Restée comme la Belle au bois dormant sans son prince

**Restée avec un panier percé**

Comment peux-tu dire une chose pareille ? Cest un être humain ! Le frère de ton mari !
Et moi, je le répète : je préférerais brûler cet argent plutôt que de le lui donner ! Au moins, ça servirait à quelque chose ! Si cet homme ne se soucie pas de sa santé, pourquoi devrais-je le faire ? rétorqua la belle-fille cadette, les lèvres pincées.

La belle-mère était au bord de létouffement, tant la colère létreignait. Antoine, son fils cadet, soupira lourdement et se frotta larête du nez. Lui aussi semblait sous le choc, mais il gardait son calme, comme dhabitude. Il avait toujours été ainsi : jamais de panique, toujours la raison avant les émotions.

Élodie, on ne peut pas agir comme ça ! La vie est longue. Aujourdhui, cest lui qui a besoin daide, demain ce sera peut-être vous, tenta dexpliquer Marguerite, désespérée de devoir rappeler des évidences à une femme pourtant adulte.
Je vous en prie ! Lui ? Ce goinfre ? Il est couvert de dettes jusquaux oreilles !
Élodie, tout ne se mesure pas à largent soupira la belle-mère. Si tu aimes Antoine, respecte au moins son frère. Je ne te demande pas de passer tes nuits à lhôpital
Marguerite, excusez-moi, mais nous avons nos propres projets, répliqua Élodie avec froideur. Nous mettons de largent de côté pour lavenir de notre fille. Contrairement à Sébastien, elle a encore une chance de devenir quelquun de bien.

Les joues de Marguerite senflammèrent sous leffet de la colère. Élodie parlait de son fils aîné comme sil était moins que rien. Pourtant, ce nétait pas vrai.

Sébastien nétait peut-être pas un génie, mais cétait un homme de famille. Il travaillait, aimait sa femme et son fils, ne trompait personne. Un homme ordinaire, comme il en existe des milliers.

Antoine, lui, était ambitieux. Depuis lenfance, il rêvait de se hisser au-dessus de la masse et de trouver sa place au soleil. Il avait choisi son métier par calcul financier, non par passion. Devenu dentiste, il avait fini par gagner très bien sa vie. Il travaillait dur, se plaignait parfois de clients difficiles, mais vivait confortablement.

Sébastien, quant à lui, ne vivait pas dans la misère, même sil peinait à joindre les deux bouts. Il avait une voiture, certes achetée à crédit, et un appartement hérité de sa grand-mère.

Mais il avait aussi un vice : la nourriture. Sébastien adorait les sucreries, le pain et la mayonnaise. Il sautait souvent le petit-déjeuner pour se rattraper au dîner, passant ses week-ends affalé dans son canapé.

Sébastien, tu devrais manger plus de salades. Des vraies, pas celles remplies dœufs et de noix, lui reprochait Marguerite.

Mais globalement, elle ne sinquiétait pas. Jusquà ce quil soit hospitalisé pour des problèmes cardiaques. Les médecins découvrirent toute une série de complications.

Il doit suivre un régime. Peut-être à vie, annonça le médecin.

Sébastien nécouta pas. Il tint bon quelque temps avant de tout laisser tomber. Il ne revint pas aux contrôles, abandonna son traitement après le premier essai. Quand il se sentait mal, il serrait les dents et continuait.

Claire, tu devrais le forcer à consulter Il va se tuer à ce rythme, supplia Marguerite à sa belle-fille aînée.
Je veux bien, mais essayez donc de le forcer, vous. Têtu comme une mule. Je lui rebats les oreilles avec son régime. Et alors ? Je jette la mayonnaise, il en rachète. Il menace de ne plus manger à la maison si je continue à le nourrir dherbes, soupira Claire.

Tout le monde voyait bien que tant quil ne se prendrait pas en main, rien ne changerait. Mais Sébastien ne bougeait pas. Comme tant dautres, il attendait que la situation devienne critique.

Élodie, la belle-fille cadette, ne se contentait pas de le juger sévèrement. Elle le méprisait ouvertement.

Je ne comprends pas pourquoi vous vous donnez tant de mal pour lui. Quil continue à creuser sa propre tombe, lança-t-elle un jour, alors que Marguerite et Antoine parlaient de laîné.

La belle-mère essayait de se persuader quÉlodie était simplement une femme forte, que cette dureté pouvait parfois être utile. Mais au fond, elle savait : sa belle-fille était juste cruelle et indifférente.

Cela se voyait depuis longtemps. Élodie ne partageait jamais rien. Quand Marguerite lui demandait de laide, elle trouvait toujours une excuse : trop occupée, déjà engagée auprès de sa mère, pas en forme. Elle navait jamais levé le petit doigt pour aider au jardin de sa belle-mère, mais ne manquait jamais un barbecue. Quand il fallait garder sa fille, elle appelait Marguerite avant même de penser à sa propre mère.

La belle-mère avait longtemps gardé le silence. Chaque famille a ses secrets. Mais maintenant Elle commençait à sinquiéter sérieusement pour Antoine.

Quelques jours plus tôt, Sébastien avait eu une nouvelle crise. Les médecins avaient annoncé quil devait être opéré. La convalescence serait longue. Pour la première fois, Sébastien semblait effrayé. Il errait, sombre, mangeant à peine. À toutes les questions, il répondait par un geste agacé.

Marguerite ny tint plus et appela Claire.

Claire Comment ça va là-bas ? Vous vous en sortez ? Sébastien ne me dit rien. Restons au moins en contact par toi.
Oh, Marguerite Jai peur, avoua Claire. Vous savez bien, nous avons des crédits, on arrive à peine à sen sortir. Et maintenant, les examens, les médicaments, lopération Vous connaissez létat de lhôpital public.
Ma chérie, ne ten fais pas. On trouvera largent. Cest notre famille. On se serrera tous un peu les coudes
Si vous pouvez aider, je vous en serai éternellement reconnaissante.

Marguerite sentit son cœur se soulager. Largent nétait pas un problème, elle en était sûre. Elle imaginait déjà réunir Antoine et Élodie pour en discuter. Depuis toujours, elle avait appris à ses fils à sentraider.

Ce à quoi elle ne sattendait pas, cétait à lentêtement dÉlodie. Surtout que celle-ci vivait entièrement aux crochets de son mari. Élodie restait à la maison, prétendant soccuper du foyer. En réalité, elle vivait pour son plaisir : fitness, sorties entre amies, achats compulsifs. Marguerite remarquait bien ses nouvelles tenues à chaque visite.

Lavenir de votre fille répéta Marguerite, pensive. Mais comprends-tu que Sébastien naura peut-être plus davenir si nous labandonnons maintenant ?

Élodie pinça les lèvres avec mépris.

Il a profité, mangé comme un porc, et cest à moi de payer ? Jamais ! Quil se débrouille, cest un adulte !

Sur ces mots, elle se leva et fila vers la sortie.

Antoine, je tattends dans la voiture, lança-t-elle avant de disparaître.

Mais Antoine ne la suivit pas. Les poings serrés, il fixait la table. Marguerite détourna aussi le regard.

Un silence épais sinstalla. Quelque chose se brisait en eux. Antoine resta muet cinq longues minutes avant de se plonger dans son téléphone.

Antoine Je ne me mêle jamais, mais Aujourdhui,

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