Trouve-lui quelquun, nimporte qui !
Je nen peux plus. Avec elle, je vais finir vieille fille, cest sûr. Écoute, Marie, prends Maman chez toi, je ten supplie. Quelle soccupe de tes enfants au lieu de me surveiller.
Léa… Tu nas que toi à blâmer. Tu as semé le chaos plus jeune, maintenant tu récoltes, répondit Marie avec calme, une pointe de lassitude dans la voix. Pas la peine de faire des scènes.
Daccord, jai eu tort, je ladmets ! Jétais petite, idiote. Mais quoi, elle va gâcher ma vie entière maintenant ?
Elle na plus de vie à elle, grâce à tes efforts. Tu voulais quelle vive pour toi ? Eh bien, bon appétit, fais attention de ne pas ten mettre partout.
Ma-arie, trouve une solution, tu es intelligente ! Si elle vivait chez vous, tout le monde serait content. Elle pourrait aider avec les enfants, et moi, je sortirais enfin de cette prison… rêva Léa. Ou au moins, influence-la. Elle técoute, toi.
Les filles, débrouillez-vous, rétorqua Marie en plissant les yeux. Je peux juste donner un conseil. Tu as détruit sa vie sentimentale, à toi de laider à la reconstruire. Trouve-lui des amies, un loisir, un amoureux. Trouve-lui nimporte qui. Un chiot, un chaton, peu importe. Détourne son attention.
Léa, comme toujours, voulait que les autres règlent ses problèmes. Marie aurait pu jouer le jeu, car elle avait en effet une relation très différente avec leur mère, mais elle refusa. Que celui qui lance le boomerang le rattrape.
Le père les avait abandonnées quand Marie avait onze ans. Léa en avait trois. Sans aide, Marie avait dû grandir à toute vitesse. Elle récupérait sa sœur à la crèche, préparait le dîner, rangeait, et faisait ses devoirs la nuit, quand tout le monde dormait.
Peut-être était-ce pour cela quelle était devenue une adulte responsable. Léa, elle, manquait cruellement de maturité…
Marie sétait envolée du nid familial assez tôt, juste après le lycée. La raison était simple : elle aussi voulait sa liberté, lasse dêtre une seconde mère. Elle soupçonnait même que ce serait mieux pour leur mère, Valérie.
Marie comprenait que Valérie était encore jeune et méritait une vie à elle. Moins elle avait denfants à charge, mieux cétait.
Valérie saisit sa chance et se rapprocha dAntoine, un collègue. Léa, alors âgée de douze ans, vit cela comme une catastrophe. Elle refusait de laisser un étranger envahir leur espace. Sans compter les nouvelles tâches ménagères, quelle exécutait à contrecœur.
Léa, quand tu auras fini, lave la vaisselle, sil te plaît, demandait sa mère.
Dabord, elle obéissait, boudeuse. Puis elle commença à résister.
Je ne veux pas.
Pourquoi ? sétonna Valérie. Nous avons tous nos corvées. Moi, je cuisine, Antoine apporte les courses…
Je ne laverai pas pour ton Antoine ! linterrompit Léa. Pourquoi je devrais moccuper des restes dun inconnu ?
Elle nhésitait pas à le dire devant Antoine lui-même.
Malgré son comportement, Antoine tentait de se rapprocher delle. Il lui offrait des peluches, comme à une enfant, sintéressait à ses passions, demandait si on lembêtait au collège. Patient et poli, mais rien ny faisait.
Peut-être la peur dun nouvel abandon planait-elle. Ou peut-être Léa voyait-elle simplement en lui une intrusion. Quoi quil en soit, elle fit tout pour chasser l« intrus ».
Léa provoquait Antoine, accusait sa mère de lavoir « troquée contre un type quelconque », faisait des scènes. En signe de protestation, elle négligeait ses études et se lançait dans des grèves de la faim. Enfin, prétendues grèves, car elle pillait le frigo la nuit.
Valérie espérait que sa fille finirait par shabituer. Hélas non. Le pire survint quand elle annonça son mariage.
Léa, que dirais-tu si Antoine devenait officiellement de la famille ? demanda-t-elle un jour, prudente. Nous vivons déjà tous ensemble.
Et ce fut le chaos… Léa sentêta, accusa Antoine davoir manipulé Valérie pour semparer de leur appartement. Quand les arguments manquèrent…
Si vous vous mariez, je pars ! De toute façon, je vous gênerai.
Léa ! Quest-ce que tu racontes ? Tu seras toujours ma fille, et celle dAntoine.
Ouais. Pas une fille, une bonniche ! Viens, sers, disparais. Non merci, je préfère vivre chez Marie plutôt que de gâcher ton bonheur.
Valérie ne savait que faire. Elle aussi avait peur. Peur de perdre sa fille, puis Antoine, comme son premier mari.
Coincée, elle en parlait à Marie, qui jugeait les caprices de Léa avec scepticisme.
Pff. Tu crois que je vais laccueillir à ces conditions ? ricanait-elle. Elle fera le pied de grue dans lentrée et rentrera la queue entre les jambes. Ou mieux : je lui réserverai un accueil qui la fera courir vers toi. Elle veut vivre avec moi ? Soit, mais quelle participe. Je ne suis pas sa mère de substitution.
Marie était convaincue que les menaces de Léa étaient du bluff. Mais Valérie ne voulait pas le vérifier.
Et si, Dieu men garde, elle part vraiment ? sangoissait-elle. Elle viendra chez toi, tu ne lui ouvriras pas… Elle pourrait finir à la rue. Un malheur arriverait…
La peur lemporta. Valérie rompit avec Antoine. Dabord, ils vécurent séparés, se voyant ailleurs. Puis, plus rien.
Comme Léa lavait voulu, Valérie se concentra entièrement sur elle. Mais pas comme elle lespérait. Déjà surprotectrice, Valérie devint un dragon gardant sa princesse. Elle laccompagnait partout, lui interdisait de sortir seule. Si Léa tardait, Valérie appelait sans cesse.
Les rues sont dangereuses. On pourrait tenlever ! Mieux vaut aller au cinéma ensemble quand jaurai le temps.
Léa croyait que Valérie se vengeait. En réalité, sans vie sentimentale, Valérie navait plus que sa fille. Où dautre canaliser son attention ? Et si elle la perdait ? Marie avait sa propre famille.
Léa tenta de fuir. Elle voulait partir en études ailleurs, mais Valérie monta un drame : larmes, mains tremblantes, tensiomètre.
Tu veux me laisser seule ? Je nai que toi.
Maman, je dois apprendre à être indépendante.
Où vivras-tu ? En résidence ? Qui te protégera ? Et largent ? On a déjà du mal à joindre les deux bouts…
Valérie saccrochait à elle comme à une bouée. Léa resta. Peur de lautonomie ? Culpabilité ?
Pire encore. Quand Léa eut des prétendants, Valérie se transforma en gardienne de vertu. Contrôle accru, critiques incessantes. Celui-ci est arrogant, cet autre un coureur, celui-là trop poli… Les relations avortaient avant même de commencer.
Pourtant, Valérie et Marie sentendaient à merveille. Aucune surprotection. Valérie était la belle-mère idéale, cuisinait pour son gendre, ne simmisçait pas.
Léa craqua. Mais Marie refusait dintervenir. Dabord, elle navait







