Dans la douce lumière de la cuisine, larôme enivrant du clafoutis aux cerises flottait dans lair.
« Maman, tu as préparé un clafoutis ? » demanda Aurélie en entrant, le cœur léger.
« Oui, ma chérie, répondit Élodie en souriant, tout en ajustant la pâte dorée dans le four. Aux cerises, comme tu aimes. »
Aurélie enlaça tendrement sa mère avant de jeter un regard vers le dessert. Les cerises juteuses luisaient sous une fine couche de sucre, évoquant des souvenirs denfance.
« Est-ce que Clémence vient aujourdhui ? » demanda-t-elle en sasseyant à la table en bois usée.
« Elle a promis de passer pour le déjeuner, répondit Élodie en versant deux tasses de tisane. Elle veut discuter de quelque chose dimportant. »
Elle glissa une tasse vers sa fille.
« Goûte, dis-moi si ce nest pas trop sucré. »
Aurélie prit une gorgée et secoua la tête.
« Cest parfait. Exactement comme avant. »
Élodie sassit face à elle, son regard soudain sérieux.
« Aurélie, as-tu remarqué que Clémence agit bizarrement ces derniers temps ? Avant, elle appelait chaque jour. Maintenant, des semaines passent sans un mot. »
« Maman, elle a son travail, ses enfants. Elle est débordée. »
« Peut-être mais quelque chose ne va pas. Hier, je lai croisée près de la boulangerie. Je lai saluée, et elle ma regardée comme si jétais transparente. »
Aurélie fronça les sourcils. Effectivement, sa sœur sétait éloignée ces derniers mois messages rares, repas de famille silencieux, départs précipités.
« Elle a sûrement des soucis, supposa-t-elle. Je lui parlerai. »
Un coup de sonnette retentit, interrompant leur conversation. Élodie se précipita pour ouvrir.
« Clémence ! Enfin, te voilà ! » sexclama-t-elle depuis lentrée.
« Bonjour, maman, répondit Clémence dun ton sec. »
Aurélie entendit des pas résonner avant que sa sœur napparaisse dans lencadrement de la porte. Ses traits étaient tendus, ses lèvres pincées.
« Salut, Clémence, lança Aurélie en souriant. Assieds-toi, maman a fait un clafoutis. »
« Non merci, coupa Clémence en restant debout. »
Élodie la dévisagea, déconcertée.
« Ma puce, quest-ce qui ne va pas ? Tu sembles »
« Tout va bien, linterrompit-elle. Je dois parler à Aurélie. Seules. »
Aurélie leva un sourcil étonné. Jamais elle navait entendu ce ton glacial venant de sa sœur.
« Maman, laisse-nous un instant, sil te plaît ? » demanda-t-elle doucement.
Élodie hocha la tête et quitta la pièce, lançant un dernier regard inquiet.
Clémence sapprocha de la table, mais refusa de sasseoir.
« Alors, voilà, commença-t-elle, glaçante. Arrête de jouer les saintes. »
« De quoi tu parles ? » sétonna Aurélie.
« De tes manigances. Tu croyais que je ne saurais pas ? »
Un frisson parcourut léchine dAurélie. Des fragments de souvenirs remontèrent rien de concret, mais un malaise grandissant.
« Explique-toi, Clémence. Quest-ce qui se passe ? »
« Avec Antoine, tu ne ten souviens pas ? » Sa voix se chargea de rancœur.
Aurélie se figea. Antoine, le mari de Clémence. Une histoire embarrassante, six mois plus tôt. Elle pensait que personne nétait au courant.
« Quest-ce que tu insinues ? » demanda-t-elle prudemment.
« Ne fais pas linnocente ! Je sais tout. Vos rencontres au café. Comment tu as consolé mon mari pendant nos problèmes. Vos étreintes sur le parking. »
Clémence sortit son téléphone, montrant des photos : Aurélie et Antoine attablés, puis enlacés.
« Clémence, ce nest pas ce que tu crois »
« Ah non ? ricana-t-elle. Alors quoi ? Tu vas mexpliquer pourquoi ma propre sœur voit mon mari en secret ? »
Aurélie soupira lourdement. Elle savait que cette confrontation viendrait, mais espérait léviter.
« Antoine est venu me demander conseil, avança-t-elle. Il disait que vous vous disputiez, que tu voulais divorcer. Il ne savait pas quoi faire. »
« Et tu as décidé de laider ? sexclama Clémence, la voix de plus en plus aiguë. Quelle belle-sœur attentionnée ! »
« Il était désespéré ! Il taimait, ne voulait pas perdre sa famille. Jessayais juste de comprendre. »
« Comprendre ? » Clémence se laissa enfin tomber sur une chaise, raide. « Pourquoi est-il venu te voir, et pas ses amis ? Sa mère ? »
Aurélie sentit le piège se refermer. Pourquoi Antoine lavait-il choisie, elle ?
« Je ne sais pas. Sans doute parce que je suis ta sœur, que je pourrais mieux te comprendre. »
« Mensonge ! explosa Clémence. Il est venu vers toi parce que tu as toujours été trop proche de lui ! Déjà quand nous sortions ensemble, tu le regardais trop ! »
« Cest ridicule. Je nai rien à cacher. Oui, nous nous sommes vus. Oui, je lai serré parce quil pleurait. Mais il ny a rien eu ! »
« Et puis, soudain, il a changé davis sur le divorce, poursuivit Clémence, sourde à ses explications. Il a dit quil fallait sauver notre mariage. Je croyais quil avait réalisé mais cétait toi ! »
Aurélie se leva, sapprocha delle.
« Clémence, je vois que tu souffres. Mais je voulais aider. Ça me brise de vous voir ainsi. »
« Aider ? » Clémence recula. « Tu as décidé à ma place si je devais sauver mon mariage ! Tu tes mêlée de ma vie sans me demander ! »
« Mais vous navez pas divorcé ! Et maintenant, ça va mieux, non ? »
« Et tu sais comment nous vivons ? » Des larmes de rage brillèrent dans ses yeux. « Parce que nous sommes encore ensemble, tout va bien ? »
Aurélie sut quelle avait fait une erreur.
« Clémence, je »
« Ta gueule ! » hurla sa sœur. « Tu nas aucune idée de ce que je traverse ! Antoine, à chaque dispute, me dit : Ta sœur pense quon doit rester ensemble. La sage Aurélie lui a expliqué limportance de la famille ! »
Aurélie saffaissa sur sa chaise. Lampleur du désastre lui apparut.
« Il cite tes mots constamment, continua Clémence, les larmes coulant. Que jégoïste, que je ne pense quà moi. Je me sens coupable chez moi ! »
« Je nai jamais dit ça »
« Quas-tu dit, alors ? Raconte-moi vos grandes conversations ! »
Aurélie comprit quelle était coincée. Tout ce quelle dirait serait mal interprété.
« Jai dit que vous vous aimiez. Que vous aviez des enfants, une vie commune. Quon ne détruit pas tout pour des problèmes passagers. »
« Passagers ? » Clémence bondit. « Sais-tu quil ma trompée ? Que jai trouvé ses messages avec son ex ? Et tu appelles ça des problèmes passagers ? »
Le sol sembla se dérober







