

** Je ne veux pas abuser. Je chercherai un travail cette semaine.**

** Ne tinquiète pas,** répliqua machinalement Adèle.

Clémence apparut, surprise par linconnue.

** Clémence, voici tante Élodie, une vieille amie.**

** Bonjour,** dit la jeune fille, distante.

Élodie sourit. ** Comme tu as grandi ! Je te revois encore en landau !**

Clémence haussa les épaules. Pendant le petit-déjeuner, son regard ne quitta pas Élodie.

** Maman, pourquoi elle est là ?** chuchota-t-elle plus tard.

** Elle a des problèmes.**

** Elle est bizarre. Elle a un regard fuyant.**

Le lendemain, Élodie saffairait à nettoyer, questionnant Adèle sur sa vie, son travail, son mari décédé, Julien.

** Tu nas jamais refait de vie après lui ?**

** Non.**

** Dommage. Un homme en or. Toutes les filles tenviaient.**

Adèle se tut. Julien était mort dune crise cardiaque dix ans plus tôt.

Le soir, en regardant un film, Adèle remarqua le regard scrutateur dÉlodie sur leurs affaires. Comme si elle évaluait tout.

Cette nuit-là, Adèle verrouilla sa porte pour la première fois.

Le lundi matin, avant de partir travailler, elle laissa les clés à Élodie, malgré son malaise.

Toute la journée, limage dÉlodie fouillant la commode la hanta. Elle appela une vieille connaissance, Ophélie.

** Élodie Laurent est chez moi. Son mec la virée.**

Un silence. ** Adèle méfie-toi.**

** Pourquoi ?**

** Elle a toujours eu un côté tordu. Tu te souviens de largent disparu pendant notre voyage détudes ?**

Adèle fronça les sourcils.

** Lucie ma dit lavoir vue en prendre. Et lan dernier, je lai croisée par hasard. Elle était endettée jusquau cou. Des crédits, des huissiers**

Adèle comprit. Elle rentra précipitamment.

Dans la chambre de Clémence, Élodie était penchée sur un album photo des souvenirs de Julien.

** Quest-ce que tu fais là ?** demanda Adèle dun ton glaç

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« Il faut l’emmener à l’hôpital », murmura la jeune femme frigorifiée sur la route, serrant son enfant dans ses bras