Il fallait épouser Valérie ! Elle est si soignée, élégante, et bien plus jeune que toi. Moi, je suis encore en pleine force, et ma femme est déjà vieille…

Il aurait fallu épouser Valérie ! Elle, au moins, est soignée, élancée, et plus jeune que toi. Je suis encore en pleine force, et voilà que ma femme est vieille… Pourquoi tu parles de Valérie Dubois ? Tu las croisée quelque part ? Elle na pas besoin de toi, elle a épousé un général et vit comme une reine…

Raymonde préparait des crêpes au fromage pour le petit-déjeuner de son mari. Il les adorait. Il allait se réveiller, et les crêpes seraient déjà là, chaudes, avec de la crème fraîche.

Raymonde ! Où est mon pantalon ?

Il était réveillé. Elle posa la poêle et se dirigea vers la chambre doù il hurlait.

Nicolas, je lai mis à laver, il était sale. Tiens, en voilà un autre.

Sale ? Mais je ne lai même pas porté ! Tu décides toujours sans moi !

Je ne te laisserai pas le porter un mois sans le laver ! Tais-toi. Voilà, un propre…

Oh ! Je déteste ce pantalon, il est inconfortable, trop serré ! Va laver mon préféré, vite !

Je le fais, ne crie pas… Va te laver et viens manger, les crêpes sont sur la table…

Nicolas partit vers la salle de bains. Raymonde versa le thé, ajouta deux morceaux de sucre, comme il aimait. Elle mit la crème dans une coupelle.

Pouah, tu as empesté la maison avec tes crêpes ! Tu nas vraiment rien dautre à faire ?

Cest pour toi que je les ai faites, Nico, pourquoi tu râles ? Tu tes levé du mauvais pied ?

Nicolas mangeait en silence.

Le thé est brûlant ! Tu ne pouvais pas le laisser refroidir ? Aïe, je me suis brûlé ! Et les crêpes sont dures, immangeables ! Fais-moi des tartines avec du jambon et du fromage, mange ta pâte toi-même !

Arrête, les crêpes sont parfaites, comme dhabitude. Mange, tu nas pas besoin de tartines, ton ventre sarrondit déjà…

Mon ventre ne te plaît pas, hein ? Et toi, tu tes regardée dans le miroir ? Tu as grossi ! Et tes cheveux gris, pourquoi tu ne les teins pas ? On dirait une vieille !

Raymonde le regarda, stupéfaite et blessée. Jamais il ne sétait permis de tels mots… Quest-ce qui lui prenait ?

Nicolas, surveille ta langue ! Jai toujours été un peu ronde, tu viens de le découvrir ? Avant, ça te plaisait…

Et je ne veux pas teindre mes cheveux, je suis allergique, tu le sais bien. La santé avant tout. Je ne suis plus une jeune fille, jai passé soixante ans…

Ton ventre, cest à cause de la bière, je cuisine léger pour toi. Et bouge un peu, au lieu de rester devant la télé.

Il aurait fallu épouser Valérie ! Elle, au moins, est soignée et élégante, pas vieille comme toi. Je suis encore en pleine force, et ma femme est une vieille…

Pourquoi tu parles encore de Valérie Dubois ? Tu las vue quelque part ? Elle na pas besoin de toi, elle a épousé un général, pas de soucis.

Il la gâte, elle shabille bien, prend soin delle. Pas denfants, pas de tracas, ils ont vécu pour leur plaisir.

Et nous, on a élevé notre fils, il a réussi, il nous aide même. Nos petits-enfants sont là, on ne peut pas se plaindre.

Quest-ce que tu en sais ? Valérie me courait après, elle se proposait…

Quand ça ? Oh, quel affabulateur…

À lépoque… Cétait comme ça…

Et quest-ce que tu lui as dit ?

Ben quoi ? Je suis un homme. Je ne pouvais pas la blesser. Elle était attirante. Pas comme toi.

Ma mère me disait : « Ne te marie pas avec Raymonde, elle est vieille et pas belle. »

Je ne lai pas écoutée, je tai épousée. Et maintenant, je dois me contenter dune vieille mémère qui ne sait même pas faire des tartines correctes !

Eh bien, que Valérie te fasse tes tartines ! Tu nas pas su refuser… Elle ta tenté…

Alors pourquoi tu as vécu avec moi toutes ces années, à te torturer avec une vieille ? Je nai que trois ans de plus que toi !

Je ne sais pas ! Maintenant que je suis à la retraite, je réalise mon erreur. Tu es ennuyeuse. Ni chair ni poisson. Tant de femmes me couraient après… Et moi, je rentrais à la maison, vers ma femme, vers mon fils. Et toi, tu ne mas jamais apprécié !

Comment ça, pas apprécié ? Tout ce quil y avait de meilleur pour toi et pour Sacha, je me privais pour vous. Et largent, est-ce que je ten ai jamais demandé ? Regarde tes vêtements, et les miens ? Toujours moins chers, pour économiser.

On a acheté une voiture, tu tes offert un bateau pneumatique, qui traîne maintenant, des transistors, du matériel de pêche… Est-ce que jai protesté ?

Et quest-ce que tu nous as acheté ? Ne te vante pas… Et ta cuisine est dégoûtante ! Rien à voir avec ma mère, paix à son âme !

Nico, est-ce que ça a été si horrible, toutes ces années avec moi ? Tu ne peux vraiment rien dire de bien ? Quest-ce qui tarrive ? Tu es si méchant aujourdhui ! Tu es malade ?

Cest toi qui es malade ! Bon, je vais regarder les infos, tu ménerves… Et puis, il y a eu Valérie, et aussi Thérèse. Il y a longtemps, cest vrai, mais cétait. Tu étais partie chez ta mère…

Oh, Thérèse, quelle femme ardente, pas comme toi… Et en plus, tu es malade, toujours tes médicaments, ton cœur fragile. Voilà ce que la vie ma donné, une épouse comme ça…

Raymonde enleva son tablier et sortit dans la rue. Elle avait le souffle coupé, son cœur lui faisait mal.

Alors il la trompée. Et elle navait rien vu. Tout semblait aller bien entre eux, comme chez les autres.

Ils sétaient mariés par amour, avaient échangé des promesses, vécu en harmonie, et maintenant il crachait tout ce quil pensait. Une mauvaise épouse, apparemment. Comment vivre après ces mots ?

Cest lui qui lavait demandée en mariage, à genoux. Elle lavait aimé toute sa vie, lavait choyé, et il laimait, même sil ne le disait plus. Mais il ne lavait jamais insultée.

« Est-ce vrai, pour Thérèse et Valérie… Comment a-t-il pu ? »

Raymonde navait jamais laissé personne approcher, même quand un collègue avait essayé, ou quand un ami denfance était revenu, à trente-cinq ans. « Je taime, depuis lécole. Viens avec moi, quitte ton mari, jaccepterai ton enfant. »

Oh, elle lavait remis à sa place ! Proposer ça à une femme mariée !

Et elle cuisinait toujours si bien, son fils et son mari dévoraient ses crêpes, ses tourtes, ses soupes. Comment comprendre ça ? À la vieillesse, il lui balance la vérité.

« Nico, Nico, jai tout fait pour toi… »

Raymonde errait dans les rues, chassant ses pensées sombres. Sa poitrine brûlait, mais elle ne le sentait pas. Elle essuya discrètement ses larmes salées. Les mots de son

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