Lucie était au bout du rouleau. À trente ans, elle pesait cent vingt kilos. Était-ce dû à une maladie, un dérèglement organique ou un trouble métabolique ?

**Journal de Pierre 12 novembre**

Lucie était ronde. Elle venait davoir trente ans, et la balance affichait cent vingt kilos. Peut-être était-ce dû à une maladie, un dérèglement organique ou un problème de métabolisme. Elle vivait dans un village perdu, oublié de tous. Aller consulter des spécialistes en ville était trop loin et bien trop cher.

Là, dans ce hameau accroché au bout du monde, comme une poussière sur la carte, le temps ne suivait pas les horloges, mais les saisons. Il se figeait sous les hivers rigoureux, sengluait dans la boue printanière, suffoquait sous la canicule estivale et pleurait sous les pluies automnales. Cest dans ce rythme lent, étiré, que se noyait le quotidien de Lucie.

À trente ans, sa vie semblait irrémédiablement enlisée dans le marais de son propre corps. Cent vingt kilos nétaient pas quun nombrecétait une forteresse, un mur entre elle et le monde. Une forteresse faite de fatigue, de solitude et dun éternel désespoir muet. Elle soupçonnait un problème de santé, mais se rendre en ville chez les médecins était impensable : trop loin, trop humiliant, et probablement inutile.

Elle travaillait comme aide-maternelle à la crèche municipale *La Clochette*. Ses journées sentaient la poudre pour bébé, la purée trop cuite et les sols toujours humides. Ses mains généreuses et douces savaient consoler un enfant en pleurs, préparer une dizaine de lits en un clin dœil et éponger une flaque sans que le petit se sente coupable. Les enfants ladoraient, attirés par sa douceur et son calme. Mais leur affection était une maigre consolation face au vide qui lattendait une fois la crèche fermée.

Lucie habitait une vieille baraque de huit logements, vestige des années soixante. La maison tenait à peine debout, gémissant sous les vents forts. Sa mère lavait quittée deux ans plus tôtune femme usée, ayant enterré tous ses rêves entre ces murs. Quant à son père, Lucie ne se souvenait même plus de lui.

Son quotidien était austère. Leau du robinet était glacée et rouillée, les toilettes se trouvaient dehors, transformées en grotte de glace lhiver. Mais le pire, cétait le poêle. Lhiver, il dévorait deux stères de bois, engloutissant ses maigres revenus. Elle passait des soirées entières à fixer les flammes derrière la porte en fonte, comme si le feu consumait non seulement le bois, mais aussi ses années, ses forces, son avenir.

Puis, un soir, alors

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Lucie était au bout du rouleau. À trente ans, elle pesait cent vingt kilos. Était-ce dû à une maladie, un dérèglement organique ou un trouble métabolique ?
J’ai tout sacrifié pour mon père, pour être exclu de son testament… jusqu’à ce que je découvre une enveloppe secrète qui révèle la vérité